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21/11/2023 | FRANCE | N°22DA01952

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 21 novembre 2023, 22DA01952


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 21 juillet 2020 par laquelle la rectrice de l'académie d'Amiens a décidé de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée après le 1er septembre 2020.



Par un jugement n° 2003035 du 15 juillet 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistr

s les 19 et 20 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Chalon, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 21 juillet 2020 par laquelle la rectrice de l'académie d'Amiens a décidé de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée après le 1er septembre 2020.

Par un jugement n° 2003035 du 15 juillet 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 et 20 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Chalon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 21 juillet 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de ne pas renouveler son contrat de travail a été prise en raison de son engagement syndical et est empreinte de discrimination ;

- elle a montré son aptitude professionnelle dans des conditions de travail dégradées, tenant notamment au comportement sexiste de son supérieur, de telle sorte que la décision contestée est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2023, le recteur de l'académie d'Amiens conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle se borne à se référer à la demande de première instance sans présenter des moyens d'appel ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 20 octobre 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été engagée par le rectorat de l'académie d'Amiens à compter du 1er septembre 2017, sous couvert d'un contrat à durée déterminée d'un an, pour exercer les fonctions d'agent d'une équipe mobile de sécurité chargée d'assurer la protection et la sécurité des personnes et des biens dans les établissements d'enseignement scolaire. Alors que son contrat de travail a été renouvelé à deux reprises, Mme A... a été informée, par un courrier du 21 juillet 2020, de la décision de ne pas renouveler cet engagement à la prochaine échéance du 31 août 2020. Mme A... a saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une demande d'annulation de cette décision, qui a été rejetée par un jugement du 15 juillet 2022. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, repris depuis à l'article L. 131-1 du code général de la fonction publique : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions (...) syndicales (...) ". Il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux qui permettent d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

3. D'autre part, un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.

4. En premier lieu, Mme A... soutient que le refus de renouveler son contrat de travail a pour motif son engagement syndical et se prévaut sur ce point d'une attestation du responsable local du syndicat dont elle est adhérente et des mentions portées dans le rapport de son supérieur hiérarchique du 5 juin 2020 lui reprochant de contester de façon répétée les instructions du chef de l'équipe mobile et de transmettre ces instructions à son syndicat. Toutefois, si la première évaluation professionnelle de Mme A... indique qu'elle a trouvé la pleine dimension de son poste et qu'elle est respectueuse de la hiérarchie, sa deuxième évaluation, réalisée le 13 juin 2019, souligne qu'elle doit adhérer pleinement aux directives de sa hiérarchie et s'inscrire dans l'organisation collective du groupe et de l'équipe mobile de sécurité. Le comportement de Mme A... à l'égard de l'autorité hiérarchique a ainsi fait l'objet de réserves avant l'entrée en fonctions de son nouveau chef d'équipe au mois de novembre 2019, qui corroborent les critiques formulées dans le rapport précité du 5 juin 2020. Dans ces conditions, les faits reprochés à la requérante au terme de sa dernière année d'activité, relatifs à une défiance à l'égard de son chef d'équipe, dont elle transmettait les ordres à son syndicat, et à une contestation des actions de sécurisation décidées par l'administration, ne permettent pas de présumer une discrimination, alors en outre que l'intéressée n'exerce aucune fonction de représentation ou mandat syndical. Ni l'attestation précitée, dont l'auteur rapporte des faits imprécis sans indiquer en avoir été le témoin, ni les alertes du responsable syndical des 8 février et 22 avril 2020, qui se réfèrent à des revendications catégorielles, ni encore les mentions manuscrites et sommaires portées dans la " synthèse des rencontres hiérarchiques ", dont il ne ressort d'ailleurs aucunement que Mme A... aurait été mise en cause pour avoir fait grève, ne sont de nature à laisser présumer une discrimination à son encontre, en raison de son adhésion à un syndicat. Le courrier électronique du 3 septembre 2018, dans lequel le responsable de la sécurité du rectorat tient des propos inappropriés à Mme A..., est sans rapport avec la discrimination syndicale dont elle se plaint. Par suite, il n'est pas établi que la décision refusant de renouveler le contrat de Mme A... serait empreinte de discrimination en raison de son engagement syndical et aurait été prise pour un motif étranger à l'intérêt du service.

5. En second lieu, si Mme A... fait état du comportement du responsable de la sécurité du rectorat, contre lequel des accusations de harcèlement ont été portées par l'une de ses collègues, elle ne produit, pour ce qui la concerne, que le courriel précité du 3 septembre 2018 qui, s'il fait état de propos déplacés à son égard, ne démontre pas qu'elle aurait été victime du comportement reproché au responsable. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... se serait plainte de harcèlement dans l'exercice de ses fonctions ou que son parcours professionnel aurait été compromis à la suite de ce courriel, alors que son contrat de travail a été reconduit pour l'année scolaire 2019-2020. La requérante produit au dossier les attestations de collègues faisant état de ses compétences professionnelles, de ses efforts pour intégrer le nouveau chef d'équipe nommé en novembre 2019 et de sa mise à l'écart par ce dernier à compter de janvier 2020. Toutefois, ces témoignages ne contredisent pas les reproches tenant à son opposition aux missions de sécurisation, à ses critiques récurrentes adressées à la hiérarchie et au refus de se remettre en cause, qui constituent des insuffisances professionnelles dont l'administration pouvait tenir compte pour ne pas renouveler son contrat de travail. Par suite, le moyen tiré d'un prétendu détournement de pouvoir ne peut qu'être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Amiens.

Délibéré après l'audience publique du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 novembre 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

N. Roméro

2

N° 22DA01952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01952
Date de la décision : 21/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : CABINET ACG

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-21;22da01952 ?
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