Vu la procédure suivante :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation du titre de perception du 14 novembre 2019, par lequel il a mis à sa charge la somme de 98 722,96 euros, et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ce titre, tendant d'autre part à la condamnation de l'AP-HM à lui rembourser la somme de 25 563,61 euros prélevée sur son compte bancaire, ainsi qu'à lui verser la somme de 19 386,71 euros à titre de dommages et intérêts, et tendant enfin à ce qu'il soit enjoint au directeur général de l'AP-HM de lui accorder la protection fonctionnelle, ainsi que de régulariser sa situation contractuelle. Par un jugement n° 2008244 du 14 juin 2024, le tribunal administratif a annulé la décision implicite par laquelle le directeur général de l'AP-HM a refusé d'accorder à Mme B... le bénéfice de la protection fonctionnelle et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Par une ordonnance n° 24MA02026 du 4 novembre 2024, la présidente de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la demande présentée par Mme B... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions aux fins d'annulation du titre de perception du 14 novembre 2019.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 19 novembre 2024, 4 décembre 2024 et 12 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure engagée, d'ordonner le sursis à exécution du jugement de première instance dans la mesure demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grévy, avocat de Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du I de l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période : " Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus. " Le premier alinéa de l'article 2 de la même ordonnance dispose : " Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article 7 de la même ordonnance : " Sous réserve des obligations qui découlent d'un engagement international ou du droit de l'Union européenne, les délais à l'issue desquels une décision, un accord ou un avis de l'un des organismes ou personnes mentionnés à l'article 6 peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n'ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus jusqu'à la fin de la période mentionnée au I de l'article 1er ".
2. Par ailleurs, l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. "
3. Enfin, aux termes de l'article R. 421-7 du code de justice administrative : " Lorsque la demande est portée devant un tribunal administratif qui a son siège en France métropolitaine ou devant le Conseil d'État statuant en premier et dernier ressort, le délai de recours prévu à l'article R. 421-1 est augmenté d'un mois pour les personnes qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises. (...) Ce même délai est augmenté de deux mois pour les personnes qui demeurent à l'étranger. (...) "
4. Il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Marseille que Mme B... a demandé le 27 janvier 2020 au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre de perception du 14 novembre 2019 par lequel le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) a mis à sa charge la somme de 98 722,96 euros et la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ce titre, ainsi que de condamner l'AP-HM à lui rembourser la somme de 25 563,61 euros prélevée sur son compte bancaire et à lui verser la somme de 19 386,71 euros à titre de dommages et intérêts, et enfin d'enjoindre au directeur général de l'AP-HM de lui accorder la protection fonctionnelle et de régulariser sa situation contractuelle. Par un jugement du 14 juin 2024, le tribunal administratif a annulé la décision implicite par laquelle le directeur général de l'AP-HM a refusé d'accorder à Mme B... le bénéfice de la protection fonctionnelle et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Mme B... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 4 novembre 2024 par laquelle la présidente de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions aux fins d'annulation du titre de perception du 14 novembre 2019 et mis à sa charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
5. Il résulte des dispositions citées au point 1 que la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par Mme B... est née le 8 juillet 2020, après que le délai de recours fixé à l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales cité au point 2 a été suspendu entre le 12 mars et le 23 juin 2020 inclus en application des dispositions du premier alinéa de l'article 7 de l'ordonnance du 25 mars 2020.
6. Il résulte des dispositions citées au point 3 que le délai de recours qui était ouvert à Mme B..., dont il est constant qu'elle avait son domicile au Canada, contre la décision implicite de rejet de son recours gracieux était majoré d'un délai de distance de deux mois, le portant à quatre mois. Sa demande enregistrée au greffe du tribunal administratif le 26 octobre 2020 n'était ainsi pas tardive. Mme B... est par suite fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 3 000 euros à verser à Mme B..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille du 4 novembre 2024 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille versera à Mme B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille.
Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
Délibéré à l'issue de la séance du 26 juin 2025 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 21 juillet 2025.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Christophe Barthélemy
Le secrétaire :
Signé : M. Bernard Longieras