Vu la procédure suivante :
M. C... B... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'assurer l'exécution de son jugement n° 2020513 du 30 juin 2021, en enjoignant à la société " Résidence le logement des fonctionnaires " (RLF) de leur attribuer un logement sous astreinte de 70 euros par jour de retard et de leur verser 40 000 euros si un logement ne leur était pas attribué dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement. Par un jugement n° 2020513 du 31 janvier 2023, la magistrate désignée par le président de ce tribunal administratif a rejeté leur requête.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 3 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de la société " Résidence le logement des fonctionnaires " la somme de 3 000 euros à verser à leur avocat, la SARL Matuchansky, Poupot Valdelièvre, Rameix, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de M. et Mme B... et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société " Résidence le logement des fonctionnaires " ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 30 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir la décision du 1er décembre 2020 par laquelle la commission d'attribution des logements de la société " Résidence le logement des fonctionnaires " (RLF) avait refusé d'attribuer à M. et Mme B... un logement situé au 15 boulevard de Bercy à Paris (75012) et a enjoint à cette société de procéder au réexamen de la situation des requérants dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement pour leur attribuer un logement à l'adresse demandée ou un logement équivalent. Par une requête enregistrée le 29 septembre 2021, M. et Mme B... ont demandé au même tribunal administratif de prescrire, en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, les mesures propres à assurer l'exécution de ce jugement. Ils se pourvoient en cassation contre le jugement du 31 janvier 2023 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif qu'une proposition de logement avait été faite aux requérants par la société RLF le 16 août 2022, postérieurement à l'introduction de leur demande, que le jugement attaqué a regardé comme équivalente au logement dont l'attribution leur avait été refusée par la décision annulée aux termes du jugement dont l'exécution était demandée. En l'état de cette constatation souveraine, il appartenait au tribunal administratif de déclarer qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande d'exécution dont il était saisi. En rejetant cette demande, il a, par suite, commis une erreur de droit. M. et Mme B... sont, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur pourvoi, fondés à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement qu'ils attaquent.
3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
4. Il résulte de l'instruction que par un courrier en date du 16 août 2022, la société RLF a proposé aux requérants un logement F2 d'une surface de 49,06 m² situé à Créteil, pour un loyer de 644,95 euros par mois, supérieur de près de 30 % à celui du logement d'une surface de 45 m² situé dans le 12ème arrondissement de Paris qui leur avait été initialement proposé. Ce logement n'était manifestement pas équivalent au premier, eu égard à la différence de loyer et à la situation économique des requérants. Ces derniers, sont, par suite, fondés à soutenir que la société RLF n'a pas complètement exécuté le jugement du tribunal administratif de Paris du 30 juin 2021. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à cette société de proposer à M. et Mme B... un logement répondant aux caractéristiques énoncées dans ce jugement dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
5. Les requérants ne justifient pas en quoi le retard mis à exécuter le jugement du tribunal administratif de Paris du 30 juin 2021 leur aurait causé un préjudice justifiant l'allocation d'une indemnité de 40 000 euros. Les conclusions présentées à ce titre ne peuvent, par suite, et en tout état de cause, qu'être rejetées.
6. M. et Mme B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, leur avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société RLF le versement à la SCP Matuchansky, Poupot Valdelièvre, Rameix, avocat de M. et Mme B..., de la somme de 3 000 euros au titre de ces dispositions, sous réserve que cette société renonce à percevoir les sommes correspondant à la part contributive de l'Etat.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 31 janvier 2023 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la société RLF d'exécuter le jugement du 30 juin 2021 du tribunal administratif de Paris dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision en proposant à M. et Mme B... un logement répondant aux caractéristiques énoncées dans ce jugement.
Article 3 : La société RLF versera à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. et Mme B..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Paris est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. C... B..., premier requérant dénommé et à la société " Résidence le logement des fonctionnaires ".
Délibéré à l'issue de la séance du 7 novembre 2024 où siégeaient : Mme Laurence Helmlinger, assesseure, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 26 novembre 2024.
La présidente :
Signé : Mme Laurence Helmlinger
La rapporteure :
Signé : Mme Sara-Lou Gerber
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Pilet