Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire, un autre mémoire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 juillet, 8 août et 12 octobre 2022 et le 17 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Dôm Finance demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 8 de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF) du 11 juillet 2022 lui infligeant une sanction pécuniaire de 400 000 euros ;
2°) de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel sur la compatibilité des dispositions nationales qui ont pour objet de soumettre aux obligations instituées par la directive 2004/109/CE du 15 décembre 2004 les personnes et entités acquérant des actions dans l'objectif unique de faire obstacle à une procédure de retrait obligatoire avec l'article 10, a) de cette directive ;
3°) de mettre à la charge de l'AMF la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 ;
- la directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 ;
- le code de commerce ;
- le code monétaire et financier ;
- le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Pauline Hot, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de la société Dôm Finance et à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de l'Autorité des marchés financiers ;
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte de l'instruction que la société Dôm Finance est une société de gestion, agréée par l'Autorité des marchés financiers (AMF) le 8 juin 2004. Le 8 janvier 2019, le secrétaire général de l'AMF a ouvert une enquête sur le marché du titre April et sur tout instrument financier dont le cours ou la valeur dépendait du cours de la valeur du titre April ou avait un effet sur ce dernier, à compter du 1er janvier 2018. Le collège de l'AMF a, au terme de cette enquête, décidé d'engager une procédure de sanction à l'encontre de la société Dôm Finance, de plusieurs autres sociétés filiales de AFI Esca Holding, à savoir AFI ESCA, ADI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg, ainsi que du président de la holding, M. A..., par ailleurs actionnaire direct de Dôm Finances. Selon les notifications de griefs adressées, il était reproché, en substance, aux mis en cause d'avoir agi de concert afin de constituer une position suffisante sur le titre April pour faire obstacle au projet de retrait obligatoire envisagé par CVC Capital Partners, à l'issue de l'OPA simplifiée qui s'est déroulée du 11 au 26 juillet 2019. La société Dôm Finances a, dans ce cadre, reçu une notification de griefs en date du 29 juin 2021. Par une décision n° 8 du 11 juillet 2022, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a, d'une part, estimé que la société Dôm Finance avait méconnu les obligations de déclaration qui résultent des articles L. 233-7 du code de commerce et des articles 231-46 et 231-47 du règlement général de l'AMF, alors qu'il existait une action de concert, au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce, entre la société Dôm Finance et M. A... jusqu'au 3 juillet 2019, et, à compter du 4 juillet 2019, entre la société Dôm Finance, M. A... et les sociétés AFI ESCA, AFI ESCA Holding, AFI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg, ayant pour objet de faire obstacle au retrait obligatoire envisagé par la société Andromeda Investissements, initiatrice d'une offre publique d'acquisition sur le fonds April. La commission des sanctions a, d'autre part, caractérisé un manquement de la société Dôm Finance à l'obligation d'indépendance, du fait de l'immixtion de M. A... dans sa gestion, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 214-9 du code monétaire et financier, entre avril 2018 et octobre 2019. A raison de ces manquements, elle a prononcé à l'encontre de la société Dôm Finance une sanction d'un montant de 400 000 euros et ordonné la publication de la décision sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers de manière non anonyme pendant 5 ans. La société Dôm Finance demande au Conseil d'Etat l'annulation de cette décision du 11 juillet 2022.
Sur le manquement tiré de la méconnaissance de l'obligation d'indépendance de la société Dôm Finance :
2. Aux termes de l'article L. 214-9 du code monétaire et financier, applicable au litige : " L'OPCVM, le dépositaire et la société de gestion agissent de manière honnête, loyale, professionnelle, indépendante et dans le seul intérêt des porteurs de parts ou actionnaires de l'OPCVM. Ils doivent présenter des garanties suffisantes en ce qui concerne leur organisation, leurs moyens techniques et financiers, l'honorabilité et l'expérience de leurs dirigeants. Aucune SICAV ni aucune société de gestion ne peut exercer l'activité de dépositaire. " En vertu de ces dispositions, différentes obligations, qui ne se confondent pas, s'imposent aux gestionnaires d'OPCVM, dont celle d'agir de manière indépendante et celle d'agir dans le seul intérêt des porteurs de parts ou actionnaires de l'OPCVM.
