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29/11/2023 | FRANCE | N°22LY01804

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 29 novembre 2023, 22LY01804


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme F... A... -Marie C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser une somme de 91 446 euros en réparation des préjudices subis des suites d'une intervention chirurgicale pour une promontofixation effectuée le 16 janvier 2013 au centre hospitalier de Montélimar.



La caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner

le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser la somme de 90 055,18 euros au titre du r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... -Marie C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser une somme de 91 446 euros en réparation des préjudices subis des suites d'une intervention chirurgicale pour une promontofixation effectuée le 16 janvier 2013 au centre hospitalier de Montélimar.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser la somme de 90 055,18 euros au titre du remboursement des prestations servies à Mme C..., avec intérêts de droit à compter du 3 juillet 2020 et une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 2002417 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le groupement hospitalier Portes de Provence à verser la somme de 5 770 euros à Mme C..., une somme de 8 151,88 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2020 ainsi qu'une somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et a mis les frais d'expertise à la charge définitive du groupement hospitalier Portes de Provence.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juin 2022 Mme F... J... C..., représentée par la SARL Bonnet Florent Avocats, agissant par Me Florent, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 2002417 du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser une somme de 99 751 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices ;

3°) de mettre à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence une somme de 2 500 euros au titre des article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par des mémoires enregistrés les 8 et 22 février 2023, Mme G... B... et M. D... I..., agissant en qualités d'ayants droit de leur mère, Mme C..., décédée le 19 octobre 2022, ont déclaré reprendre l'instance engagée par cette dernière.

Ils soutiennent que :

- le centre hospitalier de Montélimar doit être regardé comme intégralement responsable des préjudices subis par Mme C... et qu'en tout état de cause l'évaluation du taux de responsabilité pour défaut d'information est insuffisant ;

- le tribunal a procédé à une insuffisante évaluation des préjudices subis.

Par des mémoires enregistrés les 26 août 2022 et 25 avril 2023, la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, représentée par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy de Dôme, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement n° 2002417 du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner le groupement hospitalier Portes de Provence à lui verser une somme de 83 926,18 euros, avec intérêts de droit à compter du 10 juillet 2020 et une somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de mettre à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2022 le centre hospitalier de Montélimar, représenté par Me Zandotti, demande à la cour de rejeter la requête et les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme.

Il soutient que :

- aucune responsabilité du centre hospitalier ne saurait être retenue dès lors que la lésion de l'intestin de Mme C... résulte d'un aléa thérapeutique ;

- dans l'hypothèse ou un défaut d'information serait retenu, la perte de chance d'éviter le dommage corporel en résultant, et par suite le taux d'indemnisation mis à sa charge, ne saurait excéder 10 % ;

- le lien de causalité entre le dommage et le besoin d'une assistance par une tierce personne jusqu'au 1er décembre 2018 n'est pas établi ;

- la réévaluation du préjudice esthétique n'est pas justifiée ;

- l'indemnisation demandée au titre du préjudice sexuel et d'agrément devra être écartée ;

- s'agissant des frais hospitalisation, ils ne sont justifiés que pour la période du 20 janvier au 28 mars 2013 et les frais médicaux seront arrêtés au 30 juin 2013.

Par une ordonnance du 5 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2023 à 16h30.

Par une décision du 25 janvier 2023 le bureau d'aide juridictionnelle a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Florent, représentant Mme B... et M. I... et de Me France, substituant Me Zandotti, représentant le centre hospitalier de Montélimar.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., née le 20 juin 1948, a été opérée pour un prolapsus pelvigénital le 16 janvier 2013 au centre hospitalier de Montélimar où il a été pratiqué une promontofixation par coelioscopie. Suite à cette intervention, elle a souffert d'une péritonite post-opératoire qui a nécessité une intervention chirurgicale en urgence le 29 janvier 2013. Mme C... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux Rhône-Alpes qui, au vu du rapport d'expertise du professeur E... du 6 octobre 2016, s'est déclarée incompétente le 7 novembre suivant. Le 30 mai 2020 Mme C... a dû subir une nouvelle intervention chirurgicale en urgence pour une occlusion sur éventration étranglée. Par le jugement attaqué du 19 avril 2022, dont Mme C... a interjeté appel, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le groupement hospitalier Portes de Provence à verser une somme de 5 770 euros à Mme C..., une somme de 8 151,88 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2020 ainsi qu'une somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et a mis les frais d'expertise à la charge définitive du groupement hospitalier. Mme B... et M. I..., agissant en qualités d'ayants droit de leur mère, Mme C..., décédée le 19 octobre 2022, ont déclarés reprendre l'instance engagée par cette dernière.

