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07/06/2024 | FRANCE | N°473767

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 07 juin 2024, 473767


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré douze points du capital de points de son permis de conduire à la suite d'infractions au code de la route commises entre le 23 novembre 2015 et le 26 janvier 2022, ainsi que la décision référencée " 48 SI " du 12 juillet 2022 par laquelle ce ministre a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de reco

nstituer son capital de points et de lui restituer son titre de conduit...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré douze points du capital de points de son permis de conduire à la suite d'infractions au code de la route commises entre le 23 novembre 2015 et le 26 janvier 2022, ainsi que la décision référencée " 48 SI " du 12 juillet 2022 par laquelle ce ministre a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de reconstituer son capital de points et de lui restituer son titre de conduite. Par un jugement n° 2207081 du 28 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif a, d'une part, annulé la décision retirant trois points du capital de points de M. A... à la suite de l'infraction relevée le 28 octobre 2016 et, par voie de conséquence, la décision référencée " 48 SI " et, d'autre part, enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de trois points sur ce permis de conduire dans un délai de deux mois et de le restituer à l'intéressé si, en tenant compte d'éventuelles infractions ultérieures, son solde de points reste positif.

Par un pourvoi, enregistré le 2 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement en tant qu'il lui fait grief.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Bardoul, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par une décision référencée " 48 SI " du 12 juillet 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a constaté la perte de validité du permis de conduire de M. A... pour solde de points nul. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation contre le jugement du 28 février 2023, par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Marseille a, sur la demande de M. A..., d'une part, annulé la décision retirant trois points du capital de points de l'intéressé à la suite de l'infraction relevée le 28 octobre 2016 et, par voie de conséquence, la décision du 12 juillet 2022 et lui a, d'autre part, enjoint de procéder à la reconstitution de trois points sur le permis de conduire de l'intéressé et de lui restituer ce permis si le solde de points reste positif.

2. Il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points du capital de points d'un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues à ces articles, lesquelles constituent une garantie essentielle en ce qu'elles mettent l'intéressé en mesure de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis.

3. Le II de l'article R. 49-1 du code de procédure pénale prévoit que le procès-verbal constatant une contravention pouvant donner lieu à une amende forfaitaire " peut être dressé au moyen d'un appareil sécurisé dont les caractéristiques sont fixées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, permettant le recours à une signature manuscrite conservée sous forme numérique ". En vertu des dispositions de l'article A. 37-19 du même code, l'appareil électronique sécurisé permet d'enregistrer, pour chaque procès-verbal, d'une part, la signature de l'agent verbalisateur et, d'autre part, celle du contrevenant qui est invité à l'apposer " sur une page écran qui lui présente un résumé non modifiable des informations concernant la contravention relevée à son encontre, informations dont il reconnaît ainsi avoir eu connaissance ". Selon le II de l'article A. 37-27-2, en cas d'infraction entraînant retrait de points, le résumé non modifiable des informations concernant la contravention relevée, à la suite duquel le contrevenant appose sa signature, précise qu'elle entraîne retrait de points et comporte l'ensemble des éléments mentionnés aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route. Enfin, depuis une mise à jour logicielle effectuée le 15 avril 2015, tous les appareils électroniques utilisés par les agents verbalisateurs font apparaître sur la page présentée au contrevenant, en cas d'infraction entraînant retrait de points, l'ensemble des informations exigées par la loi. Dès lors, pour les infractions constatées à compter de cette date, la signature apposée par l'intéressé et conservée par voie électronique établit que ces informations lui ont été délivrées et la mention certifiée par l'agent selon laquelle le contrevenant a refusé d'apposer sa signature sur la page qui lui était présentée possède la même valeur probante.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A... a apposé sa signature sur le procès-verbal d'infraction électronique relatif à l'infraction relevée le 28 octobre 2016. Il résulte de ce qui est dit au point 3 que cette signature, apposée par l'intéressé et conservée par voie électronique, établit que les informations mentionnées aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui n'incluent pas le nombre de points retirés, lui ont été délivrées à cette occasion. Il suit de là qu'en estimant qu'il n'a pas été démontré que M. A... a reçu ces éléments d'information au motif qu'ils ne figurent pas sur le document intitulé " procès-verbal ", rédigé par un agent de police judiciaire adjoint de la police municipale d'Aix-en-Provence et produit par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, qui comporte en outre une annexe mentionnant le nombre de points dont le retrait est " prévu ", le tribunal administratif a dénaturé les faits et pièces du dossier qui lui était soumis.

5. Ce moyen, né du jugement attaqué, n'étant pas, contrairement à ce que soutient en défense M. A..., nouveau en cassation, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. Il résulte de ce qui est dit au point 4 que la signature apposée par M. A... sur le procès-verbal électronique de l'infraction qu'il a commise le 28 octobre 2016 établit que les informations mentionnées aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route lui ont été délivrées à cette occasion. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de retrait de points prise à la suite de cette infraction. Le solde de points figurant au capital de points de son permis de conduire étant nul à la date du 12 juillet 2022, il n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision référencée " 48 SI " par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire. Les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions doivent par suite être rejetées, de même que ses conclusions à fins d'injonction.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante, tant en première instance que dans l'instance de cassation.

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Marseille du 28 février 2023 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille et tendant à l'annulation de la décision de retrait de points prise à la suite de l'infraction du 28 octobre 2016 et de la décision référencée " 48 SI " du 12 juillet 2022, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction, sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 mai 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 7 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

Le rapporteur :

Signé : M. Christophe Barthélemy

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 473767
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2024, n° 473767
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Barthélemy
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : BARDOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:473767.20240607
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