Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler le permis de construire modificatif n° 2 délivré à la société Alliantz Invest par le maire de la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via pour une maison individuelle située 38 boulevard Cambre d'Aze au lieu-dit C..., portant sur le " recalage altimétrique " de la bâtisse et la réalisation de clôtures.
Par un jugement n° 1801486 du 9 juillet 2019 le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Par une décision du 3 août 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de pourvois présentés par la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via et la société Alliantz Invest, après avoir annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 30 septembre 2021, a renvoyé l'affaire devant la même cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 10 septembre 2019, 31 juillet 2020, 20 mars 2021 et 29 mars 2023, Mme B... A..., représentée par la SCP d'Avocats Emeric Vigo, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2018 du maire de la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via ;
3°) d'enjoindre au maire de Font-Romeu-Odeillo-Via de retirer le permis initial ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via et de la société Alliantz Invest une somme de 4 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les modifications apportées au permis affectent les conditions de jouissance de sa propriété et la valeur vénale de celle-ci ; elle démontre son intérêt à agir ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen selon lequel les modifications apportées au projet par rapport au permis initial n'ont pas toutes été régularisées par les permis modificatifs et sont d'une importance telle qu'elles nécessitaient un nouveau permis et non un permis modificatif ;
- les modifications apportées au projet par rapport au permis initial n'ont pas toutes été régularisées par les permis modificatifs et sont d'une importance telle qu'elles nécessitaient un nouveau permis global et non un permis modificatif ;
- l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir dès lors que le maire ne pouvait solliciter le dépôt d'une demande de permis modificatif en cours de chantier plutôt que dresser un procès-verbal d'infraction aux règles d'urbanisme comme il y était tenu ;
- l'arrêté en litige méconnait les règles de hauteur fixées par l'article 2.10 du règlement du lotissement " C... " ;
- le dossier de demande de permis de construire modificatif n'était pas complet au regard des dispositions des articles R. 431-7, R. 431-8 et R. 431-16 du code de l'urbanisme ; les plans joints dissimulaient l'altimétrie du terrain naturel ; l'appréciation de l'administration en a été faussée ;
- le permis a été obtenu par fraude.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 mars 2020, 28 mars 2023 et 27 avril 2023, la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via, représentée par Me Pons-Serradeil, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme 3 000 euros soit mise à la charge de Madame A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requérante ne justifie pas son intérêt à agir ;
- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Par des mémoires enregistrés les 4 septembre 2020 et 23 mars 2023, la société Alliantz Invest, représentée par la SELARL Lysis Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme 4 000 euros soit mise à la charge de Madame A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Les parties ont été informées, par une lettre du 22 février 2023, qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire au cours du second semestre 2023 et que l'instruction pourrait être close à partir du 31 mars 2023 sans information préalable.
Par une ordonnance du 11 mai 2023, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Un mémoire présenté pour la société Alliantz Invest a été enregistré le 11 mai 2023 et n'a pas été communiqué.
Une pièce présentée pour Mme A... a été enregistrée le 12 mai 2023 et n'a pas été communiquée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poullain,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Vigo, représentant Mme A..., de Me Bequain de Coninck, représentant la société Alliantz Invest et de Me Pons-Serradeil, représentant la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 21 juillet 2014, le maire de Font-Romeu-Odeillo-Via a délivré à la société Alliantz Invest un permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle et ses annexes sur un terrain situé 38, boulevard Cambre d'Aze, au lieu-dit " C... ". Ce projet a fait l'objet d'un premier permis de construire modificatif né tacitement le 31 juillet 2017. La société Alliantz Invest a déposé le 6 novembre suivant une deuxième demande de permis de construire modificatif portant sur le " recalage altimétrique " de la bâtisse et la réalisation de clôtures. Par arrêté en date du 26 janvier 2018, le maire de Font-Romeu-Odeillo-Via a fait droit à cette demande. Mme A... relève appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial ou après avoir épuisé les voies de recours contre le permis initial, ainsi devenu définitif, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Il appartient dans tous les cas au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ou, lorsque le contentieux porte sur un permis de construire modificatif, des modifications apportées au projet.
