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09/04/2025 | FRANCE | N°492236

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 09 avril 2025, 492236


Vu la procédure suivante :



Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juin 2022 par lequel le maire de Roquebrune-sur-Argens (Var) a délivré à la société civile de construction vente La Thébaïde un permis de construire valant division pour la construction de trois maisons individuelles et la rénovation d'une villa sur un terrain situé avenue de la Thébaïde. Par un jugement n° 2202368 du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de

Toulon a rejeté cette demande et n'a pas admis l'intervention de l'association...

Vu la procédure suivante :

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juin 2022 par lequel le maire de Roquebrune-sur-Argens (Var) a délivré à la société civile de construction vente La Thébaïde un permis de construire valant division pour la construction de trois maisons individuelles et la rénovation d'une villa sur un terrain situé avenue de la Thébaïde. Par un jugement n° 2202368 du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande et n'a pas admis l'intervention de l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys.

Par une ordonnance n° 24MA00373 du 23 février 2024, enregistrée le 29 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 19 février 2024 au greffe de cette cour, présenté par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys et par l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys.

Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 15 mai 2024, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys et l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

- le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ;

- le décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Buge, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys et autre ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juin 2022 par lequel le maire de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la société La Thébaïde un permis de construire valant division pour la construction de trois maisons individuelles et la rénovation d'une villa sur un terrain situé avenue de la Thébaïde. Par un jugement du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande comme irrecevable après avoir relevé d'office le moyen tiré du défaut d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys au syndic et a par voie de conséquence refusé d'admettre, comme également irrecevable, l'intervention au soutien de cette demande de l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys. Ces deux associations se pourvoient en cassation contre ce jugement.

2. En vertu du premier alinéa de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, " le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble ". Le I de l'article 18 de la même loi dispose que : " Indépendamment des pouvoirs qui lui sont conférés par d'autres dispositions de la présente loi ou par une délibération spéciale de l'assemblée générale, le syndic est chargé, dans les conditions qui seront éventuellement définies par le décret prévu à l'article 47 ci-dessous : (...) - de représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice dans les cas mentionnés aux articles 15 et 16 de la présente loi (...) ". Aux termes des deux premiers alinéas de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans sa rédaction résultant du décret du 27 juin 2019 portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l'accès des huissiers de justice aux parties communes d'immeubles : " Le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale. / Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice. "

3. Il résulte de ces dispositions que, dans les cas où une autorisation est requise, le syndic, agissant au nom de la copropriété, est tenu de disposer d'une autorisation formelle de l'assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice en son nom, habilitation qui doit préciser l'objet et la finalité du contentieux engagé. Le pouvoir ainsi donné au syndic est compris dans les limites qui ont, le cas échéant, été fixées par la décision de l'assemblée générale. Le moyen tiré du défaut d'autorisation du syndic à agir en justice ne peut toutefois être soulevé que par un ou plusieurs copropriétaires.

4. Il résulte de ce qui précède qu'en soulevant d'office le moyen tiré de l'absence d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys au syndic pour agir en justice, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Par suite, les requérants sont fondés, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, à demander pour ce motif l'annulation du jugement qu'ils attaquent.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens une somme de 1 500 euros à verser respectivement au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys et à l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 26 décembre 2023 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Toulon.

Article 3 : La commune de Roquebrune-sur-Argens versera au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys et à l'association des 14 riverains de la servitude de la résidence Les Jardins d'Ys une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins d'Ys, premier dénommé, pour les deux requérants, à la commune de Roquebrune-sur-Argens et à la société civile de construction vente La Thébaïde.

Délibéré à l'issue de la séance du 26 mars 2025 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Édouard Geffray, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, M. Raphaël Chambon, M. Vincent Mazauric, conseillers d'Etat ; M. Eric Buge, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 9 avril 2025.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Eric Buge

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 492236
Date de la décision : 09/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

LOGEMENT - SYNDIC DE COPROPRIÉTÉ – MOYEN TIRÉ DU DÉFAUT D’AUTORISATION À AGIR EN JUSTICE AU NOM DE LA COPROPRIÉTÉ [RJ1] – MOYEN NE POUVANT ÊTRE SOULEVÉ QUE PAR UN OU PLUSIEURS COPROPRIÉTAIRES.

38-09 Il résulte du premier alinéa de l’article 15 et du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ainsi que du premier alinéa de l’article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 que, dans les cas où une autorisation est requise, le syndic, agissant au nom de la copropriété, est tenu de disposer d’une autorisation formelle de l’assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice en son nom, habilitation qui doit préciser l’objet et la finalité du contentieux engagé. Le pouvoir ainsi donné au syndic est compris dans les limites qui ont, le cas échéant, été fixées par la décision de l’assemblée générale....Le moyen tiré du défaut d’autorisation du syndic à agir en justice ne peut toutefois être soulevé que par un ou plusieurs copropriétaires, ainsi qu’il résulte du deuxième alinéa de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019.

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - QUALITÉ POUR AGIR - REPRÉSENTATION DES PERSONNES MORALES - SYNDIC DE COPROPRIÉTÉ – MOYEN TIRÉ DU DÉFAUT D’AUTORISATION À AGIR EN JUSTICE AU NOM DE LA COPROPRIÉTÉ [RJ1] – MOYEN NE POUVANT ÊTRE SOULEVÉ QUE PAR UN OU PLUSIEURS COPROPRIÉTAIRES.

54-01-05-005 Il résulte du premier alinéa de l’article 15 et du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ainsi que du premier alinéa de l’article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 que, dans les cas où une autorisation est requise, le syndic, agissant au nom de la copropriété, est tenu de disposer d’une autorisation formelle de l’assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice en son nom, habilitation qui doit préciser l’objet et la finalité du contentieux engagé. Le pouvoir ainsi donné au syndic est compris dans les limites qui ont, le cas échéant, été fixées par la décision de l’assemblée générale....Le moyen tiré du défaut d’autorisation du syndic à agir en justice ne peut toutefois être soulevé que par un ou plusieurs copropriétaires, ainsi qu’il résulte du deuxième alinéa de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 avr. 2025, n° 492236
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eric Buge
Rapporteur public ?: M. Thomas Janicot
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:492236.20250409
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