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07/06/2024 | FRANCE | N°474788

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 07 juin 2024, 474788


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré des points du capital de points de son permis de conduire à la suite d'infractions au code de la route qu'il a commises entre le 5 novembre 2017 et le 2 octobre 2021 et la décision référencée " 48 SI " du 6 juin 2022 par laquelle ce ministre a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer son

capital de points et de lui restituer son titre de conduite. Par un juge...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré des points du capital de points de son permis de conduire à la suite d'infractions au code de la route qu'il a commises entre le 5 novembre 2017 et le 2 octobre 2021 et la décision référencée " 48 SI " du 6 juin 2022 par laquelle ce ministre a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer son capital de points et de lui restituer son titre de conduite. Par un jugement n° 2204309 du 4 avril 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 4 septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 4 avril 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation des décisions de retraits de points consécutives aux infractions commises entre le 5 novembre 2017 et le 2 octobre 2021 et de la décision référencée " 48 SI " du 6 juin 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité du permis de conduire en raison d'un solde de points nul. M. B... se pourvoit en cassation contre ce jugement.

2. La délivrance au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal. Son accomplissement conditionne dès lors la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé. Cette information doit porter, d'une part, sur l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer le droit d'accès et, d'autre part, sur le fait que le paiement de l'amende établit la réalité de l'infraction dont la qualification est précisée et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction. Ni l'article L. 223-3, ni l'article R. 223-3 du code de la route n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés, dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance.

3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré de ce que l'information exigée par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route n'avait pas été délivrée à M. B..., le tribunal administratif s'est fondé, s'agissant de l'infraction du 2 octobre 2021 ayant entraîné le retrait d'un point, sur la circonstance que l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'y accéder avait été portée à la connaissance de l'intéressé à l'occasion d'infractions antérieures suffisamment récentes commises par excès de vitesse. En statuant ainsi, sans rechercher si la qualification de l'infraction commise le 2 octobre 2021 avait été portée à la connaissance de M. B..., le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

4. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation de la décision référencée " 48 SI " du 6 juin 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a, d'une part, retiré un point de son capital de points à la suite de l'infraction du 2 octobre 2021 et, d'autre part, constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement n° 2204309 du 4 avril 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur référencée " 48 SI " du 6 juin 2022.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Grenoble dans la mesure de la cassation prononcée à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 16 mai 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 7 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

Le rapporteur :

Signé : M. Christophe Barthélemy

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 474788
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2024, n° 474788
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Barthélemy
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : CABINET ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474788.20240607
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