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19/12/2024 | FRANCE | N°474777

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 19 décembre 2024, 474777


Vu la procédure suivante :



La Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007 à raison de la remise en cause partielle de la déduction d'une provision pour risques croissants de contrats couvrant le risque " dépendance ", ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1910522 du

14 octobre 2021, ce tribunal a prononcé la décharge des impositions contesté...

Vu la procédure suivante :

La Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007 à raison de la remise en cause partielle de la déduction d'une provision pour risques croissants de contrats couvrant le risque " dépendance ", ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1910522 du 14 octobre 2021, ce tribunal a prononcé la décharge des impositions contestées à concurrence d'un montant de 455 225 euros et rejeté le surplus de ses demandes.

Par un arrêt n° 22PA00603 du 5 avril 2023, la cour administrative d'appel de Paris, statuant sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, a annulé les articles 1er et 2 de ce jugement et remis à la charge de la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire les impositions supplémentaires dont ce tribunal avait prononcé la décharge.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 juin 2023, 5 septembre 2023 et 18 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des assurances ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 novembre 2024, présentée par la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire, qui exerce notamment des activités d'assurance autre que sur la vie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au terme de laquelle l'administration a partiellement remis en cause, pour la détermination de son résultat imposable au titre de l'exercice clos en 2007, le taux d'actualisation qu'elle avait retenu pour le calcul de la provision pour risques croissants attachée à des contrats couvrant le risque de dépendance. La Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 avril 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, statuant sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et après avoir annulé les articles 1er et 2 du jugement du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ayant prononcé la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie en conséquence de cette réintégration, les a remises à sa charge.

2. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire a constitué, au titre de son exercice clos en 2007, une provision dite " pour risques croissants ", ayant pour objet de tirer les conséquences de ce que le montant des primes dues chaque année par les assurés couverts par les contrats dénommés " assurance dépendance " et " assurance autonomie " qu'elle propose est déterminé au moment de la souscription de ces contrats sans être ensuite révisé chaque année autrement qu'en fonction de l'évolution du point AGIRC, tandis que le coût, pour l'assureur, du risque couvert augmente avec l'âge des assurés au fur et à mesure de la reconduction annuelle de ces contrats.

4. En se fondant, pour apprécier le caractère déductible de son résultat fiscal des provisions ainsi constituées par la caisse, sur ce que ces provisions correspondaient aux engagements nets supplémentaires, par rapport à ceux initialement estimés compte tenu de la valeur actuelle des produits financiers futurs, auxquels elle s'exposait à l'avenir au titre des contrats " dépendance " déjà signés, et sur ce que ces provisions avaient ainsi pour seul objet de couvrir le risque résultant d'une rentabilité réduite des contrats en cours alors que l'objet de ces provisions était, ainsi qu'il résulte de ce qui est dit au point 3, de lisser le résultat de l'assureur sur la durée de vie du contrat et non de faire face à un éventuel surcroît d'engagements par rapport à ceux estimés lors de la signature du contrat, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, que la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 5 avril 2023 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Caisse de réassurance mutuelle agricole Groupama Paris Val-de-Loire et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 novembre 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 19 décembre 2024.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Marc Vié

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 474777
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2024, n° 474777
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474777.20241219
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