Sur le principe de responsabilité :

En ce qui concerne les fautes médicales :

2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 6 octobre 2016 établi par le professeur E..., que la péritonite dont a souffert Mme C... dans les suites de la promontofixation laparoscopique réalisée pour un prolapsus pelvigénital au centre hospitalier de Montélimar le 16 janvier 2013, a pour cause initiale une double lésion accidentelle peropératoire méconnue de l'intestin grêle survenue lors des manipulations nécessaires à l'exposition du foyer opératoire. Ce rapport précise que l'indication opératoire était légitime, que la promotofixation laparoscopique a été réalisée dans les règles de l'art et que l'absence d'appendicectomie est sans rapport avec le dommage, la nécrose de l'appendice n'étant pas la cause de la péritonite. Il indique également que la péritonite avec lésion de l'intestin grêle est un accident rare mais connu en chirurgie laparoscopique et que les éléments du dossier de la patiente permettent de caractériser un aléa thérapeutique. Il mentionne en outre l'intervention en urgence du 29 janvier 2013 pour la prise en charge de la péritonite ayant été réalisée conformément aux règles de bonne pratique, comme la prise en charge ultérieure. Il indique cependant que le retard d'une dizaine de jours dans le traitement de l'aléa thérapeutique au regard des symptômes présentés par la patiente est à l'origine d'une majoration des souffrances endurées par Mme C....

4. Dans ces conditions seul le retard dans la prise en charge de l'aléa thérapeutique est susceptible d'engager la responsabilité pour faute du centre hospitalier de Montélimar.

En ce qui concerne le défaut d'information :

5. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " I. - Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. / (...) ".

6. Lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé. Si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation. Il appartient à l'hôpital d'établir que l'intéressé a été informé des risques de l'acte médical. En application des dispositions précitées, doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. La faute commise par les praticiens d'un hôpital au regard de leur devoir d'information du patient n'entraîne pour ce dernier que la perte d'une chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé. La réparation du dommage résultant de cette perte doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice qui tient compte du rapprochement entre, d'une part, les risques inhérents à l'acte médical et, d'autre part, les risques encourus en cas de renoncement à cet acte. Lorsque le patient a droit à une réparation partielle des conséquences dommageables d'un accident en raison de la perte de chance qui a résulté pour lui d'un manquement, par les praticiens, à leur devoir d'information, il convient pour le juge de déterminer le montant total du dommage puis de fixer la fraction de ce dommage mise à la charge de l'hôpital à raison de la perte de chance résultant pour le patient de ce manquement au devoir d'information.

7. Le rapport d'expertise du 6 octobre 2016 mentionne que le centre hospitalier n'a pas établi avoir, préalablement à l'intervention du 16 janvier 2013, délivré à Mme C... les informations relatives aux risques associés à l'intervention et " plus globalement sur la balance bénéfices/risques, particulièrement importante dans cette chirurgie fonctionnelle ", ce que le centre hospitalier ne conteste pas en défense. Il résulte de ce rapport, qu'antérieurement à l'intervention par promontofixation laparoscopique, Mme C..., alors âgée de 64 ans, présentait un prolapsus pelvigénital extériorisé associé à des troubles fonctionnels urinaires sans incontinence, que le traitement d'un prolapsus constitué demeure essentiellement chirurgical et vise à la restauration anatomique et fonctionnelle, que la promontofixation est l'intervention de référence pour les prolapsus importants de la femme jeune, enfin que la péritonite avec lésion de l'intestin grêle est un accident rare mais connu et redouté en chirurgie laparoscopique. L'expert rappelle cependant que le risque de plaie intestinale accidentelle est très faible en l'absence de facteur de risque particulier et que l'état de santé antérieur de Mme C... ne présentait aucun facteur de risque. Ainsi, même si l'intervention ne présentait aucun caractère impérieux ou urgent pour Mme C..., il est vraisemblable qu'elle y aurait eu recours dans des délais brefs au regard des troubles occasionnés par un prolapsus. Compte tenu de ces éléments, le tribunal administratif de Grenoble n'a pas fait une insuffisante évaluation de la perte de chance résultant du défaut d'information, en l'évaluant à 10 %.

