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05/07/2024 | FRANCE | N°487648

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 05 juillet 2024, 487648


Vu la procédure suivante :



M. B... A... et son assureur, la société d'assurance mutuelle à cotisations variables Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la commune de Vic-la-Gardiole et le service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault à leur verser les sommes respectives de 100 260,28 euros et de 410 551 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'incendie d'une maison d'habitation et de son annexe survenu le 18 février 2016. Par un jug

ement n° 2004322 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif a rejet...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... et son assureur, la société d'assurance mutuelle à cotisations variables Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la commune de Vic-la-Gardiole et le service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault à leur verser les sommes respectives de 100 260,28 euros et de 410 551 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'incendie d'une maison d'habitation et de son annexe survenu le 18 février 2016. Par un jugement n° 2004322 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 21TL04740 du 27 juin 2023, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté leur appel contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 août et 14 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... et la MAIF et demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Vic-la-Gardiole et du SDIS de l'Hérault la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. A... et de la société MAIF et à la SCP Gury et Maître, avocat de la commune de Vic-la-Gardiole.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la maison d'habitation de M. A... située à Vic-la-Gardiole (Hérault) a été totalement détruite par un incendie, le 18 février 2016, en dépit de l'intervention du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault. Estimant que la commune de Vic-la-Gardiole et le service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault avaient commis des fautes, respectivement, dans l'exercice des pouvoirs de police en matière de prévention des incendies et dans la mise en œuvre des moyens de lutte contre l'incendie, M. A... et son assureur, la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) ont demandé à la commune de Vic-la-Gardiole et au SDIS de l'Hérault de les indemniser des préjudices subis du fait de la destruction de la maison et de son mobilier. M. A... et la société MAIF se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 27 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Toulouse ayant rejeté leur appel contre le jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la condamnation du SDIS de l'Hérault et de la commune de Vic-la-Gardiole à leur verser respectivement les sommes de 100 260,28 euros et 410 551 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'incendie.

Sur l'arrêt en tant qu'il statue sur la responsabilité pour faute de la commune de Vic-la-Gardiole :

2. Il ressort des termes mêmes de l'arrêt litigieux que pour juger que la responsabilité de la commune de Vic-la-Gardiole ne pouvait être engagée en raison de l'absence de desserte de la maison par un poteau ou une bouche d'incendie mobilisable en cas d'incendie, la cour administrative d'appel a considéré que cette absence, à la supposer fautive, n'entretenait pas de lien de causalité avec les préjudices invoqués dès lors qu'il existait à proximité un point d'eau naturel, le ruisseau de La Robine, pouvant alimenter les secours en eau. En statuant ainsi, sans indiquer les motifs pour lesquels elle estimait que les caractéristiques et la signalisation préalable du ruisseau de La Robine permettaient effectivement aux services de secours, intervenant en urgence, de s'y approvisionner, alors même que son caractère mobilisable était contesté devant elle et qu'il n'avait pas été identifié par l'expert mandaté par le tribunal administratif, la cour administrative d'appel de Toulouse a insuffisamment motivé son arrêt.

Sur l'arrêt en tant qu'il statue sur la responsabilité pour faute du SDIS de l'Hérault :

3. Pour juger que la responsabilité du SDIS de l'Hérault ne pouvait être engagée pour la conduite des opérations de lutte contre l'incendie, la cour a estimé, d'une part, que les appelants n'invoquaient aucune faute précise de ce service dans la gestion de l'incendie et, d'autre part, que les difficultés d'approche rencontrées par le porteur d'eau ne lui étaient pas imputables. En statuant ainsi, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier ni entaché son arrêt de contradiction de motifs.

Sur la responsabilité sans faute pour rupture de l'égalité devant les charges publiques :

4. Si la société requérante soutient que la responsabilité sans faute de la commune de Vic-la-Gardiole et celle du SDIS de l'Hérault seraient engagées au motif que, d'une part, la commune se serait abstenue, en vertu d'une mesure légalement prise, d'assurer l'alimentation en eau des services de secours à proximité de la maison, ce qui aurait causé à M. A... un préjudice grave et spécial, et que d'autre part, les pompiers ne seraient pas intervenus sur l'incendie de l'habitation en raison de la manœuvre qu'ils ont dû entreprendre pour le sauvetage d'un binôme de sapeurs-pompiers en difficulté, de telles circonstances ne ressortent en tout état de cause pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond. Dans ces conditions, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en n'appliquant pas d'office aux faits de l'espèce un régime de responsabilité sans faute de l'Etat pour rupture d'égalité devant les charges publiques.

5. Il résulte de ce tout qui précède que M. A... et autre sont fondés, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué uniquement en tant qu'il statue sur la responsabilité de la commune de Vic-la-Gardiole.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Vic-la-Gardiole la somme de 3 000 euros à verser à M. A... et à la société MAIF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A... et autre, ainsi qu'à la charge du SDIS de l'Hérault qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 27 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Toulouse est annulé en tant qu'il statue sur la responsabilité de la commune de Vic-la-Gardiole.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure devant la cour administrative d'appel de Toulouse.

Article 3 : La commune de Vic-la-Gardiole versera à M. A... et à la société MAIF une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A..., premier requérant dénommé, au service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault et à la commune de Vic-la-Gardiole.

Délibéré à l'issue de la séance du 30 mai 2024 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat et Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 5 juillet 2024.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

La rapporteure :

Signé : Mme Sara-Lou Gerber

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 487648
Date de la décision : 05/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 jui. 2024, n° 487648
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sara-Lou Gerber
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT ; SCP GURY & MAITRE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:487648.20240705
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