3. Si la société Dôm Finance soutient que la commission des sanctions aurait inexactement apprécié les faits en retenant qu'elle avait manqué à l'obligation d'indépendance qui résulte de l'article L. 214-9, du fait des immixtions répétées de M. A..., actionnaire de référence de la société de gestion, dans la gestion de l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières Dôm Performance Active, d'une part, la circonstance invoquée par la société requérante, à la supposer établie, qu'elle ait agi dans l'intérêt des porteurs du fonds Dôm Performance Active est sans incidence sur le respect de l'obligation d'indépendance, ces deux obligations, tirées de l'article L. 214-9 du code monétaire et financier, étant, ainsi qu'il a été dit, distinctes. D'autre part, il résulte de l'instruction que M. A... jouissait, quand bien même il n'exerçait pas de responsabilités dans la gestion du fonds malgré sa rémunération comme " gestionnaire " de l'OPCVM, d'un positionnement particulier dans la gestion du fonds Dôm Performance Active lui permettant d'influer sur cette gestion, même si ses recommandations n'étaient pas systématiquement suivies d'effet, et qu'il avait à ce titre joué un rôle essentiel dans la prise de décision de ne pas apporter les titres April détenus par Dôm Performance Active à l'OPA conduite par la société Andromeda Investissements, ou dans l'identification des éléments financiers à privilégier à l'achat ou à la vente dont le titre April, ou dans la prise de décision d'augmenter l'exposition du fonds sur le titre April au maximum des ratios réglementaires. Dans ces circonstances établies par l'instruction, c'est sans erreur d'appréciation que la commission des sanctions de l'AMF a retenu que la société Dôm Finance avait manqué à son obligation d'agir de manière indépendante dans la gestion du fonds Dôm Performance Active.
Sur le manquement aux obligations de déclaration prévues par les articles L. 233-7 du code de commerce, et les articles 223-14, 231-46 et 231-47 du règlement général de l'AMF du fait du franchissement des seuils lié à l'existence d'une action de concert entre la société Dôm Finance et M. A... jusqu'au 3 juillet 2019, puis entre la société Dôm Finance, M. A... et les sociétés AFI ESCA, AFI ESCA Holding, AFI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg :
4. Aux termes de l'article L. 233-10 du code de commerce : " I.- Sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir, de céder ou d'exercer des droits de vote, pour mettre en œuvre une politique commune vis-à-vis de la société ou pour obtenir le contrôle de cette société. II.- Un tel accord est présumé exister : 1° Entre une société, le président de son conseil d'administration et ses directeurs généraux ou les membres de son directoire ou ses gérants ; 2° Entre une société et les sociétés qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-3 ; 3° Entre des sociétés contrôlées par la même ou les mêmes personnes ; (...). III.- Les personnes agissant de concert sont tenues solidairement aux obligations qui leur sont faites par les lois et règlements. " Aux termes de l'article L. 233-10-1 du code de commerce : " En cas d'offre publique d'acquisition, sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord avec l'auteur d'une offre publique visant à obtenir le contrôle de la société qui fait l'objet de l'offre. Sont également considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord avec la société qui fait l'objet de l'offre afin de faire échouer cette offre. "
5. Aux termes de l'article L. 233-7 du code de commerce : " I.- Lorsque les actions d'une société ayant son siège sur le territoire de la République sont admises aux négociations sur un marché réglementé d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen (...) toute personne physique ou morale agissant seule ou de concert qui vient à posséder, directement ou indirectement, un nombre d'actions représentant plus du vingtième, du dixième, des trois vingtièmes, du cinquième, du quart, des trois dixièmes, du tiers, de la moitié, des deux tiers, des dix-huit vingtièmes ou des dix-neuf vingtièmes du capital ou des droits de vote informe la société dans un délai fixé par décret en Conseil d'État, à compter du franchissement du seuil de participation, du nombre total d'actions ou de droits de vote qu'elle possède. (...) / VII.- Lorsque les actions de la société sont admises aux négociations sur un marché réglementé, la personne tenue à l'information prévue au I est tenue de déclarer, à l'occasion des franchissements de seuil du dixième, des trois vingtièmes, du cinquième ou du quart du capital ou des droits de vote, les objectifs qu'elle a l'intention de poursuivre au cours des six mois à venir. / Cette personne précise dans sa déclaration : / a) les modes de financement de l'acquisition ; / b) si elle agit seule ou de concert ; / c) si elle envisage d'arrêter ses achats ou de les poursuivre et d'acquérir ou non le contrôle de la société ; (...) ". L'article L. 233-9 du code de commerce prévoit que : " I. - Sont assimilés aux actions ou aux droits de vote mentionnés au I de l'article L. 233-7 du code de commerce : / (...) / 2° Les actions ou les droits de vote possédés par un tiers avec qui cette personne agit de concert ".
