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02/05/2025 | FRANCE | N°493096

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 02 mai 2025, 493096


Vu la procédure suivante :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 mars 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour.



Par un jugement n° 2203471 du 15 juin 2023, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



Par une ordonnance n° 23NC02599 du 26 janvier 2024, la magistrate désignée par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par Mme A...

contre ce jugement.



Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregi...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 mars 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2203471 du 15 juin 2023, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 23NC02599 du 26 janvier 2024, la magistrate désignée par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par Mme A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 14 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante allemande entrée sur le territoire français en 2018, a demandé, en 2021, l'admission au séjour en qualité de citoyenne de l'Union européenne. Par une décision du 28 mars 2022, le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à sa demande de titre de séjour. Par une ordonnance du 26 janvier 2024, prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, contre laquelle Mme A... se pourvoit en cassation, la magistrate désignée par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 juin 2023 rejetant sa demande d'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article de 467 du code civil : " La personne en curatelle ne peut, sans l'assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille. Lors de la conclusion d'un acte écrit, l'assistance du curateur se manifeste par l'apposition de sa signature à côté de celle de la personne protégée. A peine de nullité, toute signification faite à cette dernière l'est également au curateur. ". Aux termes du dernier alinéa de l'article 468 du même code : " Cette assistance est également requise pour introduire une action en justice ou y défendre ". L'article 442 du même code prévoit, par ailleurs, que le juge peut, à tout moment, mettre fin à la mesure de curatelle qu'il a prononcé.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêt du 26 octobre 2021, la cour d'appel de Metz a ordonné le placement de Mme A... sous le régime de la curatelle simple pour une durée de cinq ans et a désigné l'association Active 57 Service MJPM en qualité de curateur. Mais, par une ordonnance du 22 mai 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Sarreguemines, statuant en qualité de juge des tutelles, a prononcé la mainlevée de la mesure de curatelle ordonnée par la cour d'appel de Metz à l'égard de Mme A.... Dès lors, Mme A... est fondée à soutenir que la magistrate désignée par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit en jugeant que sa requête d'appel présentée le 4 août 2023 était manifestement irrecevable au motif qu'elle n'était pas revêtue de la signature du curateur précédemment désigné par le juge judiciaire.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". L'article 43 de de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75 de cette loi, la partie perdante " au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés ". L'article 37 de la même loi dispose que " (...) Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat. En revanche, l'avocat de ce bénéficiaire peut, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

7. D'une part, Mme A... n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée par une décision du 3 mai 2024. D'autre part, l'avocat de Mme A... n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à sa cliente si cette dernière n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, les conclusions de la requête de Mme A... tendant à la condamnation de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance de la magistrate désignée par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy du 26 janvier 2024 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : Le surplus des conclusions est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré à l'issue de la séance du 27 mars 2025 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat et Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 2 mai 2025.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

La rapporteure :

Signé : Mme Stéphanie Vera

La secrétaire :

Signé : Mme Angélique Rajaonarivelo


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 493096
Date de la décision : 02/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 mai. 2025, n° 493096
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Vera
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP FABIANI PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:493096.20250502
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