4. En l'espèce, Mme A... est propriétaire d'une maison d'habitation, située 35 boulevard du Cambre d'Aze à Font-Romeu-Odeillo-Via, immédiatement au nord de la parcelle d'assiette du projet litigieux qu'elle domine légèrement, vers laquelle elle est tournée, et dont elle n'est séparée que par le boulevard du Cambre d'Aze qui ne constitue pas une barrière visuelle entre les deux propriétés. Elle est ainsi voisine immédiate de la construction en cause. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le permis modificatif litigieux porte la hauteur au faîtage de 1 648,40 mètres du nivellement général de la France (NGF) à 1 649,21 mètres NGF, soit une augmentation de 81 centimètres. Eu égard à la vue directe dont la propriété de Mme A... dispose en direction du projet, et cette modification ne pouvant être regardée comme négligeable, la requérante justifie de son intérêt pour agir.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. En premier lieu, l'article 2.10 du règlement du lotissement " C... ", en vigueur et s'imposant à la date de délivrance du permis de construire litigieux, dispose que la hauteur des constructions est " mesurée à partir du sol naturel avant travaux, défini par le plan altimétrique détaillé jusqu'au sommet du bâtiment ", et que la hauteur des constructions ainsi mesurées " ne peut excéder 9,50 mètres lorsque le faitage est parallèle aux courbes de niveau (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que la construction initialement autorisée par le permis de construire délivré le 21 juillet 2014, consistait en un chalet de trois niveaux comprenant deux étages d'habitation et un sous-sol semi enterré avec une cave et un vide sanitaire. Il ressort du plan PC5 E.1 présentant la façade nord du permis initial que l'altimétrie du terrain naturel à l'aplomb du faîtage s'établissait à 1 638,90 mètres NGF, au regard des deux données altimétriques indiquées sur le plan de 1 639,00 mètres NGF et 1 638,50 mètres NGF relatives à la pente du terrain naturel. La hauteur du faîtage nord du chalet s'établissait à 1 648,40 mètres NGF selon le même plan PC5 E.1, en sorte que le bâtiment autorisé par le permis initial s'élevait au faîtage à 9,50 mètres du niveau naturel du terrain, et respectait, par suite, le règlement du lotissement en matière de hauteur.
7. Par un premier permis modificatif tacitement accordé le 31 juillet 2017, le pétitionnaire a notamment transformé le vide sanitaire et le garage initialement envisagés en sous-sol d'habitation avec garage attenant. La hauteur sous plafond du sous-sol, initialement prévue à 2,10 mètres selon le plan PC3 C.1 du permis initial, a été portée à 2,50 mètres selon la coupe AA du plan C.1 du premier permis modificatif pour la partie habitable. II ressort du plan E.1 du permis de construire modificatif n° 1 que la hauteur du faîtage de la construction n'a pas été modifiée, ni l'assiette du bâtiment, en sorte que la hauteur du bâtiment au faîtage nord était maintenue à 9,50 mètres du terrain naturel à l'aplomb, lequel s'établissait à 1 638,90 mètres NGF. Il s'ensuit que l'augmentation de la hauteur sous plafond du sous-sol pour le transformer en habitation n'était rendue possible que par un décaissement du terrain d'assiette sans que cela ne soit explicitement indiqué dans la demande de permis modificatif.
8. Par un deuxième permis modificatif, le pétitionnaire a entendu revenir sur ce décaissement et procéder à un " recalage altimétrique de la construction ", en portant la hauteur du faîtage nord à 1 649,21 mètres NGF, rehaussant ainsi le bâtiment de 81 cm par rapport au permis initial. Par suite, le niveau du terrain naturel à l'aplomb du faîtage étant nécessairement resté inchangé à 1 638,90 mètres NGF, et dès lors qu'il est constant que l'implantation du bâtiment n'a pas été modifiée, la hauteur sous faîtage a été portée à 10,31 mètres par rapport au terrain naturel, en méconnaissance de l'article 2.10 du règlement du lotissement.
9. Si la société Alliantz Invest et la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via soutiennent cependant que la hauteur du bâtiment sous le faîtage nord s'élève à 9,45 mètres et que l'altimétrie du terrain naturel du sol est de 1 639,76 mètres NGF à l'aplomb de ce faîtage, en étant comprise entre 1 639,79 mètres NGF et 1 639 mètres NFG conformément à ce qui est indiqué sur la coupe longitudinale du plan PC3 C.1 du permis modificatif n° 2, la modification du niveau du terrain naturel par rapport à celui qui était mentionné dans le permis initial n'est assortie d'aucune explication. Le niveau mentionné initialement est pourtant cohérent, d'une part, avec l'expertise du géomètre expert, versée par Mme A... à l'instance et se basant sur des données de 2004, qui évalue la hauteur d'aplomb sous faîtière nord à 1 638,85 mètres NGF, et, d'autre part, avec le plan PA 3 de l'état des lieux du permis de lotir, lequel fait apparaître un terrain naturel nécessairement inférieur à 1 639 mètres à l'aplomb du faîtage nord. Inversement, la pente du terrain naturel présentée dans la coupe longitudinale du plan PC3 C.1 du permis modificatif n° 2 ne fait pas apparaître le talus qui existait en bord de route au début des travaux, dont l'existence est pourtant démontrée par différentes photos avant travaux produites par Mme A... et est corroborée par les autres éléments du dossier. Contrairement à ce que soutient la société pétitionnaire sans l'assortir d'éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier que des travaux de terrassement pour l'aménagement du lotissement entrepris avant 2010 auraient modifié ces niveaux, qu'elle a d'ailleurs elle-même mentionnés dans sa demande initiale. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2.10 du règlement du lotissement doit être accueilli.