Sur les préjudices :

En ce qui concerne la consolidation :

8. Si le rapport d'expertise du 6 octobre 2016 avait fixé une date de consolidation au 1er juillet 2013, il résulte cependant de l'instruction que l'état de santé de Mme C... s'est aggravé postérieurement à la remise de ce rapport et qu'elle a subi, le 31 mai 2020, une intervention chirurgicale en urgence pour une occlusion sur éventration étranglée. Le rapport d'expertise en date du 31 janvier 2021, établi par le docteur H..., désigné par le tribunal administratif de Grenoble, indique que cette intervention est directement en lien avec les séquelles de l'intervention du 16 janvier 2013. Le risque d'occlusion étant induit par l'état de santé de Mme C... résultant de la survenue de la péritonite avec lésion de l'intestin grêle dans les suites de l'intervention initiale du 16 janvier 2013 et ce risque demeurant après l'intervention du 31 mai 2020, si l'état de santé de Mme C... était stabilisé, il ne pouvait être regardé comme consolidé.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

S'agissant des frais d'assistance par tierce personne :

9. Selon le rapport d'expertise du 6 octobre 2016, Mme C... a eu besoin de l'assistance d'une aide à domicile non spécialisée à raison d'une heure par jour pour la période du 29 mars au 15 avril 2013 et le rapport d'expertise du 31 janvier 2021 ne mentionne aucun besoin d'assistance. Par ailleurs, aucune pièce du dossier ne permet de retenir l'existence d'un lien de causalité entre la circonstance que Mme C... ait bénéficié d'une allocation personnalisée d'autonomie à hauteur de 26 heures par mois en raison d'un degré de perte d'autonomie " GIR 4 " à compter du 1er décembre 2018 et les dommages résultant de la survenue de l'aléa thérapeutique. Dans ces conditions, il y a lieu de fixer l'indemnisation due à Mme C... au titre de l'assistance par une tierce personne, à partir d'un taux horaire moyen de 14,93 euros, tenant compte de l'ensemble des charges patronales et majorations pour travail dominical et droits à congés, à une somme de 253,81 euros pour la période du 29 mars au 15 avril 2013, soit 17 jours. Compte tenu du taux de perte de chance une somme de 25,38 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

En ce qui concerne les préjudices personnels :

S'agissant du déficit fonctionnel temporaire :

10. Il résulte des rapports d'expertise que Mme C... a subi un déficit fonctionnel temporaire total du 20 janvier 2013 au 28 mars 2013 et du 30 mai au 5 juin 2020, un déficit fonctionnel temporaire évalué à 25 % pour les périodes du 29 mars 2013 au 10 avril 2013 puis du 6 juin au 29 juin 2020 et évalué à 10 % pour la période du 11 avril 2013 au 29 mai 2020. Le second rapport d'expertise indique qu'à compter du 29 juin 2020, Mme C... a conservé une incapacité permanente dont le taux a été évalué à 20 %, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 8 du présent arrêt, son état de santé ne pouvait être regardé comme étant consolidé au 29 juin 2020. Par suite, l'état de santé de Mme C... s'étant trouvé aggravé suite à l'intervention du 29 mai 2020, il convient de retenir l'existence d'un déficit fonctionnel temporaire de 20 % à compter de cette date et jusqu'à la date de son décès intervenu le 19 octobre 2022. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 9 000 euros, et, compte tenu du taux de perte de chance, une somme de 900 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

S'agissant des souffrances endurées :

11. Les souffrances endurées par Mme C... en lien avec la péritonite par perforations de l'intestin grêle ont été évaluées à 4 sur une échelle comportant 7 niveaux, l'expert indiquant que ses souffrances ont été majorées par le retard fautif de prise en charge de 10 jours dans le traitement de cette complication et que le taux de perte de chance d'éviter ces souffrances peut être évalué à 20 %. Pour fixer le taux de perte de chance de Mme C... d'éviter les souffrances en lien avec la péritonite par perforations de l'intestin grêle, il convient par suite d'additionner, d'une part, le taux de sa perte de chance de se soustraire à l'opération fixé à 10 % et, d'autre part, le taux de sa perte de chance résultant du retard fautif dans la prise en charge de cette complication, ce taux étant multiplié par la probabilité qu'elle ait accepté l'opération si elle avait été informée du risque qu'elle comportait. Compte tenu des taux de perte de chance, rappelés ci-dessus, il en résulte un taux global d'éviter les souffrances de 28 % (10 % + (20 % x 90 %)). Il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 15 000 euros et, compte tenu du taux de perte de chance de 28 % retenu pour ces seules souffrances, une somme de 4 200 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

12. Les souffrances endurées en raison de l'intervention pour occlusion sur éventration étranglée ont été évaluées à 2 sur une échelle de 7. Il résulte par ailleurs de l'instruction que Mme C... a souffert de douleurs abdominales récurrentes entre les deux interventions. Compte tenu de ces éléments, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 3 000 euros et, compte tenu du taux de perte de chance de 10 % résultant du défaut d'information initial, une somme de 300 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

S'agissant du préjudice esthétique permanent :

