Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 9 octobre 2023 et les 9 janvier et 19 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2023 fixant pour l'année 2022 les dotations régionales mentionnées à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, les dotations régionales de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les dotations urgences, les dotations provisionnelles prévues par le décret du 29 septembre 2021 ainsi que le montant des transferts prévus à l'article L. 174-1-2 du même code, ainsi que le rejet de ses recours gracieux ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de la Fédération de l'hospitalisation privée ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 novembre 2024, présentée par la Fédération de l'hospitalisation privée ;
Considérant ce qui suit :
1. En vertu du I de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, chaque année, est défini un objectif de dépenses d'assurance maladie, constitué du montant total des charges supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie, afférent aux différentes activités des établissements qu'il énumère. Le I de l'article L. 174-1 prévoit que le montant de cet objectif " est constitué en dotations régionales. (...) Le montant des dotations régionales est fixé par l'Etat en tenant compte de l'activité des établissements, des orientations du projet régional ou Interrégional de santé et des priorités nationales ou locales en matière de politique sanitaire. " Le premier alinéa de l'article L. 174-1-2 du même code prévoit par ailleurs que : " Une part du montant de la dotation régionale mentionnée à l'article L. 174-1 peut être transférée, par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé, au fonds d'intervention régional mentionné à l'article L. 1435-8 du code de la santé publique. De la même manière, une part du montant du fonds d'intervention régional dont la gestion est déléguée à l'agence régionale de santé peut être transférée vers la dotation régionale mentionnée à l'article L. 174-1. (...) " La Fédération de l'hospitalisation privée demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 31 mars 2023 fixant pour l'année 2022 les dotations régionales mentionnées à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, les dotations régionales de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les dotations urgences, les dotations provisionnelles prévues par le décret du 29 septembre 2021 ainsi que le montant des transferts prévus à l'article L. 174-1-2 du même code.
2. Aux termes de l'article L. 162-21-3 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Il est créé, auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, un comité économique de l'hospitalisation publique et privée. / Le comité est chargé du suivi des dépenses d'assurance maladie relatives aux frais d'hospitalisation et de la situation financière des établissements de santé publics et privés. Il se fonde notamment sur l'analyse des données d'activité de soins et des dépenses engendrées par ces activités. Au sein du comité, un protocole visant notamment à établir, pour des périodes ne pouvant excéder trois années civiles, les trajectoires relatives au montant des ressources pluriannuelles des établissements de santé publics et privés et les engagements réciproques afférents peut être signé entre l'Etat et les représentants des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé publics et privés. Le comité est également chargé du suivi et de l'application de ce protocole. / (...) Le Gouvernement consulte le comité préalablement à la mise en œuvre de la procédure prévue au II bis de l'article L. 162-22-10. (...) ", c'est-à-dire lorsqu'il envisage, compte tenu d'un risque sérieux de dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie imputable en tout ou partie à l'évolution de l'objectif des dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, de chirurgie, de gynécologie-obstétrique et d'odontologie exercées par les activités des établissements de santé, de modifier les tarifs des prestations d'hospitalisation donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale.
3. En premier lieu, si l'article L. 162-21-3 du code de la sécurité sociale prévoit que le comité économique de l'hospitalisation publique et privée est chargé du suivi des dépenses d'assurance maladie relatives aux frais d'hospitalisation et de la situation financière des établissements de santé publics et privés et, à ce titre, le cas échéant, du suivi de l'application du protocole qui peut être signé entre l'Etat et les représentants des organisations nationales les plus représentatives de ces établissements visant notamment à établir les trajectoires relatives au montant des ressources pluriannuelles de ces établissements, la mise en œuvre de cette mission de suivi n'impose cependant pas sa consultation sur les projets de textes relatifs aux ressources des établissements de santé. Dès lors que cette consultation n'est pas prévue par les articles R. 162-32-2, R. 162-33-18, R. 162-33-25, R. 162-33-26 et R. 162-34-12 du même code, sur la base desquels a été pris l'arrêté attaqué et dont la fédération requérante n'est pas fondée à soutenir qu'ils auraient dû la prévoir en application de l'article L. 162-21-3 du code de la sécurité sociale, ce que cet article n'implique nullement, la fédération requérante ne peut pas utilement soutenir que l'absence de consultation du comité économique de l'hospitalisation publique et privée entacherait l'arrêté attaqué d'illégalité.
4. En second lieu, l'arrêté attaqué se borne à fixer le montant des dotations régionales prévues à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale ainsi que d'autres dotations de financement des établissements, réparties par région, et n'opère, par lui-même, aucune différence de traitement entre les différentes catégories d'établissements de santé. Par suite, la fédération requérante ne peut utilement soutenir, ni qu'il méconnaîtrait pour ce motif le principe d'égalité entre établissements de santé ou serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, ni qu'il méconnaîtrait le protocole d'accord du 6 février 2020 sur l'évolution des ressources des établissements de santé pour 2020 à 2022 conclu entre l'Etat et les fédérations d'établissements de santé ou le communiqué de presse publié le même jour sur le site du ministère de la santé qui y fait référence.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la Fédération de l'hospitalisation privée doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la Fédération de l'hospitalisation privée est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération de l'hospitalisation privée, à la ministre de la santé et de l'accès aux soins et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.