Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 février et 30 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat des enseignants de l'Union nationale des syndicats autonomes (SE-UNSA) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 26 décembre 2022 par laquelle le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rejeté sa demande tendant à l'édiction des mesures réglementaires permettant l'assimilation des pensions versées aux instituteurs retraités à celles des professeurs des écoles ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre un décret ayant pour objet l'assimilation des pensions versées aux instituteurs retraités à celles des professeurs des écoles dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;
- le décret n° 90-680 du 1er août 1990 ;
- le décret n° 2003-1262 du 23 décembre 2003 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Fraval, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat du Syndicat des enseignants de l'Union nationale des syndicats autonomes (SE - UNSA) ;
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat SE-UNSA a demandé au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse d'édicter les mesures réglementaires permettant, en application des dispositions du IV de l'article 66 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, de réviser les pensions versées aux instituteurs retraités par assimilation à celles dont bénéficient les membres du corps des professeurs des écoles. Par une décision du 26 décembre 2022, dont le syndicat requérant demande l'annulation pour excès de pouvoir, le ministre a rejeté sa demande.
2. D'une part, aux termes du IV de l'article 66 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites : " Des décrets en Conseil d'Etat prévoient, selon les conditions fixées à l'article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2004, la révision des pensions concédées aux fonctionnaires et à leurs ayants cause à la date de suppression de leurs corps ou grades lorsqu'une réforme statutaire, intervenue avant le 1er janvier 2004, a décidé leur mise en extinction (...) ". Aux termes de l'article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er janvier 2004 : " En cas de réforme statutaire, l'indice de traitement mentionné à l'article L. 15 sera fixé conformément à un tableau d'assimilation annexé au décret déterminant les modalités de cette réforme ".
3. D'autre part, le décret du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles a créé le corps des professeurs des écoles et fixé les dispositions par lesquelles les instituteurs peuvent, sans y être contraints, intégrer ce nouveau corps par la voie du concours ou de l'inscription sur liste d'aptitude. Le décret du 23 décembre 2003 relatif à la mise en extinction des corps des instituteurs et des professeurs d'enseignement général de collège a placé le corps des instituteurs en voie d'extinction et abrogé les dispositions réglementaires relatives au recrutement et à la formation des instituteurs, sans modifier les modalités d'intégration des membres de ce corps au sein du corps des professeurs des écoles.
4. Il résulte des termes mêmes des dispositions du IV de l'article 66 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, citées au point 2, que les décrets procédant à l'assimilation prévue à l'article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2004 concernent les seuls corps ou grades effectivement supprimés à la suite d'une mise en extinction décidée par une réforme statutaire intervenue avant le 1er janvier 2004. Il ressort des pièces du dossier que si le corps des instituteurs a été placé en voie d'extinction par le décret du 23 décembre 2003, ce corps comporte encore, à la date de la présente décision, des fonctionnaires en activité. Par suite, le Premier ministre, qui n'y était tenu par aucune autre règle ou principe, n'avait pas à procéder à l'assimilation du corps des instituteurs à des grades existants au sein du corps des professeurs des écoles en application des dispositions citées au point 2.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat SE-UNSA n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision qu'il attaque. Ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du syndicat SE-UNSA est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au Syndicat des enseignants de l'Union nationale des syndicats autonomes, à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et au Premier ministre.
Délibéré à l'issue de la séance du 3 mai 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Alban de Nervaux, M. Vincent Mazauric, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire ; M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire et Mme Cécile Fraval, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure
Rendu le 28 mai 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Cécile Fraval
Le secrétaire :
Signé : M. Christophe Bouba