La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/11/2023 | FRANCE | N°23BX01215

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 28 novembre 2023, 23BX01215


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., représenté par Me Uldrif Astié, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite de rejet née le 29 mars 2022 du silence gardé par la préfète de la Gironde sur sa demande du 29 novembre 2021 tendant à la délivrance d'un titre de séjour pour motif exceptionnel, d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 80 euros par jo

ur de retard, ou, à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes condi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., représenté par Me Uldrif Astié, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite de rejet née le 29 mars 2022 du silence gardé par la préfète de la Gironde sur sa demande du 29 novembre 2021 tendant à la délivrance d'un titre de séjour pour motif exceptionnel, d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 80 euros par jour de retard, ou, à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Astié au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Par un jugement n° 2205476 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision implicite de la préfète de Gironde du 29 mars 2022, a enjoint au préfet de la Gironde de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2023, Me Astié demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 2205476 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 600 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que les premiers juges ont, à tort, rejeté ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 dès lors que l'Etat était la partie perdante devant le tribunal, que M. B... a dû engager un recours pour faire valoir ses droits et qu'aucune circonstance particulière ne justifie que les frais exposés et non compris dans les dépens soient laissés à sa charge.

La requête a été communiquée au préfet de la Gironde, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michaël Kauffmann,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Debril, représentant Me Astié.

Considérant ce qui suit :

Sur le cadre du litige :

1. Il résulte des dispositions des articles R. 811-7 et R. 431-2 du code de justice administrative qu'un requérant exerçant la profession d'avocat ne peut, en principe, assurer sa propre représentation dans une instance à laquelle il est personnellement partie. Toutefois, eu égard à l'objet du litige, relatif à l'application des dispositions régissant l'aide juridictionnelle et né à l'occasion d'une instance dans laquelle un client de l'avocat était partie, les dispositions de l'article R. 811-7 du code de justice administrative ne font pas obstacle à ce que l'avocat d'un bénéficiaire de l'aide juridictionnelle assure sa propre représentation dans le cadre de la contestation d'une décision juridictionnelle en tant qu'elle statue sur la demande qu'il avait présentée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

2. M. B..., ressortissant algérien né le 27 septembre 1971, a sollicité, le 29 novembre 2021, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette demande est restée sans réponse, de sorte qu'une décision implicite de rejet est née le 29 mars 2022. Par un jugement du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision et a enjoint au préfet de la Gironde de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. L'appel de M. B..., tendant à ce que ce jugement soit réformé en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande de son conseil tendant à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doit être regardé comme présenté par Me Astié, qui est le signataire de la requête et qui représentait M. B... devant le tribunal.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) ".

4. L'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Il appartient dans tous les cas au juge d'apprécier, en fonction des circonstances de l'espèce, s'il y a lieu de faire droit à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions.

5. Il est constant que dans l'instance engagée devant le tribunal administratif, M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, doit être regardé comme la partie gagnante et l'Etat comme la partie perdante. Par suite, en l'absence de circonstances particulières ressortant des pièces du dossier de première instance, Me Astié, avocat de M. B..., qui dispose d'un droit propre à obtenir le bénéfice des frais exposés et non compris dans les dépens dus par la partie perdante, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Astié renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens de première instance.

Sur les frais liés à l'instance d'appel :

6. Me Astié, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat, n'indique pas la nature des frais mentionnés à l'article L. 761-1 du code de justice administrative qu'il aurait exposés. Dès lors, les conclusions tendant au versement à son profit de la somme de 600 euros au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Au titre de l'instance n° 2205476 devant le tribunal administratif de Bordeaux, l'Etat versera à Me Astié une somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Astié renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 2 : Le jugement n° 2205476 du 6 mars 2023 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Me Astié est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me Uldrif Astié et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.

Le rapporteur,

Michaël Kauffmann La présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 23BX012152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01215
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : SCP ASTIE-BARAKE-POULET-MEYNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;23bx01215 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award