Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A..., épouse B..., a saisi le Tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2115468 du 15 juin 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I° Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2023 sous le n° 23PA03076,
Mme B..., représentée par Me Apaydin, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2023 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du 14 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :
- le signataire est incompétent ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle, familiale et professionnelle ;
- l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;
- l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant a également été méconnu ;
- l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;
- une erreur manifeste d'appréciation a été commise.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La procédure a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
II° Par une requête enregistrée le 2 août 2023 sous le n° 23PA03565, Mme B..., représentée par Me Apaydin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 juin 2023 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du 14 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande.
Elle fait valoir les mêmes moyens que dans sa requête n° 23PA03076.
La procédure a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pagès a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., épouse B..., ressortissante turque née le 20 juillet 1992 à Halfeti (Turquie), est entrée en France le 25 décembre 2012 munie d'un visa long séjour. Saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, par arrêté du 14 octobre 2021, refusé de lui délivrer un titre de séjour, obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 15 juin 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par les deux requêtes susvisées, Mme B... relève appel de ce jugement.
2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, le refus de séjour vise notamment l'article
L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise, en fait, la situation privée, familiale et professionnelle de la requérante, en faisant notamment état de sa date d'entrée, de l'absence de preuve de sa présence en France pendant les années 2015 à 2019, de son mariage avec un ressortissant étranger en situation régulière, de la possibilité de bénéficier de la procédure de regroupement familial ainsi que de l'absence d'insertion professionnelle et de perspective à ce sujet. S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, le préfet de la Seine-Saint-Denis fait référence au 3°) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour le reste, il résulte de l'article L. 613-1 du même code que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, dont il a été dit précédemment qu'elle était suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions précitées doit être écarté. Il ne ressort par ailleurs pas des termes des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ni des autres pièces du dossier, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de la requérante. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle, familiale et professionnelle de Mme B... doit également être écarté.
5. En troisième lieu, à supposer même la continuité de sa présence établie en France depuis sa date d'entrée alléguée, en 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... serait dans l'impossibilité de reconstituer, dans son pays d'origine, sa cellule familiale, composée de son mari, de même nationalité et titulaire d'un titre de séjour d'un an, ainsi que de leur enfant né en 2015, ou que son époux n'aurait pas la possibilité de solliciter le bénéfice du regroupement familial en sa faveur. En outre, la requérante n'allègue ni travail ni perspective professionnelle. Dans ces conditions, et en dépit de sa maîtrise du français et des diverses attestations qui lui ont été délivrées par l'office français de l'immigration et de l'intégration dans le cadre de son contrat d'intégration, la situation de Mme B... ne révèle aucune circonstance humanitaire ou exceptionnelle au sens des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions doit donc être écarté.
6. En quatrième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou d'une stipulation d'un accord bilatéral, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'étranger peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ou d'une autre stipulation de cet accord, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
7. En l'espèce, Mme B... n'établit pas avoir présenté une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, elle ne saurait utilement soulever, à l'encontre du refus de séjour, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article. S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, il résulte des éléments relatifs à la situation privée, familiale et professionnelle de la requérante exposés au point 5, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en tout état de cause, être écarté.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses requêtes, y compris ses conclusions à fin d'injonction, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de Mme B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., épouse B..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Niollet, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller,
Mme d'Argenlieu, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 décembre 2023.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
J-C. NIOLLET
La greffière,
Z. SAADAOUI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 23PA03076, 23PA03565