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15/07/2024 | FRANCE | N°490696

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 15 juillet 2024, 490696


Vu les procédures suivantes :



Par une requête enregistrée le 5 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler la décision n° CS-2023-37 du 22 novembre 2023 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) lui a interdit, pendant une durée de quatre ans, de participer à une compétition sportive et à toute activité autorisée ou organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle, une organisati

on signataire du code mondial antidopage ou l'un de leurs membres et a demandé à la fédé...

Vu les procédures suivantes :

Par une requête enregistrée le 5 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° CS-2023-37 du 22 novembre 2023 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) lui a interdit, pendant une durée de quatre ans, de participer à une compétition sportive et à toute activité autorisée ou organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle, une organisation signataire du code mondial antidopage ou l'un de leurs membres et a demandé à la fédération française de boxe d'annuler les résultats individuels qu'il avait obtenus lors de la manifestation sportive du 28 janvier 2023, ainsi qu'entre le 28 janvier 2023 et la notification de la décision ;

2°) de mettre à la charge de l'AFLD la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code du sport ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi, Texier, avocat de M. A... et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 juin 2024, produite par M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que M. A..., sportif amateur, a fait l'objet d'un contrôle antidopage, le 28 janvier 2023, à Rennes (Ille-et-Vilaine) lors de sa participation à un gala de boxe anglaise organisé par le " Cercle Paul Bert ". Par une décision du 22 novembre 2023 et au motif qu'il s'était délibérément soustrait à un contrôle anti-dopage, la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) a prononcé à son encontre une sanction comportant notamment l'interdiction, pendant une durée de quatre ans, de participer à une manifestation sportive et à diverses activités sportives et l'annulation des résultats individuels obtenus depuis le 28 janvier 2023. M. A... demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision du 22 novembre 2023.

En ce qui concerne la régularité des opérations de contrôle :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 232-9-2 du code du sport : " A l'occasion des opérations de contrôle prévues aux articles L. 232-12 à L. 232-16, il est interdit : (...) / 3° De ne pas se soumettre, intentionnellement ou par négligence, sans justification valable après s'être vu notifier le contrôle, au prélèvement d'un échantillon ". En vertu des dispositions du premier alinéa de l'article L. 232-11 du même code : " Outre les officiers et agents de police judiciaire agissant dans le cadre des dispositions du code de procédure pénale, sont habilités à procéder aux contrôles diligentés par l'Agence française de lutte contre le dopage ou demandés par les personnes mentionnées à l'article L. 232-13 et à rechercher et constater les infractions aux dispositions prévues aux articles L. 232-9 et L. 232-10 les agents relevant du ministre chargé des sports et les personnes agréées par l'agence et assermentés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Le huitième alinéa de l'article L. 232-19 de ce code dispose que : " Les personnes mentionnées à l'article L. 232-11 constatent les infractions mentionnées au présent chapitre par des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve contraire ".

3. D'autre part, aux termes de L. 232-11 du même code : " Sont habilitées à procéder aux contrôles diligentés par l'Agence française de lutte contre le dopage (...) les personnes agréées par l'Agence et assermentées (...) ". Pour l'application de ces dispositions, l'article R. 232-56 du même code précise que : " Le délégué antidopage désigne les escortes mises à la disposition de la personne chargée du contrôle. Il peut exercer lui-même cette fonction. (...) / En l'absence d'escortes mises à sa disposition et formées à cet effet, la personne chargée du contrôle peut décider soit de procéder au contrôle, soit de l'annuler lorsqu'elle estime qu'il ne peut être réalisé dans de bonnes conditions. (...) / Les escortes peuvent également être désignées par la personne chargée du contrôle, (...) ". Il résulte de ces dispositions que la personne chargée du contrôle et régulièrement habilitée peut désigner une escorte et, même en cas d'absence d'une telle escorte, décider de procéder à l'opération de contrôle.