6. L'article 223-14 du règlement général de l'AMF prévoit que : " I. - Les personnes tenues à l'information mentionnée au I de l'article L. 233-7 du code de commerce déposent leur déclaration auprès de l'AMF, avant la clôture des négociations, au plus tard le quatrième jour de négociation suivant le franchissement du seuil de participation ". L'article 231-46 du règlement général de l'AMF dispose que : " I. - Les personnes ou entités suivantes doivent déclarer chaque jour à l'AMF les opérations qu'elles ont effectuées ayant pour effet ou susceptibles d'avoir pour effet de transférer la propriété des titres ou des droits de vote visés par l'offre, y compris les opérations sur les instruments financiers ou les accords ayant un effet économique similaire à la possession desdits titres : / (...)/ 5° Les personnes ou entités qui, seules ou de concert, depuis le début de la période d'offre ou, le cas échéant, de la période de pré-offre, ont accru leur détention d'au moins 1 % du capital de la société visée, ou d'au moins 1 % du total des titres visés autres que des actions, tant qu'elles détiennent cette quantité de titres. / Les opérations qui doivent être déclarées incluent notamment : / 1° L'achat, la vente, la souscription, le prêt et l'emprunt des titres visés par l'offre ; (...) ". Enfin, l'article 231-47 du règlement général de l'AMF dispose que : " Sans préjudice des articles L. 233-7 et suivants du code de commerce, toute personne ou entité, à l'exception de l'initiateur de l'offre, qui vient à accroître, seule ou de concert, depuis le début de la période d'offre ou, le cas échéant, de la période de préoffre, le nombre d'actions qu'elle possède d'au moins 2 % du capital de la société visée, ou qui vient à accroître sa participation si elle détient plus de 5 % du capital ou des droits de vote, est tenue de déclarer immédiatement à l'AMF les objectifs qu'elle a l'intention de poursuivre au regard de l'offre en cours. En cas de changement d'intention, une nouvelle déclaration est établie et communiquée sans délai à l'AMF. (...) ".
7. Pour retenir le manquement considéré, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a considéré que le régime de l'article L. 233-10 du code de commerce, cité au point 4, était applicable à l'accord conclu entre la société Dôm Finance et M. A... jusqu'au 3 juillet 2019, et, à compter du 4 juillet 2019, entre la société Dôm Finance, M. A... et les sociétés AFI ESCA, AFI ESCA Holding, AFI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg afin de faire obstacle au retrait obligatoire, envisagé par la société Andromeda Investissements, initiatrice d'une offre publique d'acquisition sur le fonds April. La commission des sanctions a retenu à cet égard la qualification d'action de concert en application des présomptions prévues aux 1°, 2° et 3° du II de cet article. A l'appui de sa requête, la société Dôm Finance soutient que la commission des sanctions a, ce faisant, inexactement qualifié les faits de l'espèce, dès lors que cet accord ne saurait être regardé comme ayant pour finalité la conduite d'une politique commune durable vis-à-vis de la société au sens de l'article 10, a) de la directive 2004/109/CE du 15 décembre 2004.
8. Les dispositions des articles L. 233-10 et L. 233-10-1 du code de commerce ont pour objet de définir et de caractériser l'action de concert. L'article L. 233-10 assure la transposition en droit interne de la directive 2004/109/CE du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé, dont l'article 10 prévoit notamment que les exigences posées en matière de notification par l'article 9, paragraphes 1 et 2, s'appliquent également à une personne physique ou morale, dans la mesure où elle a le droit d'acquérir, de céder ou d'exercer des droits de vote, lorsque " a) les droits de vote sont détenus par un tiers avec qui cette personne a conclu un accord qui les oblige à adopter, par un exercice concerté des droits de vote qu'ils détiennent, une politique commune durable en ce qui concerne la gestion de la société en question (...) ". L'article 3 de cette directive prévoit expressément que l'État membre ne peut soumettre les personnes intéressées à des exigences plus strictes que celles qu'elle énonce sauf pour appliquer les dispositions législatives, réglementaires ou administratives adoptées en ce qui concerne les offres publiques d'acquisition conformément à la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 sur les offres publiques d'acquisition. La qualification d'action de concert conduit à soumettre les intéressés aux obligations d'informations prévues par l'article L. 233-7 du code de commerce, pris pour la transposition de la même directive.
9. Pour sa part, l'article L. 233-10-1 transpose la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition, dont le d) du 1 de l'article 2 définit les " personnes agissant de concert " comme " les personnes physiques ou morales qui coopèrent avec l'offrant ou la société visée sur la base d'un accord, formel ou tacite, oral ou écrit, visant à obtenir le contrôle de la société ou à faire échouer l'offre ", le 1 de l'article 5 prévoit le régime de protection des actionnaires minoritaires et le rôle de la notion d'action de concert et l'article 6 encadre les informations sur l'offre. L'article 3 de cette directive prévoit expressément que les États membres veillent à ce que soient respectées les exigences minimales qu'elle énonce et leur permet de prévoir des conditions supplémentaires et des dispositions plus strictes que celles qui y sont prévue pour réglementer les offres.
