Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 21 novembre 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.
Par une décision n° 23005076 du 9 mai 2023, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 4 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros à verser au cabinet Rousseau, Tapie, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hadrien Tissandier, auditeur,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. A... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des refugies et apatrides ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que, par une décision du 21 novembre 2022, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a refusé de faire droit à la demande de M. B... A..., de nationalité soudanaise, tendant à ce que lui soit reconnu le statut de réfugié ou, à défaut, accordé le bénéfice de la protection subsidiaire. M. A... se pourvoit en cassation contre la décision du 9 mai 2023 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mais pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'elle courrait dans son pays un risque réel de subir l'une des atteintes graves suivantes (...) ; 3° S'agissant d'un civil, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ". Aux termes de l'article L. 532-2 du même code : " Saisie d'un recours contre une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Cour nationale du droit d'asile statue, en qualité de juge de plein contentieux, sur le droit du requérant à une protection au titre de l'asile au vu des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle se prononce ".
3. Pour analyser la situation sécuritaire au Darfour occidental dont M. A... est originaire et juger qu'à la date de sa décision, celle-ci ne se caractérisait pas par un niveau de violence susceptible de s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle de nature à permettre de bénéficier de l'application des dispositions du 3° de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la Cour nationale du droit d'asile s'est fondée sur des rapports et documents dont les plus récents dataient de septembre 2022. En procédant ainsi, alors que la situation au Soudan s'était notablement aggravée au printemps 2023 en raison en particulier d'un nouveau conflit armé débuté en avril entre l'armée soudanaise et les forces de soutien rapides (FSR) s'étendant à de nombreuses régions du pays, dont le Darfour occidental, elle a commis une erreur de droit. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.
4. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'OFPRA une somme de 3 000 euros à verser à cette société.
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 9 mai 2023 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : L'OFPRA versera la somme de 3 000 euros au cabinet Rousseau, Tapie au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et à l'Office français de protection des refugies et apatrides.
Délibéré à l'issue de la séance du 10 octobre 2024 où siégeaient : Mme Anne Courrèges, conseillère d'Etat, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Hadrien Tissandier, auditeur-rapporteur.
Rendu le 25 octobre 2024.
La présidente :
Signé : Mme Anne Courrèges
Le rapporteur :
Signé : M. Hadrien Tissandier
Le secrétaire :
Signé : M. Guillaume Auge