La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2025 | FRANCE | N°487938

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 23 juin 2025, 487938


Vu la procédure suivante :



Par une demande en tierce opposition, l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus a demandé au tribunal administratif de Poitiers de déclarer non avenu son jugement n° 1702680 du 15 novembre 2018 par lequel il a délivré à la société Ferme éolienne de Plaisance l'autorisation d'exploiter cinq éoliennes sur le territoire de la commune de Plaisance (Vienne).



Par un jugement n° 1902876 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



Par un arrêt n° 20BX04268 du 4 mai 2023, la cour administrative d'appel de Bordeaux...

Vu la procédure suivante :

Par une demande en tierce opposition, l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus a demandé au tribunal administratif de Poitiers de déclarer non avenu son jugement n° 1702680 du 15 novembre 2018 par lequel il a délivré à la société Ferme éolienne de Plaisance l'autorisation d'exploiter cinq éoliennes sur le territoire de la commune de Plaisance (Vienne).

Par un jugement n° 1902876 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20BX04268 du 4 mai 2023, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 1er décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Ferme éolienne de Plaisance la somme de 3 000 euros à verser à Me Caston, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la Ferme éolienne de Plaisance ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 29 septembre 2017, le préfet de la Vienne a refusé de faire droit à la demande de la société Ferme éolienne de Plaisance de lui délivrer l'autorisation d'exploiter cinq éoliennes sur le territoire de la commune de Plaisance (Vienne). Par un premier jugement du 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté, délivré à cette société l'autorisation demandée et enjoint à l'autorité préfectorale de fixer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, les conditions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Par un second jugement du 22 octobre 2020, le tribunal administratif a, d'une part, admis la recevabilité de la requête en tierce opposition présentée par l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus aux fins de voir déclaré nul et non avenu son jugement du 15 novembre 2018 et, d'autre part, rejeté sa demande. Par un arrêt du 4 mai 2023, contre lequel cette association se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel formé contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale (...) qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients (...) soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages (...), soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ".

3. En premier lieu, en indiquant que la valeur probante de la méthodologie mise en œuvre pour la réalisation du photomontage, produit par l'association appelante en vue de contester les conclusions de l'étude d'impact suivant lesquelles le projet litigieux n'était pas susceptible de porter atteinte au site de la Roc d'Enfer, n'était pas démontrée, la cour a suffisamment motivé son arrêt sur ce point.

4. En deuxième lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que, pour apprécier l'atteinte significative d'une installation à des paysages ou à des sites, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents, notamment, le cas échéant, la visibilité du projet depuis ces sites ou la covisibilité du projet avec ces sites ou paysages. Si la covisibilité du projet avec les sites ou paysages n'a pas à être appréciée uniquement depuis les points spécialement aménagés pour l'accès du public à ces sites ou paysages ou depuis les points les plus fréquentés par le public, qui peuvent au demeurant varier au fil du temps, l'autorité administrative et le juge sont néanmoins fondés à prêter une importance particulière aux éventuelles situations de covisibilité depuis ces points de vue. Par suite, en relevant, pour juger que le projet litigieux ne porterait pas d'atteinte significative au site de Roc d'Enfer, parmi le faisceau d'éléments pris en considération, qu'il n'était pas établi que le photomontage produit par l'association requérante et faisant état d'une situation de covisibilité avait été réalisé à partir d'un point d'accès du public à ce site, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.

5. En troisième lieu, s'il incombe à l'autorité administrative, pour déterminer si l'atteinte portée à un site ou à un paysage est de nature à justifier le refus d'autorisation environnementale, d'apprécier la qualité de ce site ou paysage de façon intrinsèque, sa renommée, sa fréquentation, voire les aménagements qui lui sont apportés, peuvent constituer des éléments à l'appui de cette appréciation. Par suite, en relevant, pour apprécier la qualité du site de la Pierre Levée de Chiroux, après avoir décrit le dolmen et ses alentours, qu'il ne résultait pas de l'instruction que le dolmen jouirait d'une renommée particulière et présenterait un intérêt autre que local, l'étude d'impact mentionnant une faible fréquentation et une absence totale de signalétique, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En quatrième lieu, en estimant que la présence de grands chênes et d'un boisement formant deux écrans végétaux successifs permettrait d'atténuer de manière significative l'atteinte portée au site de la Pierre Levée de Chiroux, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

8. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Ferme éolienne de Plaisance et de l'Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association la somme de 1 500 euros à verser à la société Ferme éolienne de Plaisance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus est rejeté.

Article 2 : L'association pour la protection des paysages et de l'environnement versera à la société Ferme éolienne de Plaisance la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association pour la protection des paysages et de l'environnement de Lathus, à la société Ferme éolienne de Plaisance et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Délibéré à l'issue de la séance du 15 mai 2025 où siégeaient : M. Christophe Pourreau, assesseur, présidant ; M. Antoine Berger, auditeur et Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 23 juin 2025.

Le président :

Signé : M. Christophe Pourreau

La rapporteure :

Signé : Mme Nathalie Destais

La secrétaire :

Signé : Mme Angélique Rajaonarivelo


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 487938
Date de la décision : 23/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2025, n° 487938
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nathalie Destais
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO & GOULET ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:487938.20250623
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award