13. Il résulte du rapport d'expertise du 6 octobre 2016 que le préjudice esthétique permanent de Mme C... est représenté par une cicatrice de laparotomie médiane de 26 cm, siège d'une large éventration visible, des cicatrices annexes et par la disparition de l'ombilic. L'évaluation par l'expert de ce préjudice à 2,5 sur une échelle comportant 7 niveaux n'est pas susceptible d'être remise en cause par les seules photographies produites par Mme C.... Le second rapport d'expertise mentionne que ce préjudice n'a pas évolué. Dans ces conditions, ce préjudice pourra être évalué à 3 000 euros et, compte tenu du taux de perte de chance, une somme de 300 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

S'agissant du préjudice sexuel :

14. Le rapport d'expertise du 6 octobre 2016 indique que le préjudice sexuel allégué par la requérante n'est pas la conséquence de la complication mais qu'il serait en lien avec " la poursuite de la détérioration des structures de soutien des organes pelviens, donc avec la maladie causale. ". Cependant l'évolution de la pathologie initiale de Mme C... résulte de l'échec partiel de la première intervention, notamment du fait de l'ablation des bandelettes de soutien à raison de la survenance de la complication. Dans les circonstances de l'espèce, ce préjudice pourra être évalué à 3 000 euros et, compte tenu du taux de perte de chance, une somme de 300 euros sera mise à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence à ce titre.

S'agissant du préjudice d'agrément :

15. Si le second rapport d'expertise mentionne que Mme C... est dans l'impossibilité de se livrer à des activités spécifiques de sports et loisirs, elle n'a cependant justifié d'aucune activité de ce type qu'elle aurait été contrainte d'abandonner du fait des complications survenues suite à l'intervention du 16 janvier 2013. L'existence de ce préjudice n'est donc pas établie.

16. Il résulte de ce qui précède que l'indemnité allouée à Mme C... pour l'ensemble de ses préjudices s'élève à un montant total de 6 025,38 euros.

Sur les demandes de la CPAM de la Drôme :

17. Il n'est pas contesté que la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme justifie d'un montant de dépenses en lien avec l'accident médical dont a été victime Mme C... s'élevant à un total de 83 926,18 euros conformément à l'attestation d'imputabilité du 21 février 2023. Dans ces conditions et compte-tenu du taux de perte de chance, il y a lieu d'évaluer la somme due par le groupement hospitalier Portes de Provence à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme à la somme de 8 392,62 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2020, date d'enregistrement du mémoire présenté par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme devant le tribunal administratif de Grenoble.

18. Le groupement hospitalier Portes de Provence versera en outre à la CPAM de la Drôme l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale pour un montant de 1 162 euros.

19. Il résulte de tout ce qui précède, qu'il y a lieu de porter le montant de la somme due par le groupement hospitalier Portes de Provence aux ayants droit de Mme C... à la somme de 6 025,38 euros et de porter le montant de la somme due à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme au titre de ses débours à la somme de 8 392,62 euros avec intérêt au taux légal à compter du 3 juillet 2020 et à la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué du tribunal administratif de Grenoble du 19 avril 2022.

Sur les frais d'expertise :

20. En application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais et honoraires de l'expertise ordonnée en référé le 20 novembre 2020, liquidés et taxés pour un montant de 800 euros, doivent définitivement être mis à la charge du groupement hospitalier Portes de Provence.

Sur les frais d'instance :

21. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées pour Mme B... et M. I... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ni aux conclusions présentées pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et le groupement hospitalier Portes de Provence sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La somme de 5 770 euros que le groupement hospitalier Portes de Provence a été condamné à verser à Mme C... au titre de l'indemnisation de ses préjudices est portée à la somme de 6 025,38 euros qui sera versée à ses ayants droit.

Article 2 : La somme de 8 151,88 euros que le groupement hospitalier Portes de Provence a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme au titre de ses débours est portée à la somme de 8 392,62 euros avec intérêt au taux légal à compter du 3 juillet 2020 et à la somme de 1 114 euros qu'il a été condamné à lui verser au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité social est portée à la somme de 1 162 euros.

Article 3 : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2002417 du 29 avril 2021 du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Grenoble sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B..., à M. D... I..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et au groupement hospitalier Portes de Provence.

Copie en sera adressée au Dr H....

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Vergnaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2023.

La rapporteure,

E. Vergnaud

Le président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY01804


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01804
Date de la décision : 29/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Service public de santé. - Établissements publics d'hospitalisation. - Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux. - Absence de faute médicale de nature à engager la responsabilité du service public.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Edwige VERGNAUD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL ABEILLE & ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-29;22ly01804 ?
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