Vu la procédure suivante :
Par une ordonnance n° 2212814 du 29 février 2024, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente du tribunal administratif de Montreuil a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par M. A... B....
Par cette requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 9 août 2022, 16 octobre 2022 et 28 août 2023 au greffe du tribunal administratif de Montreuil, et par quatre nouveaux mémoires, enregistrés les 27 et 30 mai, 29 août et 6 septembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la Fédération française de boxe rejetant sa demande tendant à l'abrogation du troisième alinéa de l'article 18 de ses règlements généraux ;
2°) d'enjoindre à la Fédération française de boxe d'abroger le troisième alinéa de l'article 18 de ses règlements généraux, dans un délai de 24 heures à compter de la date de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de la Fédération française de boxe la somme de b4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- le code du sport ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hadrien Tissandier, auditeur,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de la fédération française de boxe ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 septembre 2024, présentée par M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a demandé le 18 avril 2022 à la Fédération française de boxe l'abrogation du troisième alinéa de l'article 18 des règlements généraux, aux termes duquel : " Dans l'hypothèse où le postulant est membre de plusieurs associations sportives affiliées, il ne peut se licencier à la FFBoxe que par l'intermédiaire de l'une d'elle. Toute demande de licence déposée auprès d'une association affiliée alors que le postulant est déjà licencié dans une autre association affiliée doit par conséquent être rejetée ". Une décision de rejet est née du silence gardé sur cette demande dont M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir.
Sur la compétence du juge administratif :
2. D'une part, aux termes des articles L. 131-1 et L. 131-2 du code du sport, les fédérations sportives ont pour objet l'organisation de la pratique d'une ou de plusieurs disciplines et sont constituées sous forme d'associations. L'article L. 131-8 du même code dispose que : " I. - Un agrément peut être délivré par le ministre chargé des sports, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article L. 131-15 du même code : " Les fédérations délégataires : / 1° Organisent les compétitions sportives à l'issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 131-16 du même code : " Les fédérations délégataires édictent : / 1° Les règles techniques propres à leur discipline ainsi que les règles ayant pour objet de contrôler leur application et de sanctionner leur non-respect par les acteurs des compétitions sportives ; / 2° Les règlements relatifs à l'organisation de toute manifestation ouverte à leurs licenciés ; (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 131-6 du code du sport : " La licence sportive est délivrée par une fédération sportive ou en son nom. Elle ouvre droit à participer aux activités que la fédération et ses structures affiliées organisent et, selon des modalités fixées par ses statuts, à son fonctionnement. (...) / Les statuts des fédérations sportives peuvent prévoir que les membres adhérents des associations affiliées doivent être titulaires d'une licence sportive ".
4. Les conclusions de M. B... tendent à l'annulation de la décision implicite rejetant sa demande d'abrogation des dispositions des règlements généraux de la Fédération française de boxe interdisant à une personne ayant adhéré à plusieurs associations sportives affiliées à la Fédération de se voir délivrer une licence par l'intermédiaire de plus de l'une d'entre elles. Ces dispositions, qui ont trait aux conditions de délivrance de la licence nécessaire à la participation aux activités et compétitions organisées par la Fédération française de boxe et ses structures affiliées, se rattachent à l'exercice des prérogatives de puissance publique que la Fédération tient de la délégation ministérielle qui lui a été octroyée. Il s'ensuit que la Fédération n'est pas fondée à soutenir que le juge administratif ne serait pas compétent pour en connaître.
Sur la légalité des dispositions dont l'abrogation est demandée :
5. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions du troisième alinéa de l'article 18 des règlements généraux de la Fédération française de boxe, en interdisant aux membres d'associations sportives affiliées à la Fédération française de boxe de se voir délivrer plus d'une licence, ne sauraient être regardées comme instituant une sanction administrative ni, d'ailleurs, une mesure prise en considération de la personne. Par suite, les moyens tirés de ce que ces dispositions contestées auraient institué une sanction automatique en méconnaissance des droits de la défense et des principes de nécessité, d'individualisation et de proportionnalité des peines, protégés par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen les droits de la défense, ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.
6. En deuxième lieu, en prévoyant qu'une personne ne peut être licenciée qu'auprès d'une seule association sportive affiliée, les dispositions litigieuses ne portent pas, compte tenu de l'intérêt général qui s'attache à la régularité et à la sincérité des compétitions sportives ainsi qu'au bon fonctionnement de la vie démocratique de la Fédération et de la circonstance qu'elles ne font pas obstacle à la possibilité pour toute personne d'adhérer à plusieurs associations sportives ni de pratiquer la boxe et de participer aux activités de la Fédération, une atteinte excessive au principe de libre accès aux activités sportives ni, en tout état de cause, à la liberté d'association.
7. En troisième lieu, le requérant ne peut utilement invoquer les stipulations des statuts de la Fédération française de boxe sur les règles de procédure et de forme encadrant les refus de délivrance de licences à l'encontre de dispositions des règlements généraux régissant les conditions de cette délivrance.
8. Il résulte de tout qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par la Fédération française de boxe, que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite qu'il attaque. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la Fédération française de boxe qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros à verser à la Fédération française de boxe au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera la somme de 3 000 euros à la Fédération française de boxe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à la Fédération française de boxe.
Copie en sera adressée au ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 septembre 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseillers d'Etat et M. Hadrien Tissandier, auditeur-rapporteur.
Rendu le 1er octobre 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Hadrien Tissandier
La secrétaire :
Signé : Mme Eliane Evrard