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13/12/2024 | FRANCE | N°493669

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 13 décembre 2024, 493669


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 avril et 11 septembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 février 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, l'a suspendu du droit d'exercer la médecine pour une durée de douze mois et a subordonné la reprise de son activité aux résultats d'une nouvelle expertise réalisée par un collège d'experts dans

les conditions fixées à l'article R. 4124-3-4 du code de la santé publique.

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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 avril et 11 septembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 février 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, l'a suspendu du droit d'exercer la médecine pour une durée de douze mois et a subordonné la reprise de son activité aux résultats d'une nouvelle expertise réalisée par un collège d'experts dans les conditions fixées à l'article R. 4124-3-4 du code de la santé publique.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugo Bevort, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique : " I. - Dans le cas d'infirmité ou d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé soit par une délibération du conseil départemental ou du Conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours. / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional par trois médecins désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. (...) / IV.- Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l'expertise. Le rapport d'expertise est déposé au plus tard dans le délai de six semaines à compter de la saisine du conseil. / (...) / VI. - Si le conseil régional ou interrégional n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier en date du 31 juillet 2023, un collectif de professionnels de santé de la commune de Dompierre-sur-Besbre (Allier) a signalé au conseil départemental de l'Allier de l'ordre des médecins des problèmes liés à l'activité de M. B..., médecin spécialiste qualifié en médecine générale, installé depuis 2018 dans la maison de santé de cette commune. Sur le fondement des dispositions de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique citées au point précédent, le conseil départemental de l'Allier de l'ordre des médecins a saisi, par une délibération du 6 octobre 2023, le conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes de l'ordre des médecins aux fins de faire diligenter une expertise à l'égard de M. B.... Le 16 janvier 2024, les experts ont déposé leur rapport. Par une décision du 21 février 2024, prise en application des dispositions du VI de ce même article, sur renvoi du conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a suspendu M. B... du droit d'exercer la médecine pour une durée de douze mois et a subordonné la reprise de son activité professionnelle aux résultats d'une nouvelle expertise. M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision.

3. En premier lieu, pour estimer que l'état de M. B... rendait dangereux l'exercice de sa profession, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, après avoir rappelé que le rapport d'expertise déposé le 16 janvier 2024 concluait au constat d'une vulnérabilité dans le parcours personnel et professionnel de l'intéressé et à une évolution chronique des troubles liés à l'usage de substances psychoactives le rendant inapte à l'exercice de la médecine, a apprécié les conséquences ainsi tirées par les experts, qui ne la liaient pas, en les rapportant aux observations de l'intéressé, sans prendre en considération le signalement visant celui-ci adressé au conseil départemental de l'Allier de l'ordre des médecins.

4. En second lieu, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins a mentionné les déclarations de M. B... sur sa dépendance et son état actuel selon lesquelles il avait arrêté dès 2018 la consommation d'alcool et depuis plusieurs mois celle de produits psychotropes. Elle a toutefois retenu que ces éléments n'étaient pas de nature à permettre de remettre en cause les constats des experts relatifs aux troubles dont il est atteint. Dans ces conditions, la formation restreinte, qui a par ailleurs suffisamment motivé sa décision, n'a pas fait, au regard de l'ensemble des éléments d'information dont elle disposait, une application inexacte des dispositions citées au point 1 de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique en retenant que M. B... présentait, à la date de sa décision, un état de santé rendant dangereux l'exercice de la médecine et justifiant une mesure de suspension d'une durée de douze mois et en subordonnant la reprise d'activité aux résultats d'une nouvelle expertise réalisée par un collège d'experts dans les conditions fixées à l'article R. 4124-3-4 du code de la santé publique.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de M. B... la somme que demande le Conseil national de l'ordre des médecins au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au Conseil national de l'ordre des médecins.

Copie en sera adressée au conseil départemental de l'Allier de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 493669
Date de la décision : 13/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 déc. 2024, n° 493669
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hugo Bevort
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:493669.20241213
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