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29/11/2023 | FRANCE | N°21LY03804

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 29 novembre 2023, 21LY03804


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de décisions du 11 juin 2021 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de renvoi.



Par un jugement n° 2104411 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.





Procédure devan

t la cour :



Par une requête enregistrée le 24 novembre 2021, M. B... A..., représenté par Me Albertin, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de décisions du 11 juin 2021 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2104411 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 novembre 2021, M. B... A..., représenté par Me Albertin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 octobre 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions préfectorales du 11 juin 2021 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français sous trente jours et désignant un pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de procéder au réexamen de sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour, dans les délais respectifs de deux mois et de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à venir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

M. A... soutient que :

- la décision de refus de séjour est intervenue au terme d'une procédure viciée par l'absence de consultation de la commission du titre de séjour ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, car il justifie d'une durée de résidence en France supérieure à dix années ;

- le préfet a également porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle désignant son pays de renvoi sont illégales en raison de l'illégalité du refus de séjour, ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2022, la préfète de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

* la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;

* l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

* le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

* la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

* le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2023, le rapport de M. Gros, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 22 mai 1971, est entré en France le 28 novembre 1998 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa C. Il a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement, assortissant un refus de séjour, décisions prises le 5 mai 2014 par le préfet de la Drôme, annulées par le tribunal administratif de Grenoble, mais dont la légalité a été ultérieurement confirmée par la cour administrative de Lyon. Une deuxième mesure d'éloignement a été prononcée à l'encontre de cet étranger le 31 décembre 2015 par le même préfet. Le 11 juin 2021, cette autorité refuse de délivrer à M. A... le certificat de résidence qu'il sollicitait de nouveau sur le fondement des stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et l'oblige encore à quitter le territoire français, sous trente jours, en désignant son pays de renvoi. M. A... n'a pas obtenu l'annulation de ces décisions devant le tribunal administratif de Grenoble. Il relève appel de ce jugement rendu le 25 octobre 2021.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ". Il résulte de ces stipulations que la période de référence doit être supérieure à dix ans.

3. Pour refuser à M. A..., le 11 juin 2021, la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations précitées, le préfet de la Drôme a estimé que le demandeur ne prouvait pas avoir résidé habituellement en France de 2010 à 2014 ni en 2020. Or, M. A..., qui est donneur de sang, produit un historique sérologique, non discuté par le préfet, établi par l'établissement français du sang Auvergne-Rhône-Alpes, détaillant de nombreux prélèvements sanguins auxquels le requérant s'est soumis de décembre 2011 à juin 2021. Il produit également un récépissé de dépôt de demande de passeport que lui a délivré le consulat général d'Algérie à Lyon le 4 février 2020. Toutefois, la période de résidence habituelle en France de M. A... telle qu'établie par ces documents pour le second semestre 2011, les années 2012 à 2020 et le premier semestre 2021, ne dépasse pas dix ans, aucune pièce probante n'étant produite pour le premier semestre 2011 ni même pour l'année 2010. Dans ces circonstances, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Drôme a méconnu les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en ne lui délivrant pas le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ".

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. A... se prévaut d'un séjour de 23 ans en France, de l'aide qu'il apporte à sa mère malade, de nationalité française, qui l'héberge, et des liens étroits qu'il entretient avec deux demi-soeurs, de nationalité française également. Toutefois le requérant, qui a résidé en France de décembre 2011 à début 2021, n'y établit pas la continuité de son séjour depuis son entrée, en 1998, à fin 2011. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français, n'y fait état d'aucun élément d'intégration, et sa présence auprès de sa mère, ou auprès de ses demi-soeurs, pour utile qu'elle puisse être, n'est pas démontrée indispensable, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches en Algérie, quittée à l'âge de 27 ans. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à M. A... le certificat de résidence sollicité, le préfet de la Drôme n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Doit en conséquence être écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ces dernières au surplus n'ayant pas été invoquées à l'appui de la demande de titre de séjour. Le préfet n'a pas davantage entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... ne pouvait pas prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence de plein droit, sur le fondement des stipulations du 1) ou même du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par conséquent, le préfet de la Drôme n'était pas tenu, avant de statuer sur la demande de l'intéressé, de saisir préalablement la commission du titre de séjour instituée à l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure tenant à un défaut de saisine de cette commission doit être écarté.

7. En quatrième lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'ayant pas été démontrée illégale, ne peut qu'être écarté le moyen tiré d'une telle illégalité articulé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et, en tout état de cause, articulé à l'encontre de celle désignant un pays de renvoi.

8. En dernier lieu, ces décisions, pour les motifs exposés au point 5, n'ont pas été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2023.

Le rapporteur,

B. GrosLe président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03804


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03804
Date de la décision : 29/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Bernard GROS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : ALBERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-29;21ly03804 ?
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