Vu la procédure suivante :
Par une ordonnance n° 1503273 du 28 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille, statuant sur la demande de M. A... B..., a jugé qu'il n'y avait pas lieu de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre du préfet des Bouches-du-Rhône par le jugement n° 1406432 du 10 décembre 2014 du même tribunal administratif lui enjoignant d'assurer le relogement de l'intéressé dans un délai de quatre mois.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 novembre 2023 et 26 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires la somme de 2 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Capron, avocat de M. B....
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... a été reconnu comme prioritaire et devant être relogé en urgence par une décision du 13 février 2014 de la commission de médiation des Bouches-du-Rhône, sur le fondement du I de l'article L. 441-2-3-1 et de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation. Par un jugement du 10 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône d'assurer son relogement sous astreinte de 450 euros par mois de retard dans un délai de quatre mois à compter de la notification de son jugement. Par une ordonnance du 28 juin 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif a jugé qu'il n'y avait pas lieu de liquider l'astreinte prononcée par le jugement du 10 décembre 2014.
2. Aux termes de l'article R. 778-8 du code de justice administrative, dans ses dispositions applicables à la date du jugement du 10 décembre 2014 : " Lorsque le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cet effet constate, d'office ou sur la saisine du requérant, que l'injonction prononcée n'a pas été exécutée, il procède à la liquidation de l'astreinte en faveur du fond prévu à l'article L. 300-2 du code de la construction et de l'habitation. / Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cet effet peut statuer par ordonnance, dans les conditions prévues par le chapitre II du titre IV du livre VII du présent code, après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur l'exécution de l'injonction prononcée. / Il liquide l'astreinte en tenant compte de la période pendant laquelle, postérieurement à l'expiration du délai imparti par le jugement, l'injonction est demeurée inexécutée par le fait de l'administration. Il peut, eu égard aux circonstances de l'espèce, modérer le montant dû par l'Etat voire, à titre exceptionnel, déclarer qu'il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte ".
3. Pour juger qu'il n'y avait pas lieu de liquider l'astreinte prononcée par le jugement du 10 décembre 2014 du tribunal administratif de Marseille, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur ce que, par une décision du 3 mars 2022, la commission de médiation des Bouches-du-Rhône avait de nouveau reconnu M. B... comme prioritaire et devant être relogé en urgence. En se fondant sur ce seul motif, sans rechercher si l'injonction prononcée par le jugement du 10 décembre 2014 avait été exécutée dans le délai prescrit par ce jugement, il a commis une erreur de droit qui justifie l'annulation de son ordonnance.
4. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Capron, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à la SCP Capron.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 28 juin 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Marseille.
Article 3 : L'Etat versera à la SCP Capron, avocat de M. B..., une somme de 2 500 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 30 mai 2024 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat et Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 5 juillet 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
La rapporteure :
Signé : Mme Sara-Lou Gerber
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire