Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association " Plus belle notre Verzée ", l'association " Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France " (SPPEF), l'association " Fédération vent d'Anjou ", M. et Mme X... AI..., M. S... et Mme AY... J..., M. et Mme AE... de H..., Mme AT... K... épouse H..., Mme Y... K..., M. AX... AN..., M. I... F..., M. V... AM..., M. V... Q..., M. AZ... de BC..., M. M... AA..., M. N... AU..., Mme A... U..., M. et Mme AO..., M. et Mme C..., M. W... G..., M. et Mme D..., M. et Mme AN..., M. AF... AK..., Mme AS... AH..., Mme O... E..., M. AR... AJ..., Mme BB... Q..., M. AP... AQ..., M. et Mme R..., M. B... AL..., Mme P... K..., M. L... AG..., M. AC... AD..., M. T... AN..., Mme A... AB... et Mme AW... Z... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 juillet 2015 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a autorisé la société Futures Énergies Landes de Pruillé à exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune d'Armaillé (Maine-et-Loire).
Par un jugement n° 1510614 du 6 avril 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 18NT02214 du 4 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par l'association " Plus belle notre Verzée " et autres contre ce jugement.
Par une décision n° 436301 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par l'association " Plus belle notre Verzée " et autres, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nantes.
Par un premier arrêt n° 21NT02437 du 21 juin 2022, la cour administrative d'appel, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, a sursis à statuer sur la requête présentée par l'association " Plus belle notre Verzée " et autres jusqu'à ce que le préfet de Maine-et-Loire ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté conformément aux modalités définies aux points 54 à 61 de ce même arrêt.
Par un second arrêt n° 21NT02437 du 26 septembre 2023, la cour administrative d'appel a, après que le préfet de Maine-et-Loire lui a communiqué son arrêté du 25 avril 2023 modifiant l'arrêté du 10 juillet 2015, rejeté l'appel formé par l'association " Plus belle notre Verzée " et autres contre le jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 avril 2018.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi sommaire, deux mémoires complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 novembre et 5 décembre 2023 et les 16 février et 9 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Sites et monuments ", l'association " Fédération vent d'Anjou ", l'association " Plus belle notre Verzée ", M. S... et Mme AY... J..., Mme AT... de H..., M. AX... AN..., M. V... AM..., M. V... Q..., M. M... AA..., M.N... AU..., Mme A... U..., M. et Mme AV... AN..., M. AP... AQ..., M. L... AG... et M. AZ... de BC... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les arrêts des 21 juin 2022 et 26 septembre 2023 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Futures Énergies Landes de Pruillé la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le premier arrêt du 21 juin 2022 est entaché d'irrégularité, faute de viser, en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, la note en délibéré produite par la société pétitionnaire le 19 septembre 2019 dans l'instance n° 18NT02214 ;
- le même arrêt est entaché d'une dénaturation des pièces du dossier en jugeant que l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 10 juillet 2015 ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement concernant l'atteinte au paysage et aux monuments ;
- cet arrêt est entaché d'erreur de droit en se bornant à apprécier le risque de saturation visuelle au regard de la co-visibilité des éoliennes avec les parcs éoliens existants ou en projet, sans s'interroger sur les angles d'occupation ou de respiration ;
- cet arrêt est entaché d'insuffisance de motivation, car il ne répond pas lors de l'examen du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, à la branche de ce moyen tirée de l'atteinte occasionnée à la santé des riverains ;
- cet arrêt est entaché d'erreur de droit, car il écarte de manière concomitante, s'agissant de l'avifaune, les moyens tirés de ce que l'autorisation a été délivrée en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement et de ce que la société pétitionnaire aurait dû présenter une demande de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées au titre de l'article L. 411-2 du même code ;
- cet arrêt est entaché d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation en jugeant que la société pétitionnaire n'était pas tenue de solliciter la délivrance d'une dérogation sur le fondement de l'article L. 411-2 précité, sans rechercher si le risque que comporte le projet pour les espèces protégées était suffisamment caractérisé ;