4. Il résulte de l'instruction que la directrice des contrôles de l'AFLD a délivré à un agent de l'Agence habilité à procéder à des contrôles antidopage un ordre de mission régulier, en vue de prélèvements urinaires sur six participants, dont M. A..., au gala de boxe anglaise organisé le 28 janvier 2023 par le " Cercle Paul Bert " de Rennes. Le procès-verbal et le rapport complémentaire établis par cet agent assermenté indiquent que M. A... s'est vu notifier le contrôle à 20 heures 30. Si M. A..., accompagné d'une escorte régulièrement désignée par l'agent en charge du contrôle, a semblé dans un premier temps disposé à se soumettre au contrôle, il a, sans avoir pu produire l'échantillon demandé, quitté le point de contrôle après que l'agent chargé du contrôle l'a informé qu'il devait y revenir plus tard pour une nouvelle tentative et qu'à défaut, il encourrait une sanction. M. A..., qui a indiqué avoir compris ces consignes, est retourné dans la salle des combats sans escorte, faute d'agents en nombre suffisant. A nouveau sollicité par l'agent en charge du contrôle, M. A..., qui se trouvait toujours dans la salle des combats, lui a par la suite indiqué être toujours présent mais ne pas pouvoir uriner. Vers 1 heure 30, ayant terminé les opérations de contrôles avec les autres sportifs, l'agent chargé du contrôle, avant de quitter les lieux, a constaté que M. A... ne s'y trouvait plus.

5. Si M. A... soutient que les opérations de contrôle ont été réalisées dans des conditions irrégulières en ce qu'il ne s'est pas vu notifier le contrôle, il résulte du procès-verbal effectué le 28 janvier 2023 en sa présence et signé par lui, que le contrôle lui a bien été notifié et qu'il a également été informé de ce qu'il pourrait être sanctionné s'il décidait de ne pas s'y soumettre. Il résulte également de l'instruction et en particulier du rapport complémentaire réalisé par l'agent chargé du contrôle que M. A..., qui ne produit aucun élément de nature à remettre en cause les constatations opérées par un agent assermenté, a délibérément refusé de se soumettre au contrôle sans raison valable en quittant les lieux de la manifestation sportive sans avoir produit l'échantillon demandé. Il résulte enfin des dispositions citées au point 3 que M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'absence d'escorte, par ailleurs régulièrement habilitée et désignée, à l'issue de sa première tentative pour produire l'échantillon demandé, au soutien du moyen tiré de ce que l'agent chargé du contrôle n'aurait pas conduit l'opération de contrôle à son terme. Par suite, les moyens tirés de ce que la mesure de sanction prononcée à son encontre, à raison d'un refus de se soumettre au prélèvement d'un échantillon au sens du 3° de l'article L. 232-9-2 du code du sport, aurait été prise après une procédure de contrôle irrégulière et au vu de faits matériellement inexacts doivent être écartés.

En ce qui concerne la sanction :

6. L'article L. 232-23-3-4 du code du sport prévoit que la durée des sanctions, définies à l'article L. 232-23 de ce code et infligées en cas de manquement aux dispositions de l'article L. 232-9-2, est en principe de quatre ans et peut être réduite dans les conditions suivantes : " (...) 1° Dans le cas où il ne s'est pas soumis au prélèvement de l'échantillon, si le sportif est en mesure d'établir que le manquement à l'article L. 232-9-2 n'était pas intentionnel, la période de suspension est ramenée à deux ans ; 2° Dans tous les autres cas, si l'intéressé peut établir l'existence des circonstances exceptionnelles justifiant une réduction de la période de suspension, cette dernière sera au minimum de deux ans et au maximum de quatre ans en fonction du degré de la faute de l'intéressé. / Lorsque le manquement est commis par une personne protégée ou un sportif de niveau récréatif, la sanction est au minimum un avertissement et au maximum une suspension d'une durée de deux ans, en fonction du degré de la faute de l'intéressé ".

7. Eu égard au déroulement des faits tel qu'énoncé au point 4, M. A..., qui participait ce jour-là à une manifestation publique de boxe, ne saurait sérieusement soutenir que le manquement qui lui est reproché n'était pas intentionnel ou qu'il est un sportif de niveau récréatif et, par suite, que la durée des mesures d'interdiction prononcée à son encontre n'aurait donc pas dû excéder deux ans en application de l'article L. 232-23-3-4 du code du sport ou était disproportionnée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros à verser à l'Agence au même titre.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et à l'Agence française de lutte contre le dopage.

Délibéré à l'issue de la séance du 20 juin 2024 où siégeaient : M. Nicolas Boulouis, président de chambre, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 15 juillet 2024.

Le président :

Signé : M. Nicolas Boulouis

Le rapporteur :

Signé : M. Jérôme Goldenberg

La secrétaire :

Signé : Mme Sandrine Mendy


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 490696
Date de la décision : 15/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2024, n° 490696
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jérôme Goldenberg
Rapporteur public ?: Mme Dorothée Pradines
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX ; SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:490696.20240715
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