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10/10/2024 | FRANCE | N°490856

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 10 octobre 2024, 490856


Vu la procédure suivante :



Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 janvier, 10 avril et 12 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Ile-de-France Mobilités demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, du 15 juin 2023 modifiant l'arrêté du 9 juillet 2012 portant application de l'article

13-1 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferré national, e...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 janvier, 10 avril et 12 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Ile-de-France Mobilités demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, du 15 juin 2023 modifiant l'arrêté du 9 juillet 2012 portant application de l'article 13-1 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferré national, et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des transports ;

- le décret n°2003-194 du 7 mars 2003 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 septembre 2024, présentée par Ile-de-France Mobilités ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 15 juin 2023, le ministre chargé des transports a modifié la définition des " usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs " donnée à l'article 1er de l'arrêté du 9 juillet 2012, lequel fixe les modalités d'évaluation et les seuils de la fréquentation des gares de voyageurs pour l'application de l'article 13-1 du décret du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferré national. Ile-de-France Mobilités demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

2. Aux termes de l'article 13-1 du décret du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferroviaire : " I.- Pour la détermination des redevances relatives aux biens et services en gare gérés par le gestionnaire des gares de voyageurs, les gares de voyageurs sont réparties en trois catégories : / a) Les gares de voyageurs d'intérêt national sont celles dont la fréquentation par des usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs est au moins égale à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé des transports. (...) ; / b) Les gares de voyageurs d'intérêt régional sont celles dont la fréquentation par des usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs est inférieure au seuil défini au a et dont la fréquentation est au moins égale à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé des transports. (...) ; / c) Les gares de voyageurs d'intérêt local sont les autres gares de voyageurs. (...) / Le gestionnaire des gares de voyageurs établit une liste des gares relevant de chaque catégorie compte tenu de leur fréquentation moyenne annuelle évaluée lors des deux dernières années civiles. Cette liste est valable trois ans. (...) Les modalités d'évaluation de la fréquentation sont déterminées par arrêté du ministre chargé des transports. / (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté attaqué : " Au sens du présent arrêté, on entend par : / Usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs : les usagers des services ferroviaires mentionnés aux articles L. 2121-1 et L. 2121-12 du code des transports ainsi que les usagers des services ferroviaires mentionnés aux articles L. 1241-1 et L. 2121-3 du même code lorsque le point d'origine et la destination du trajet sont situés dans le ressort territorial de régions distinctes et distants de plus de cent kilomètres. / (...) ".

4. En premier lieu, en faisant évoluer la définition des " usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs " donnée à l'article 1er de l'arrêté du 9 juillet 2012, le ministre chargé des transports s'est borné à modifier, pour l'application du I de l'article 13-1 du décret du 7 mars 2003, les modalités d'évaluation de la fréquentation des gares de voyageurs afin que le gestionnaire de ces gares les répartisse dans les trois catégories prévues par ces dispositions, pour la détermination des redevances dues au titre de l'utilisation des biens et services en gare. Contrairement à ce qui est soutenu, le ministre chargé des transports a, ce faisant, exercé la compétence qu'il tient des dispositions du I de l'article 13-1 du décret du 7 mars 2003. Le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'incompétence doit, dès lors, être écarté.

5. En deuxième lieu, les articles L. 2121-1 et L. 2121-3 du code des transports prévoient la compétence de l'Etat et de la région pour l'organisation, respectivement, des services de transport ferroviaire de voyageurs d'intérêt national et d'intérêt régional, l'article L. 1241-1 précisant que, dans la région d'Ile-de-France, l'autorité compétente est l'établissement public dénommé "Ile-de-France Mobilités". Pour sa part, la définition contestée des " usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs " n'est utilisée que dans le but de classer les gares de voyageurs dans les trois catégories prévues au I de l'article 13-1 du décret du 7 mars 2003, pour la détermination des redevances dues au gestionnaire de gares de voyageurs en fonction de leur fréquentation. Par suite, l'inclusion, dans cette définition, des usagers des services ferroviaires d'intérêt régional au sens de l'article L. 2121-3 lorsque le point d'origine et la destination du trajet sont situés dans le ressort territorial de régions distinctes et distants de plus de cent kilomètres ne peut être utilement contestée au regard de la distinction entre les services de transport ferroviaire de voyageurs d'intérêt national et ceux d'intérêt régional résultant des articles L. 2121-1, L. 2121 3 et L. 1241-1 du code des transports, qui n'ont pas le même objet.

6. En troisième lieu, les circonstances que l'arrêté litigieux aurait pour objet et pour effet d'éviter le déclassement de gares de catégorie A, notamment la gare Saint-Lazare à Paris, qu'il n'aurait pas tenu compte des données de fréquentation des gares pour l'année 2022, lesquelles n'étaient au demeurant pas disponibles à la date de son édiction, et que le seuil de 100 kilomètres qu'il retient n'est dicté par aucun texte ou principe ne sont pas de nature à l'entacher d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En quatrième lieu, pour soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait le principe de sécurité juridique faute de prévoir des mesures transitoires, Ile-de-France Mobilités se borne à faire valoir que de telles mesures auraient permis d'apprécier l'évolution du trafic dans les gares considérées au-delà des seules années 2020 et 2021, non représentatives, ainsi que d'éventuelles difficultés pour l'établissement de son budget, sans préciser en quoi l'arrêté attaqué porterait une atteinte excessive à ses intérêts. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'Ile-de-France Mobilités doit être rejetée ainsi que ses conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête d'Ile-de-France Mobilités est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Ile-de-France Mobilités et à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 septembre 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseillers d'Etat et Mme Amélie Fort-Besnard, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 10 octobre 2024.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

La rapporteure :

Signé : Mme Amélie Fort-Besnard

La secrétaire :

Signé : Mme Eliane Evrard


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 490856
Date de la décision : 10/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 oct. 2024, n° 490856
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Amélie Fort-Besnard
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti
Avocat(s) : SAS HANNOTIN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:490856.20241010
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