- cet arrêt est entaché d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation en jugeant, pour écarter le moyen tiré de l'incompatibilité avec la carte communale d'Armaillé, que l'installation n'est pas incompatible avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière et ne porte pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles ;
- l'arrêt du 26 septembre 2023 doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêt du 21 juin 2022 ;
- le même arrêt est entaché d'erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement pour ce qui concerne les espèces protégées de chiroptères ;
- le même arrêt est entaché d'erreur de droit ou, à tout le moins, d'une dénaturation des pièces du dossier en jugeant que les moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des chiroptères et de l'absence de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées de chiroptères, de l'absence de prise en compte des inconvénients du projet dans l'étude d'impact et d'insuffisance de l'étude d'impact concernant l'inventaire de zones humides, d'amphibiens et de reptiles n'ont pas été révélés par la procédure de régularisation et sont, par suite, inopérants.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association Sites et monuments, et à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de la société Futures Energies Landes de Pruillé ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 10 juillet 2015, le préfet de Maine-et-Loire a autorisé la société Futures Énergies Landes de Pruillé à exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune d'Armaillé (Maine-et-Loire). Par un jugement du 6 avril 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de l'association " Plus belle notre Verzée " et autres tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêt du 4 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par l'association " Plus belle notre Verzée " et autres contre ce jugement. Par une décision du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel. Par un arrêt du 21 juin 2022, la cour administrative d'appel a jugé que l'arrêté du 10 juillet 2015 était entaché d'illégalité en tant, d'une part, que l'avis de l'autorité environnementale du 11 août 2014 avait été émis dans des conditions ne répondant pas aux exigences de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dès lors que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) des Pays de la Loire avait à la fois instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis et, d'autre part, que le public n'avait pas été suffisamment informé quant aux capacités financières de la société pétitionnaire. La cour administrative d'appel, faisant application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, a sursis à statuer sur la demande de l'association " Plus belle notre Verzée " et autres jusqu'à ce que le préfet de Maine-et-Loire ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation. Par un arrêté du 25 avril 2023, le préfet de Maine-et-Loire a accordé à la société Futures Énergies Landes de Pruillé une autorisation modificative d'exploiter afin de régulariser son arrêté du 10 juillet 2015. L'association " Sites et monuments " et autres se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 21 juin 2022 ainsi que contre l'arrêt du 26 septembre 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, après la transmission de l'arrêté du 25 avril 2023, constaté la régularisation et rejeté leur appel.
Sur le désistement de M. AQ... :
2. Le désistement de M. AQ... est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.
Sur le pourvoi :
En ce qui concerne le pourvoi en tant qu'il est formé contre l'arrêt du 21 juin 2022 :
S'agissant de la régularité de l'arrêt :
3. En vertu de l'article R. 731-3 du code de justice administrative : " A l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré ". L'article R. 741-2 du même code prévoit que cette production est mentionnée dans la décision. Eu égard à l'objet de l'obligation ainsi prescrite, qui est de permettre à l'auteur de la note en délibéré de s'assurer que la formation de jugement en a pris connaissance, la circonstance qu'une note en délibéré n'a pas été mentionnée dans la décision, en méconnaissance de cette obligation, ne peut être utilement invoquée pour contester cette décision que par la partie qui a produit cette note. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soulever le moyen tiré de ce qu'une note en délibéré produite par la société pétitionnaire n'aurait pas été visée par l'arrêt attaqué.
S'agissant du bien-fondé de l'arrêt :
4. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". Aux termes de cet article L. 511-1 : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1 (...) ".
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du volet paysager de l'étude d'impact et des photomontages qu'il comporte, que, si les lignes de crêtes sont susceptibles d'offrir des vues sur le parc éolien, celui-ci sera partiellement masqué par la végétation ou le relief, son impact visuel étant limité par l'implantation des éoliennes disposées, d'après ce même volet paysager, " selon un ordonnancement régulier ". En se fondant sur ces différents éléments pour en déduire qu'en dépit de la qualité des paysages, le projet ne porte pas atteinte à l'intérêt du bocage du Segréen, du Pouancéen et de la vallée de la Verzée, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
6. En deuxième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour se prononcer sur l'impact du projet sur la conservation des sites et monuments, la cour a d'abord relevé qu'il résultait du volet paysager que le château du Bois-Geslin, situé en fond de vallée, est entouré de plantations qui limitent les vues depuis l'extérieur et atténuent les vues sur le parc éolien. Puis la cour a retenu que, compte tenu de l'orientation du château de Pouancé sur le versant opposé au parc éolien et de la densité du tissu urbain du centre de cette commune, il ne résultait pas de l'instruction que des vues seraient possibles sur le parc éolien litigieux. Enfin, après avoir relevé que le château de Tressé disposait d'un parc composé de grands arbres ne permettant pas de vues vers le site éolien depuis la terrasse du château, elle a jugé que la vallée et le plateau du site éolien n'étaient perceptibles qu'à partir des étages supérieurs du château. En se fondant sur ces éléments, qu'elle a précisés être notamment issus de l'étude paysagère et du volet paysager de l'étude d'impact, pour écarter le moyen tiré de l'atteinte à l'intérêt de ces monuments dans des conditions méconnaissant les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
7. En troisième lieu, la circonstance que les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement incluent la protection des paysages ne fait pas obstacle à ce que l'impact visuel d'un projet, en particulier le phénomène de saturation visuelle qu'il est susceptible de produire, puisse être pris en compte pour apprécier ses inconvénients pour la commodité du voisinage au sens de cet article. Il appartient au juge de plein contentieux, pour apprécier les inconvénients pour la commodité du voisinage liés à l'effet de saturation visuelle causé par un projet de parc éolien, de tenir compte, lorsqu'une telle argumentation est soulevée devant lui, de l'effet d'encerclement résultant du projet en évaluant, au regard de l'ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en termes de reliefs et d'écrans visuels, l'incidence du projet sur les angles d'occupation et de respiration, ce dernier s'entendant du plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents.
8. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le moyen, soulevé devant elle, tiré de ce que le projet était susceptible de créer un effet de saturation visuelle avec d'autres parcs éoliens, la cour a relevé que ces derniers se trouvaient à une distance comprise entre 9,5 et 12 kilomètres de la zone d'implantation du projet, de sorte que leur co-visibilité avec celui-ci serait extrêmement réduite. En fondant son appréciation sur la configuration des lieux, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit.
9. En quatrième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour répondre au moyen tiré de ce que le projet portera atteinte au cadre de vie et à la santé des riverains, la cour a relevé que les éoliennes, d'une part, longent la route départementale RD 6 et sont en partie masquées par les haies bocagères et, d'autre part, ne génèrent pas, en raison de leur taille modérée au regard de l'ampleur du panorama, un effet d'écrasement. En jugeant ensuite, eu égard à ces considérations et à l'absence d'effet de saturation visuelle, que les moyens tirés de la méconnaissance de la convention européenne des paysages et de l'article 1er de la Charte de l'environnement garantissant le droit de chacun à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé n'étaient, en tout état de cause, pas fondés, la cour n'a, au regard de l'argumentation dont elle était saisie, pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.
10. En cinquième lieu, le I de l'article L. 411-1 du code de l'environnement comporte un ensemble d'interdictions visant à assurer la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats. Sont ainsi interdits : " 1° la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle (...) d'animaux de ces espèces (...) ; / (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Toutefois, le 4° de l'article L. 411-2 du même code permet à l'autorité administrative de délivrer des dérogations à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant à l'absence de solution alternative satisfaisante, à la condition de ne pas nuire " au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle " et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs qu'il énumère limitativement et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.
11. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus impose d'examiner si l'obtention d'une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l'espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l'applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l'état de conservation des espèces protégées présentes. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".
12. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour écarter le moyen tiré de ce qu'une dérogation " espèces protégées " était requise, la cour a, d'abord, relevé que la principale zone d'activité des chiroptères susceptible d'être affectée se trouvait sur le site du Menhir de Pierre-Frite, qui n'est pas situé à proximité immédiate du projet, les trois autres secteurs d'activité étant plus éloignés du parc éolien. Puis la cour a relevé que, compte tenu de la configuration du projet, de la faible présence de ces espèces et du fait que l'autorisation attaquée était assortie d'une prescription imposant à l'exploitant de procéder à des mesures de bridage de deux éoliennes depuis le coucher jusqu'au lever du soleil, du 1er juillet au 30 septembre, sous certaines conditions de vent et de température, l'impact du projet pour ces espèces serait très limité. En se prononçant ainsi au regard des pièces du dossier qui lui étaient alors soumises pour apprécier si le risque d'atteinte à ces espèces était suffisamment caractérisé, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas commis d'erreur de droit.
13. En sixième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 181-3 du code de l'environnement que les autorisations environnementales ne peuvent être accordées qu'à la condition que les mesures qu'elles comportent permettent de prévenir les dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, au nombre desquels figure la protection de la nature et de l'environnement. Ainsi, le juge peut prononcer l'annulation d'une autorisation environnementale au motif qu'elle porte atteinte à la conservation d'espèces protégées, qui est au nombre des intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement, sans mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement en vue de permettre au pétitionnaire de solliciter une dérogation au titre de l'article L. 411-2 du même code, s'il résulte de l'instruction, notamment des éléments relatifs aux atteintes portées à la conservation de ces espèces et des possibilités de les éviter, de les réduire ou de les compenser, qu'aucune prescription complémentaire n'est susceptible d'assurer la conformité de l'exploitation aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Toutefois, les dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 mettent en place un régime spécifique de protection des espèces protégées qui ne se confond pas avec les intérêts protégés de manière générale par l'article L. 511-1. Il s'ensuit qu'un risque d'atteinte portée à des espèces protégées peut apparaître suffisamment caractérisé pour que le projet nécessite l'octroi d'une dérogation sur le fondement de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, sans pour autant être d'une nature et d'une ampleur telles qu'il porterait, sans qu'aucune prescription complémentaire puisse l'empêcher, une atteinte à la conservation de ces espèces justifiant d'opposer un refus sur le fondement de l'article L. 511-1 du même code. Il s'ensuit également que lorsqu'aucun risque n'apparaît suffisamment caractérisé pour nécessiter l'octroi d'une dérogation " espèces protégées, un projet peut, pour ce même motif, ne pas méconnaître les dispositions de cet article L. 511-1. Par suite, en jugeant, eu égard aux constatations qu'elle avait faites, mentionnées au point 12, qu'il en résultait à la fois que l'autorisation litigieuse n'avait pas été délivrée en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement et qu'une dérogation " espèces protégées " n'était pas requise, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit.
14. En septième lieu, aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme alors applicable, aujourd'hui repris à l'article L. 161-4 du même code, les cartes communales " (...) délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles ". Pour apprécier si la première de ces exigences est satisfaite, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge, d'apprécier si le projet permet l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière significative sur le terrain d'implantation, au regard des activités qui sont effectivement exercées dans la zone concernée ou, le cas échéant, auraient vocation à s'y développer, en tenant compte notamment de la superficie de la parcelle, de l'emprise du projet, de la nature des sols et des usages locaux.
15. Il ressort des écritures devant les juges du fond qu'au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme, les requérants avançaient que ni l'étude d'impact, ni l'arrêté préfectoral d'autorisation du 10 juillet 2015 ne rapportaient la preuve que l'implantation des éoliennes en zone naturelle N ne serait pas incompatible avec la vocation de celle-ci, au sens de ces dispositions. En relevant, dans un premier temps, que les éoliennes et le poste de livraison constituent des installations nécessaires à des équipements collectifs, pour juger ensuite que l'autorisation attaquée ne méconnaît pas la carte communale d'Armaillé, eu égard au fait que le projet ne méconnaît pas la conservation des sites et monuments, ni celle de la faune ou du cadre de vie, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas commis d'erreur de droit.
16. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt du 21 juin 2022.
En ce qui concerne le pourvoi en tant qu'il est formé contre l'arrêt du 26 septembre 2023 :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêt du 26 septembre 2023 doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêt du 21 juin 2022.
18. En second lieu, aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / (...) 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations (...) ".
19. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Elles ne peuvent, en revanche, soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.