10. En deuxième lieu, l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme prévoit que : " Sont joints à la demande de permis de construire : / (...) / b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 421-8 à R. 431-12 ". Aux termes de l'article R. 431-8 de ce code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / (...) ". L'article R. 431-9 du même code précise : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; (...) / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / (...) ".
11. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. En outre, la fraude est caractérisée lorsque le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme.
12. Ainsi qu'il vient d'être exposé aux points 8 et 9, le dossier de demande de permis de construire modificatif n° 2 faisait apparaître, sur la coupe longitudinale du plan PC3 C.1, une altimétrie du terrain naturel du sol erronée. Par ailleurs, alors même que cette demande portait sur " le recalage altimétrique de la bâtisse ", l'autre plan de coupe transversale PC3 C.1, présenté par le pétitionnaire à l'appui de sa demande, était dépourvu de toute donnée altimétrique aisément exploitable, de même que les plans de façade nord et sud PC5 E.1 sur lesquels les tracés de terrain naturel et leur altimétrie ne figuraient plus, et les plans de masse PC2 M.2 et PC2 M.3 où les courbes de niveau n'étaient plus représentées. Dès lors, les inexactitudes et imprécisions des documents produits ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'administration sur la demande de permis quant à la conformité du projet à la réglementation applicable. En outre, ces inexactitudes et imprécisions caractérisent une fraude du pétitionnaire qui, alors qu'il ne l'ignorait pas pour l'avoir mentionnée sur ses deux premières demandes, a modifié l'altimétrie du terrain naturel ou l'a fait disparaître dans le seul but de masquer le dépassement de la règle de hauteur sur laquelle son attention avait particulièrement été appelée. Ainsi, les moyens tirés de l'insuffisance du dossier et de la fraude dont est entaché le permis litigieux doivent également être accueillis.
13. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à justifier l'annulation de la décision attaquée.
Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
14. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".
15. En vertu de ces dispositions, le juge, lorsqu'il constate qu'un vice entachant la légalité du permis de construire peut être régularisé par un permis modificatif, rend un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision litigieuse, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. S'agissant des vices entachant le bien-fondé du permis de construire, le juge doit se prononcer sur leur caractère régularisable au regard des dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue et constater, le cas échéant, qu'au regard de ces dispositions le permis ne présente plus les vices dont il était entaché à la date de son édiction.
16. Ainsi que le faisait valoir la commune en première instance sans être contredite, en application de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme, le règlement du lotissement " C... " est devenu caduc le 16 février 2019, dès lors qu'à cette date le lotissement était couvert par le plan local d'urbanisme communal et que dix années s'étaient écoulées depuis la délivrance de l'autorisation de lotir. Toutefois, le vice tenant à la fraude commise par le pétitionnaire ne peut faire l'objet d'une régularisation sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de justice administrative. Dès lors il n'y a pas lieu d'en faire application.
17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, dont il n'est pas nécessaire d'examiner la régularité, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
18. L'annulation du permis en litige, modificatif n° 2, n'implique pas que le maire de Font-Romeu-Odeillo-Via retire le permis initial. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction en ce sens présentées par Mme A... doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de Mme A... à leur titre, dès lors que cette dernière n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via et de la société Alliantz Invest la somme globale de 3 000 euros à verser à Mme A... à ce titre.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 juillet 2019 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 26 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via a délivré à la société Alliantz Invest un permis de construire modificatif n° 2 est annulé.
Article 3 : La commune de Font-Romeu-Odeillo-Via et la société Alliantz Invest verseront la somme globale de 3 000 euros à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la commune de Font-Romeu-Odeillo-Via et à la société Alliantz Invest.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Perpignan.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
-Mme Helmlinger, présidente,
-M. Claudé-Mougel, premier conseiller
-Mme Poullain, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2023.
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N°22MA02534
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