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12/07/2024 | FRANCE | N°473443

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 12 juillet 2024, 473443


Vu la procédure suivante :



Mme A... B..., agissant en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure, C... B..., a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 avril 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile présentée pour celle-ci, et de lui reconnaître la qualité de réfugiée ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 22030632 du 24 novembre 2022, la Cour nationale du dr

oit d'asile a rejeté sa demande.



Par un pourvoi sommaire et un mém...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B..., agissant en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure, C... B..., a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 avril 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile présentée pour celle-ci, et de lui reconnaître la qualité de réfugiée ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 22030632 du 24 novembre 2022, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 avril et 4 juillet 2023, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, à verser à son avocat, la SCP Nicolaÿ-Lanouvelle au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme B... soutient que la décision de la Cour nationale du droit d'asile est entachée :

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury et Maître, qui s'est substitué à la SCP Nicolauÿ-Lanouvelle, avocat de Mme B... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'office français de protection des refugiés et apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que Mme B... a formulé une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) pour sa fille mineure, C.... Mme B... se pourvoit en cassation contre la décision du 24 novembre 2022 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 juin 2022 de l'OFPRA ayant rejeté cette demande d'asile, et à ce que la qualité de réfugié soit reconnue à sa fille ou, à défaut, à ce que lui soit accordé le bénéfice de la protection subsidiaire.

Sur la régularité de la décision :

2. Lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que, par une note en délibéré du 10 novembre 2022, Mme B... a transmis un certificat médical, établi en Côte d'Ivoire, attestant, comme elle l'avait déjà déclaré à l'OFPRA dès son premier entretien du 26 octobre 2021, que sa fille aînée aurait été excisée. Ce certificat, qui a été établi plus de trois mois avant la clôture de l'instruction par la Cour nationale du droit d'asile, le 29 octobre 2022, ne lui a été transmis que postérieurement à la clôture de l'instruction, une semaine après l'audience publique. Il en résulte que la note en délibéré produite par Mme B..., qui ne contient aucune circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office, ne contient pas non plus l'exposé d'une circonstance de fait que l'intéressée n'était pas en mesure d'invoquer avant la clôture de l'instruction. Par suite, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas commis d'irrégularité en décidant de ne pas rouvrir l'instruction après avoir reçu la note en délibéré produite par Mme B....

Sur le bien-fondé de la décision :

4. Aux termes de l'article 1er, A, 2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ".

5. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mais pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'elle courrait dans son pays un risque réel de subir l'une des atteintes graves suivantes : / 1° La peine de mort ou une exécution ; / 2° La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; / 3° S'agissant d'un civil, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ".

6. En premier lieu, en estimant que les déclarations imprécises de M. et Mme B... sur leur environnement familial en Côte d'Ivoire, notamment sur les circonstances de leur départ et les raisons ayant conduit Mme B... à partir en 2018, plusieurs années après son mari, sans sa fille aînée, au risque de l'exposer à la pratique de l'excision au sein même de sa famille, ainsi que sur les raisons pour lesquelles ils ne seraient pas, en cas de retour, en capacité de protéger leur fille C... contre la pratique de l'excision, ne permettaient pas d'établir l'effectivité du risque d'excision auquel l'enfant C... serait soumise en cas de retour en Côte d'Ivoire, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas dénaturé les pièces du dossier.

7. En second lieu, en relevant que M. et Mme B... avaient mentionné, pour la première fois lors de l'audience devant elle, que certaines de leurs tantes souhaitaient qu'il soit procédé à l'excision de l'enfant C..., et que Mme B... avait signalé, lors de son entretien à l'OFPRA et dans ses écritures, que l'une de ses tantes pratiquait elle-même l'excision, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas entaché sa décision de dénaturation des pièces du dossier.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme B... doit être rejeté, y compris, par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 juin 2024 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 12 juillet 2024.

Le président :

Signé : M. Olivier Yeznikian

La rapporteure :

Signé : Mme Sophie Delaporte

La secrétaire :

Signé : Mme Claudine Ramalahanoharana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 473443
Date de la décision : 12/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 jui. 2024, n° 473443
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Delaporte
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SCP GURY & MAITRE ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:473443.20240712
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