10. Contrairement à ce que soutient la société Dôm Finance, il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 4 que si l'article L. 233-10-1 du code de commerce prévoit, pour le cas particulier des offres publiques d'acquisition, deux hypothèses d'action de concert qui s'ajoutent à celles de l'article L. 233-10 du code de commerce - visant, d'une part, les accords conclus avec l'auteur d'une offre publique pour obtenir le contrôle de la société qui fait l'objet de l'offre et, d'autre part, les accords conclus avec la société qui fait l'objet de l'offre afin de faire échouer cette offre -, cet article L. 233-10-1 ne fait pas obstacle à l'application de la définition générale de l'action de concert donnée par l'article L. 233-10, qui a une portée plus large, et ainsi à ce que d'autres types d'accords que ceux spécifiquement traités par l'article L. 233-10-1 puissent être qualifiés d'action de concert en cas d'offre publique d'acquisition.
11. Les dispositions ainsi combinées des articles L. 233-10 et L. 233-10-1 du code de commerce, dont la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a fait une exacte application, ne sont pas incompatibles avec les objectifs de directive 2004/109 du 15 décembre 2004, qui permet aux Etats membres de soumettre les personnes intéressées à des exigences plus strictes que celles qu'elle énonce pour appliquer les dispositions législatives, réglementaires ou administratives adoptées en ce qui concerne les offres publiques d'acquisition conformément à la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004, qui prévoit pour sa part que les Etats membres peuvent prévoir des conditions supplémentaires et des dispositions plus strictes que celles qu'elle retient pour réglementer les offres. Par suite, et sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel, la société Dôm Finance n'est pas fondée à soutenir que la qualification retenue par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers méconnaîtrait les articles L. 233-10 et L. 233-10-1 du code de commerce, interprétés à la lumière de l'article 10, a) de la directive 2004/109/CE du 15 décembre 2004.
12. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les intéressés ont manifesté la volonté commune de gérer au mieux leurs participations et de renforcer leur valorisation en faisant obstacle au retrait obligatoire, avec une incidence certaine sur la gestion de la société April, qui est restée cotée, sans que les circonstances que leur accord soit conclu temporairement, ou intègre un projet de cession ultérieur des titres détenus, ne fasse par elles-mêmes obstacle à la qualification d'action de concert. Par suite, la société Dôm Finance n'est pas fondée à soutenir que la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers ne pouvait pas retenir l'existence d'une action de concert au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce, entre la société Dôm Finance et M. A... jusqu'au 3 juillet 2019, et, à compter du 4 juillet 2019, entre la société Dôm Finance, M. A... et les sociétés AFI ESCA, AFI ESCA Holding, AFI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg.
13. Il résulte de l'instruction que compte tenu de l'action de concert mise en œuvre entre la société Dôm Finance et M. A... jusqu'au 3 juillet 2019, et, à compter du 4 juillet 2019, entre la société Dôm Finance, M. A... et les sociétés AFI ESCA, AFI ESCA Holding, AFI ESCA IARD et AFI ESCA Luxembourg, les seuils prévus par l'article L. 233-7 du code de commerce, rappelés au point 5, et par les articles 223-14, 231-46 et 231-47 du règlement général de l'AMF, rappelés au point 6, ont été franchis, sans qu'il ne soit contesté que les obligations déclaratives résultant de ces franchissements de seuils ont été méconnues par la société Dôm Finance.
14. Enfin, si la société Dôm Finance estime que la commission des sanctions de l'AMF a méconnu les exigences découlant du principe de légalité des délits et des peines et du principe de sécurité juridique en retenant à son encontre une action de concert, aucune règle ni aucun principe ne font obstacle à ce que l'Autorité des marchés financiers caractérise un manquement aux obligations dont elle contrôle le respect dans une hypothèse nouvelle, sans que les éléments avancés par la requérante ne soient en tout état de cause de nature à démontrer l'existence des atteintes qu'elle invoque.
Sur le montant de la sanction :
15. En infligeant à la société Dôm Finance une sanction pécuniaire de 400 000 euros et en décidant la publication de sa décision, la commission des sanctions n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, infligé de sanction disproportionnée eu égard à la gravité et à la nature des deux manquements substantiels qui lui sont reprochés, au vu notamment de l'intérêt qui s'attache à la préservation de la transparence du marché et des conséquences du manquement tenant à l'absence de déclaration de franchissement des seuils lié à l'existence d'une action de concert sur la situation des titres de la société April.
16. Il résulte de tout ce qui précède que la société Dôm Finance n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque.
Sur les frais de l'instance :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'AMF qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Dôm Finance la somme de 3 000 euros à verser à l'AMF, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la société Dôm Finance est rejetée.
Article 2: La société Dôm Finance versera à l'AMF une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Dôm Finance, à l'Autorité des marchés financiers et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 29 avril 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; M. Alain Seban, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 29 mai 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Pauline Hot
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain