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24/05/2024 | FRANCE | N°474127

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 24 mai 2024, 474127


Vu la procédure suivante :



Le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 octobre 2018 de la directrice générale de l'agence régionale de santé d'Occitanie portant modification de l'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites exploité par la société d'exercice libéral par actions simplifiées Biomed 34. Par un jugement n° 1901599 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a re

jeté cette demande.



Par un arrêt n° 21TL00224 du 14 mars...

Vu la procédure suivante :

Le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 octobre 2018 de la directrice générale de l'agence régionale de santé d'Occitanie portant modification de l'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites exploité par la société d'exercice libéral par actions simplifiées Biomed 34. Par un jugement n° 1901599 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 21TL00224 du 14 mars 2023, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté l'appel formé par le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mai et 11 août 2023 et le 12 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'agence régionale de santé d'Occitanie la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 ;

- la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 ;

- la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Redondo, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat du conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens et à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société Biomed 34 ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 3 octobre 2018, la directrice générale de l'agence régionale de santé d'Occitanie a modifié, à la demande de la société Biomed 34, l'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites que cette société exploite, pour tenir compte de la nomination d'un médecin spécialisé en anatomie et cytologie pathologiques comme coresponsable du laboratoire et pour ajouter, sur la liste des sites du laboratoire, un nouveau site localisé à Narbonne et dédié à une activité d'anatomie et cytologie pathologiques. Par un jugement du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande du conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision. Ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 mars 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté son appel contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 6213-9 du code de la santé publique : " A l'exception des laboratoires à but non lucratif, les laboratoires de biologie médicale privés sont dirigés par un biologiste-responsable qui en est le représentant légal. / Lorsque la structure juridique d'un laboratoire de biologie médicale permet l'existence de plusieurs représentants légaux, ces représentants sont dénommés biologistes-coresponsables. Les médecins spécialistes qualifiés en anatomie et cytologie pathologiques peuvent être désignés comme coresponsables. / Les biologistes-coresponsables et les médecins spécialistes qualifiés en anatomie et cytologie pathologiques désignés comme coresponsables exercent ensemble les fonctions et les attributions habituellement dévolues au biologiste-responsable ". En outre, aux termes de l'article L. 6223-5 du code de la santé publique, une personne physique ou morale exerçant une profession de santé autre que celle de biologiste médical ne peut détenir directement ou indirectement une fraction du capital social d'une société exploitant un laboratoire de biologie médicale privé et, par suite, s'agissant d'une société civile professionnelle régie par la loi du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, d'une société d'exercice libéral régie par la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales ou d'une société coopérative régie par la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, seules structures juridiques à but lucratif susceptibles d'être constituées, aux termes de l'article L. 6223-1 du code de la santé publique, pour l'exploitation d'un laboratoire de biologie médicale, en être représentant légal.

3. Il résulte de ces dispositions qu'un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques peut être désigné comme coresponsable d'un laboratoire de biologie médicale privé, alors même qu'il ne peut en être le représentant légal, qualité qu'une telle désignation ne lui confère pas.

4. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que la cour a jugé qu'un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques pouvait être désigné comme médecin coresponsable du laboratoire de biologie médicale Biomed 34.

5. En second lieu, en vertu de l'article L. 6212-1 du code de la santé publique, un laboratoire de biologie médicale est une structure, implantée sur un ou plusieurs sites, au sein de laquelle sont effectués les examens de biologie médicale. L'article R. 6222-1 du même code précise que le site d'un laboratoire de biologie médicale est " l'unité géographique du laboratoire au sein de laquelle il réalise tout ou partie de son activité de biologie médicale ". L'article L. 6212-2 du même code prévoit que des examens d'anatomie et de cytologie pathologiques peuvent également être réalisés dans un laboratoire de biologie médicale, ceux-ci devant alors l'être par un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques ou, pour certaines phases, sous sa responsabilité. Aux termes de l'article L. 6223-6 du code de la santé publique : " Le nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d'un laboratoire de biologie médicale détenant une fraction du capital social et travaillant au moins un mi-temps dans le laboratoire est égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'exigence ainsi posée d'un nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d'un laboratoire égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ne s'applique qu'au regard de ceux de ces sites dans lesquels sont réalisés des examens de biologie médicale, à l'exclusion des sites dans lesquels s'exerce exclusivement une activité d'examens d'anatomie et de cytologie pathologiques.

