Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 août et 14 novembre 2024 et le 25 avril 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association nationale des patients atteints de cancers de l'œil demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la ministre du travail, de la santé et des solidarités a rejeté sa demande du 11 avril 2024 tendant à la saisine de la Haute Autorité de santé sur le fondement du II de l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, en vue de l'inscription de l'acte " photographies du fond d'œil dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique " réalisé par un(e) infirmier(ère) dans la nomenclature générale des actes professionnels ;
2°) d'enjoindre à la ministre de saisir la Haute Autorité de santé dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Tison, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de l'association nationale des patients atteints de cancers de l'œil ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale : " I.- La prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé (...) est subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article. (...). / II.- La demande d'inscription de l'acte ou de la prestation est adressée par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ou par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pour avis à la Haute Autorité de santé. Cet avis porte sur l'évaluation du service attendu ou du service rendu de l'acte ou de la prestation qui lui est soumis ainsi que, le cas échéant, sur les actes existants dont l'évaluation pourrait être modifiée en conséquence. Il mentionne également si nécessaire les conditions tenant à des indications thérapeutiques ou diagnostiques, à l'état du patient et des conditions particulières de prescription, d'utilisation ou de réalisation de l'acte ou de la prestation. A la demande du collège, l'avis de la Haute Autorité de santé peut être préparé par la commission spécialisée mentionnée à l'article L. 165-1. Cet avis est transmis à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie dans un délai de six mois à compter du dépôt de la demande. / Peuvent proposer à la Haute Autorité de santé de s'autosaisir de l'évaluation du service attendu ou du service rendu d'un acte ou d'une prestation, selon des modalités définies par voie réglementaire : / 1° Les conseils nationaux professionnels mentionnés à l'article L. 4021-3 du code de la santé publique ; / 2° Les associations d'usagers agréées au titre de l'article L. 1114-1 du même code ; / 3° L'exploitant, au sens du I de l'article L. 165-1-1-1 du présent code, d'un produit de santé mentionné aux articles L. 5211-1 ou L. 5221-1 du code de la santé publique, lorsque ce produit est, d'une part, porteur de l'action thérapeutique ou diagnostique de l'acte à évaluer et, d'autre part, à usage collectif. (...) / VII.- Les conditions d'inscription d'un acte ou d'une prestation, leur inscription et leur radiation sont décidées par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, après avis de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire et après avis, le cas échéant, de la Haute Autorité de santé lorsque la décision porte sur l'évaluation du service attendu ou du service rendu d'un acte ou d'une prestation. Les décisions d'inscription de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie sont réputées approuvées sauf opposition motivée des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ".
2. Il résulte des dispositions citées au point précédent que la saisine pour avis de la Haute Autorité de santé par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ou par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale n'est qu'un élément de la procédure qui permet à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie de prendre une décision concernant l'inscription des actes ou prestations de santé sur les listes prévues par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale en vue de leur remboursement et leur prise en charge par l'assurance maladie ou aux ministres compétents de s'y opposer. La saisine pour avis de la Haute Autorité de santé a, dès lors, le caractère d'un acte préparatoire et ne constitue pas par elle-même une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il en est de même de la décision par laquelle les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale refusent de procéder à la saisine de la Haute Autorité de santé.
3. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de l'association nationale des patients atteints de cancers de l'œil ne sont pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées, ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de l'association nationale des patients atteints de cancers de l'œil est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association nationale des patients atteints de cancers de l'œil et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Délibéré à l'issue de la séance du 22 mai 2025 où siégeaient : M. Édouard Geffray, conseiller d'Etat, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et Mme Isabelle Tison, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 12 juin 2025.
Le président :
Signé : M. Édouard Geffray
La rapporteure :
Signé : Mme Isabelle Tison
Le secrétaire :
Signé : M. Hervé Herber