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11/06/2024 | FRANCE | N°483670

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 11 juin 2024, 483670


Vu la procédure suivante :



La société L'Immobilière Groupe Casino a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015 dans les rôles de la commune de Seynod (Haute-Savoie). Par un jugement n° 2107402 du 17 juillet 2023, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a rejeté sa demande.



Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 17 août 2023 et le 5

avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société L'Immobilière Groupe ...

Vu la procédure suivante :

La société L'Immobilière Groupe Casino a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015 dans les rôles de la commune de Seynod (Haute-Savoie). Par un jugement n° 2107402 du 17 juillet 2023, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 17 août 2023 et le 5 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société L'Immobilière Groupe Casino demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Pau, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de la société L'Immobilière Groupe Casino ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la

société l'Immobilière Groupe Casino, qui possède des locaux situés dans la commune de Seynod (Haute-Savoie), a sollicité la décharge de ses cotisations primitives de taxe d'enlèvement des ordures ménagères au titre de l'année 2015, en invoquant, par la voie de l'exception, l'illégalité de la délibération du 9 avril 2015 de la communauté d'agglomération d'Annecy devenue la communauté d'agglomération du Grand Annecy ayant fixé le taux de cette taxe. Cette société se pourvoit en cassation contre le jugement du 17 juillet 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

2. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères au titre de l'année 2015 en litige : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service dans la mesure où celles-ci ne sont pas couvertes par des recettes ordinaires n'ayant pas le caractère fiscal (...) ". En vertu des articles 1521 et 1522 du même code, cette taxe a pour assiette celle de la taxe foncière sur les propriétés bâties. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales. Ces dépenses sont constituées de la somme de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des seuls déchets ménagers et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées, telle qu'elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe. A cet égard, doivent être déduites de ces dépenses, le cas échéant, les dépenses se rapportant aux déchets non ménagers, qui n'ont pas à être financés par la taxe, ainsi que le montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société L'Immobilière Groupe Casino soutenait que le coût global de traitement des déchets, tel qu'il ressortait du budget primitif du service de traitement et d'enlèvement des ordures ménagères de la communauté d'agglomération d'Annecy incluait, pour une part que la société estimait à 20 %, le coût de traitement des déchets non ménagers, lequel, ainsi qu'il a été dit au point 2, ne pouvait pas être couvert par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères due au titre de l'année 2015. Il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond que la communauté d'agglomération du Grand Annecy, intervenante, se bornait à soutenir que cette part se limitait à 7,58 %. Il s'ensuit qu'en se fondant sur le coût de traitement des déchets tel qu'il ressortait du budget primitif du service de traitement et d'enlèvement des ordures ménagères de communauté d'agglomération d'Annecy pour juger que le produit de la taxe en litige n'était pas manifestement disproportionné, sans rechercher si ce coût incluait pour partie celui du traitement de déchets non ménagers, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la société L'Immobilière Groupe Casino est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société L'Immobilière Groupe Casino au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 17 juillet 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Grenoble.

Article 3 : L'Etat versera à la société L'Immobilière Groupe Casino la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société L'Immobilière Groupe Casino et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 2 mai 2024 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Olivier Pau, auditeur-rapporteur.

Rendu le 11 juin 2024.

La présidente :

Signé : Mme Anne Egerszegi

Le rapporteur :

Signé : M. Olivier Pau

Le secrétaire :

Signé : M. Brian Bouquet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 483670
Date de la décision : 11/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2024, n° 483670
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Pau
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:483670.20240611
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