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07/06/2024 | FRANCE | N°477062

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 07 juin 2024, 477062


Vu la procédure suivante :



Mme D... C..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de deux de ses enfants, A... et B..., a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 31 octobre 2022 rejetant sa demande d'asile et de lui reconnaître, ainsi qu'à ces deux enfants, la qualité de réfugiée ou, à défaut, de leur accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une ordonnance n° 23005688 du 6 mars 2023, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa r

equête.



Par un pourvoi, enregistré le 2 août 2023 au secréta...

Vu la procédure suivante :

Mme D... C..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de deux de ses enfants, A... et B..., a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 31 octobre 2022 rejetant sa demande d'asile et de lui reconnaître, ainsi qu'à ces deux enfants, la qualité de réfugiée ou, à défaut, de leur accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une ordonnance n° 23005688 du 6 mars 2023, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa requête.

Par un pourvoi, enregistré le 2 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions devant la CNDA ;

3°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas - Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que Mme C... a sollicité, en son nom propre et celui de deux de ses enfants mineurs, la reconnaissance de la qualité de réfugiés ou, à défaut, le bénéfice de la protection subsidiaire, qui leur ont été refusés par une décision du 31 octobre 2022 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Mme C... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 6 mars 2023 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours formé contre cette décision.

2. L'article L. 532-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La Cour nationale du droit d'asile, dont la nature, les missions et l'organisation sont notamment définies au titre III du livre I, statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application des articles L. 511-1 à L. 511-8, L. 512-1 à L. 512-3, L. 513-1 à L. 513-5, L. 531-1 à L. 531-35, L. 531-41 et L. 531-42. / A peine d'irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ".

3. Aux termes de l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991, dans sa version résultant de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie : " Devant la Cour nationale du droit d'asile, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable. L'aide juridictionnelle est sollicitée dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle est adressée au bureau d'aide juridictionnelle de la cour, le délai prévu au premier alinéa de l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est suspendu et un nouveau délai court, pour la durée restante, à compter de la notification de la décision relative à l'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle (...) ".

4. Le délai de quinze jours imparti à l'intéressé par les dispositions de l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991 pour envoyer au bureau d'aide juridictionnelle de la Cour nationale du droit d'asile sa demande d'aide juridictionnelle, laquelle ne constitue pas un recours contentieux, n'est pas un délai franc.

5. Il résulte des dispositions citées au point 3 que le délai de recours mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 532-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ayant fait l'objet d'une suspension du fait de l'introduction d'une demande d'aide juridictionnelle recommence à courir, pour le nombre de jours restants, à compter de la notification de la décision relative à l'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

6. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que Mme C... a reçu notification, le 8 novembre 2022, de la décision de l'OFPRA du 31 octobre 2022 refusant de faire droit à sa demande tendant à la reconnaissance pour elle-même et pour deux de ses enfants mineurs, de la qualité de réfugiés ou, à défaut, à l'octroi du bénéfice de la protection subsidiaire. En considérant que la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme C... était tardive alors que celle-ci avait été émise le 21 novembre 2022, sans qu'ait d'incidence la circonstance que la demande ait été ultérieurement complétée des pièces manquantes, et en en déduisant que son recours introduit devant la Cour nationale du droit d'asile le 10 janvier 2023 était également tardif, alors que la demande d'aide juridictionnelle avait suspendu les délais de recours, lesquels couraient jusqu'au 17 février 2023 eu égard à la date de notification de la décision d'octroi de l'aide juridictionnelle au bénéfice de Mme C... le 31 janvier 2023, la cour a dénaturé les faits et pièces du dossier.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que Mme C... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OFPRA le versement à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de Mme C..., d'une somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 6 mars 2023 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : L'OFPRA versera à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme D... C... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 avril 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 7 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :

Signé : Mme Sophie Delaporte

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 477062
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2024, n° 477062
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Delaporte
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS - FESCHOTTE-DESBOIS - SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:477062.20240607
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