Vu la procédure suivante :
La société Sofijar a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2019 à 2021 dans les rôles de la commune de
Baie-Mahault (Guadeloupe). Par un jugement n° 2201438 du 31 janvier 2024, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 24BX00793 du 9 avril 2024, enregistrée le
17 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré au greffe de cette cour le 29 mars 2024, formé par la société Sofijar contre ce jugement.
Par ce pourvoi et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 26 juin 2024 et 21 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Sofijar demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boucard, Capron, Maman, avocat de la société Sofijar ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 31 janvier 2024, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande de la société Sofijar tendant à la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2019 à 2021 dans les rôles de la commune de Baie-Mahault (Guadeloupe).
2. Aux termes des dispositions de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, selon le cas, de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition (...) ".
3. Le tribunal administratif a jugé que la demande présentée par la société requérante était irrecevable faute pour elle d'établir, par la seule production d'un récépissé d'envoi d'un courrier à l'administration fiscale, lui avoir adressé la réclamation préalable prévue à l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales. En statuant ainsi, alors qu'aucun élément ne tendait à montrer que le pli en cause ne contenait pas la réclamation préalable, par ailleurs produite devant le tribunal, et eu égard à la concordance des dates figurant sur le récépissé d'envoi et cette réclamation, le tribunal a méconnu les règles relatives à l'attribution de la charge de la preuve et dénaturé les pièces du dossier.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la société Sofijar est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Sofijar au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 31 janvier 2024 du tribunal administratif de la Guadeloupe est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de la Guadeloupe.
Article 3 : L'Etat versera à la société Sofijar la somme de 3 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Sofijar et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 27 mars 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Vincent Daumas, conseiller d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 6 mai 2025.
La présidente :
Signé : Mme Anne Egerszegi
Le rapporteur :
Signé : M. Olivier Saby
Le secrétaire :
Signé : M. Gilles Ho
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :