Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean de L'Hermite, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la Société Criteo ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. Les dispositions de l'article 19 de la loi du 6 janvier 1978, dans leur rédaction applicable au litige, déterminent l'étendue et les modalités des pouvoirs d'enquête à caractère administratif conférés à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) pour l'exercice des missions qui lui sont conférées par cette même loi ainsi que par le règlement général sur la protection des données. Elles précisent en particulier les conditions dans lesquelles les membres et les agents de la CNIL peuvent accéder aux locaux servant à la mise en œuvre d'un traitement de données à caractère personnel et les cas dans lesquels cet accès est soumis à l'autorisation préalable et au contrôle du juge des libertés et de la détention. Elles prévoient notamment que les membres et agents de la CNIL " peuvent demander communication de tous documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission, quel qu'en soit le support, et en prendre copie " et qu'ils " peuvent recueillir, notamment sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles et nécessaires à l'accomplissement de leur mission. "
3. La société Criteo reproche à ces dispositions de ne pas prévoir, en méconnaissance du droit de ne pas s'incriminer soi-même résultant de l'article 9 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'obligation pour les membres ou agents de la CNIL procédant à des opérations d'enquête et de contrôle d'aviser préalablement les gestionnaires de traitement de données à caractère personnel ou leurs représentants de leur droit de garder le silence lors de leur déroulement. Toutefois, ces dispositions n'ont pas pour objet le recueil, par les enquêteurs de la CNIL, des explications d'une personne portant sur des faits pour lesquels elle serait mise en cause dans le cadre d'une procédure tendant à l'adoption de mesures de sanction à son encontre. Elles n'impliquent donc pas par elles-mêmes que les personnes sollicitées se voient notifier leur droit de se taire. Par suite, la question soulevée par la société Criteo, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux et il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Criteo.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Criteo, au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Copie en sera adressée au Premier ministre.