20. En l'espèce, il résulte de l'instruction qu'à la suite du premier arrêt du 21 juin 2022 par lequel la cour administrative d'appel a sursis à statuer pour que deux vices soient régularisés, dont celui tiré de ce que l'avis de la DREAL des Pays de la Loire du 11 août 2014 n'avait pas été émis dans des conditions répondant aux exigences de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011, dite directive " projets " un nouvel avis a été rendu par la mission régionale d'autorité environnementale (MRAe) compétente pour la région Pays de la Loire le 18 octobre 2022. Eu égard à ce vice, tiré de l'irrégularité de l'avis rendu par l'autorité environnementale sur le dossier du projet en cause, comprenant notamment l'étude d'impact, seuls étaient susceptibles d'être utilement invoqués, à l'appui de la contestation de l'arrêté préfectoral du 25 avril 2023, des moyens mettant en cause des vices propres à la mesure de régularisation, ou contestant que l'avis émis par l'autorité environnementale permettrait de régulariser le vice relevé ou soutenant que de nouveaux vices, fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation, affecteraient la légalité de l'arrêté attaqué.
21. Il ressort des énonciations du premier arrêt du 21 juin 2022 que la cour a jugé que n'était pas fondé le moyen, soulevé devant elle, tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact. Pour écarter ce moyen, la cour a, notamment, relevé que cette étude recensait les zones naturelles situées à proximité du lieu d'implantation des éoliennes et qu'elle évaluait les effets du projet à l'égard des oiseaux et des chiroptères. Elle a relevé, en ce qui concerne plus particulièrement les chiroptères, qu'un inventaire des zonages relatifs au patrimoine naturel avait été établi et que l'étude précisait la méthodologie retenue, notamment les dates de prospection, le nombre de points d'écoute et le nombre d'espèces observées. Elle en a conclu que les enjeux du projet étaient identifiés et analysés et que cette étude comportait des mesures suffisamment précises d'évitement et de réduction des impacts sur les espèces protégées. Il ressort des énonciations du même arrêt que, ainsi qu'il a été dit au point 12, la cour a répondu au moyen, également soulevé devant elle, tiré de ce que la société pétitionnaire aurait dû présenter une demande de dérogation " espèces protégées " prévue par l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Si, dans son avis, émis le 18 octobre 2022 dans le cadre de la procédure de régularisation, la MRAe a relevé des insuffisances dans l'étude d'impact s'agissant des chiroptères et de l'absence de dérogation " espèces protégées " et s'agissant de l'inventaire des zones humides, des amphibiens et des reptiles, ces éléments, auxquels la cour avait déjà répondu dans son premier arrêt du 21 juin 2022, ne portaient ni sur les vices que la mesure de régularisation avait pour objet de régulariser, ni sur des vices propres à cette mesure, et n'avaient pas été révélés par la procédure de régularisation. Par suite, en jugeant que les requérants ne pouvaient utilement invoquer des moyens tirés de ces insuffisances et de l'absence de dérogation " espèces protégées ", la cour administrative d'appel n'a ni commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier.
22. Il résulte de ce qui précède que l'association " Plus belle notre Verzée " et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt du 26 septembre 2023.
23. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de l'association " Plus belle notre Verzée " et autres doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'association " Plus belle notre Verzée " et autres le versement d'une somme de 2 000 euros à la société Futures Énergies Landes de Pruillé au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. AQ....
Article 2 : Le pourvoi de l'association " Plus belle notre Verzée " et autres est rejeté.
Article 3 : L'association " Plus belle notre Verzée " et autres verseront une somme de 2 000 euros à la société Futures Énergies Landes de Pruillé au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association " Plus belle notre Verzée ", représentante unique, à la société Futures Énergies Landes de Pruillé, à M. AP... AQ... et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Délibéré à l'issue de la séance du 13 mars 2025 où siégeaient : M. Christophe Pourreau, assesseur, présidant ; M. Gaspard Montbeyre, maître des requêtes en service extraordinaire et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 30 avril 2025.
Le président :
Signé : M. Christophe Pourreau
Le rapporteur :
Signé : M. Cédric Fraisseix
La secrétaire :
Signé : Mme Magalie Café