Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré qui lui a été appliquée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, afférente aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016. Par un jugement n° 2002765 du 23 décembre 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 22MA00613 du 15 février 2024, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement et prononcé la décharge de la majoration en litige.
Par un pourvoi, enregistré le 9 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que
M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2015 et 2016 à l'issue duquel il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sur les hauts revenus et de contributions sociales, assorties de la majoration pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts s'agissant des rectifications notifiées au titre de revenus d'origine indéterminée. Par un jugement du 23 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de
M. B... tendant à la décharge de cette majoration. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 février 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et prononcé la décharge sollicitée.
2. L'autorité de la chose jugée qui appartient aux décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement, support nécessaire du dispositif, et à leur qualification sur le plan pénal. En revanche, elle n'a pas d'incidence sur la qualification par le juge de l'impôt de ces mêmes faits au regard de la loi fiscale.
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille a prononcé la décharge de la majoration pour manquement délibéré en litige au motif que l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans un arrêt du
5 novembre 2019 devenu définitif faisait obstacle à ce que les sommes en litige imposées au principal puissent être qualifiées de revenus d'origine indéterminée dans la mesure où les constatations de fait qui étaient le support nécessaire de la décision de relaxe rendue par le juge pénal en faveur du requérant tranchaient la question de l'objet et de la nature des opérations effectuées et énonçaient que les revenus perçus étaient constitutifs, non pas de revenus d'origine indéterminée imposables, mais de dons manuels.
4. En statuant ainsi alors que, d'une part, le motif de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence tiré de ce qu'à supposer qu'il soit reproché au prévenu de ne pas avoir déclaré un don manuel, l'infraction de fraude fiscale n'était pas caractérisée, était hypothétique et par suite ne pouvait être regardé comme une constatation de fait qui était le support nécessaire du dispositif, et que, d'autre part, en tout état de cause, une relaxe de l'intéressé au motif que les fonds en litige auraient répondu aux caractéristiques fiscales d'un don manuel ne s'imposait pas au juge de l'impôt, la cour administrative d'appel de Marseille s'est méprise sur la portée de la décision rendue par le juge pénal et a commis une erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 15 février 2024 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de M. B... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de souveraineté industrielle et numérique et à M. B....
Délibéré à l'issue de la séance du 27 mars 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Vincent Daumas, conseiller d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 6 mai 2025.
La présidente :
Signé : Mme Anne Egerszegi
Le rapporteur :
Signé : M. Olivier Saby
Le secrétaire :
Signé : M. Gilles Ho
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :