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28/05/2025 | FRANCE | N°502086

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 28 mai 2025, 502086


Vu la procédure suivante :



Par deux mémoires, enregistrés le 3 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et trois nouveaux mémoires, enregistrés le 23 avril 2025, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, M. A... B... demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du 10 décembre 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 5 août 2024 par laquelle l

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Vu la procédure suivante :

Par deux mémoires, enregistrés le 3 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et trois nouveaux mémoires, enregistrés le 23 avril 2025, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, M. A... B... demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du 10 décembre 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 5 août 2024 par laquelle le bureau du conseil central de la section H de l'ordre des pharmaciens a refusé de l'inscrire au tableau de l'ordre, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, d'une part, des articles L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique et du 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, d'autre part des articles L. 4221-1 et L. 4222-4 du code de la santé publique.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34 et 61-1 ;

- les articles L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique ;

- les articles L. 4221-1, L. 4222-4, et L. 6152-1 du code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat du Conseil national de l'ordre des pharmaciens ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du 10 décembre 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a refusé de l'inscrire au tableau de cet ordre, M. B... demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, d'une part, des articles L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique et du 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, d'autre part, des articles L. 4221-1 et L. 4222-4 du code de la santé publique.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

Sur les articles L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique et l'article L. 6152-1 du code de la santé publique :

3. M. B... soutient en premier lieu que les article L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique et le 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, qu'il doit être regardé comme contestant en tant qu'il inclut les pharmaciens d'hôpitaux parmi les personnels des établissements de santé soumis au pouvoir disciplinaire du directeur du CNG, portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution.

4. Ces dispositions ont pour objet de prévoir que le Centre national de gestion est l'établissement public national à caractère administratif chargé, notamment, de la gestion des praticiens hospitaliers, parmi lesquels peuvent figurer des pharmaciens hospitaliers, que son directeur assure, en qualité d'autorité investie du pouvoir de nomination, la gestion statutaire de ces pharmaciens, et qu'il exerce à leur égard le pouvoir disciplinaire. La requête au soutien de laquelle M. B... conteste ces dispositions est cependant dirigée, non contre une décision prise par application de ces dispositions, mais contre la décision par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a, sur son recours hiérarchique, refusé son inscription au tableau de la section H de cet ordre. Les dispositions des article L. 453-1, L. 453-3 et L. 532-1 du code général de la fonction publique et du 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique ne sont par conséquent pas applicables au présent litige.

Sur les articles L. 4221-1 et L. 4222-4 du code de la santé publique :

5. Eu égard aux termes des écritures, la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B... doit être regardé comme dirigée contre l'article L. 4221-1 du code de la santé publique en tant qu'il dispose que : " Nul ne peut exercer la profession de pharmacien s'il n'offre toutes garanties de moralité professionnelle " et contre l'article L. 4222-4 du même code en tant qu'il dispose que : " Après avoir examiné les titres et qualités du demandeur, le conseil régional de la section A ou le conseil central de la section B, C, D, E, G ou H de l'ordre soit accorde l'inscription au tableau, soit, si les garanties de (...) de moralité (...) ne sont pas remplies, la refuse ".

6. En premier lieu, la décision, à caractère administratif, par laquelle le conseil régional de la section A ou le conseil central de la section B, C, D, E, G ou H de l'ordre des pharmaciens refuse l'inscription d'un professionnel au tableau de l'ordre ne constitue pas, alors même qu'elle serait motivée par un défaut de moralité professionnelle, une sanction ayant le caractère d'une punition. Les griefs tirés de ce que les dispositions contestées porteraient atteinte aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines, garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et au principe de respect des droits de la défense ainsi qu'au principe de séparation des pouvoirs garantis par l'article 16 de ce texte ne peuvent dès lors qu'être écartés comme inopérants.

7. En deuxième lieu, si l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques, sa méconnaissance ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution.

8. En troisième lieu, l'argumentation tirée par M. B... de ce que les dispositions contestées porteraient atteinte au principe d'égalité protégée par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 n'est pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. A supposer que M. B... ait entendu, en joignant cette argumentation à l'argumentation mentionnée au point précédent, critiquer l'insuffisante précision du critère de " moralité professionnelle " en ce qu'elle permettrait un exercice arbitraire de leur compétence par les instances ordinales, ce grief ne peut en tout état de cause qu'être écarté, le critère de moralité professionnelle, qui permet à l'autorité administrative de s'assurer que les demandeurs présentent les garanties nécessaires pour exercer la profession de pharmacien et, en particulier, pour respecter les devoirs qui s'attachent à cette profession, ne revêtant pas le caractère imprécis ou équivoque qui lui est reproché.

9. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

10. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnelle la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B....

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B....

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au Conseil national de l'ordre des pharmaciens.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre, à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et au ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.

Délibéré à l'issue de la séance du 22 mai 2025 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, assesseur et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 28 mai 2025.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 502086
Date de la décision : 28/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 mai. 2025, n° 502086
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:502086.20250528
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