6. En se fondant sur la circonstance que le fonctionnement du site situé 12, rue Maraussant à Narbonne, non ouvert au public, avait été autorisé pour l'activité d'anatomie et de cytologie pathologiques et non pour une activité d'examen de biologie médicale, qui n'était exercée qu'au sein des vingt-deux autres sites du laboratoire de biologie médicale Biomed 34, pour en déduire que le nombre de biologistes médicaux en exercice au sein du laboratoire, qui était égal au nombre de sites au sein desquels était exercée effectivement une activité de biologie médicale, était suffisant, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

8. Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens une somme de 3 000 euros à verser à la société Biomed 34. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées au même titre par le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens est rejeté.

Article 2 : Le conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens versera une somme de 3 000 euros à la société Biomed 34 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au conseil central de la section G de l'ordre national des pharmaciens, à la ministre du travail, de la santé et des solidarités et à la société d'exercice libéral par actions simplifiées Biomed 34.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 avril 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Jean-Dominique Langlais, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire ; M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes et Mme Anne Redondo, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 24 mai 2024.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

La rapporteure :

Signé : Mme Anne Redondo

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 474127
Date de la décision : 24/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - MÉDECINS - RÈGLES DIVERSES S'IMPOSANT AUX MÉDECINS DANS L'EXERCICE DE LEUR PROFESSION - BIOLOGIE MÉDICALE – ORGANISATION DES LABORATOIRES – 1) DÉSIGNATION D’UN MÉDECIN SPÉCIALISTE QUALIFIÉ EN ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES COMME CORESPONSABLE D’UN LABORATOIRE – LÉGALITÉ – EXISTENCE – 2) OBLIGATION DE COMPORTER AU MOINS AUTANT DE BIOLOGISTES MÉDICAUX EN EXERCICE QUE DE SITES – SITE – NOTION – EXCLUSION – SITES DANS LESQUELS NE SONT PAS RÉALISÉS DES EXAMENS DE BIOLOGIE MÉDICALE.

55-03-01-02 1) Un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques peut être désigné comme coresponsable d’un laboratoire de biologie médicale privé, alors même qu’il ne peut en être le représentant légal, qualité qu’une telle désignation ne lui confère pas....2) L’exigence, posée par l’article L. 6223-6 du code de la santé publique (CSP), d’un nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d’un laboratoire égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ne s’applique qu’au regard de ceux de ces sites dans lesquels sont réalisés des examens de biologie médicale, à l’exclusion des sites dans lesquels s’exerce exclusivement une activité d’examens d’anatomie et de cytologie pathologiques.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - PHARMACIENS - RÈGLES DIVERSES S'IMPOSANT AUX PHARMACIENS DANS L'EXERCICE DE LEUR PROFESSION - BIOLOGIE MÉDICALE – ORGANISATION DES LABORATOIRES – 1) DÉSIGNATION D’UN MÉDECIN SPÉCIALISTE QUALIFIÉ EN ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES COMME CORESPONSABLE D’UN LABORATOIRE – LÉGALITÉ – EXISTENCE – 2) OBLIGATION DE COMPORTER AU MOINS AUTANT DE BIOLOGISTES MÉDICAUX EN EXERCICE QUE DE SITES – SITE – NOTION – EXCLUSION – SITES DANS LESQUELS NE SONT PAS RÉALISÉS DES EXAMENS DE BIOLOGIE MÉDICALE.

55-03-04-03 1) Un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques peut être désigné comme coresponsable d’un laboratoire de biologie médicale privé, alors même qu’il ne peut en être le représentant légal, qualité qu’une telle désignation ne lui confère pas....2) L’exigence, posée par l’article L. 6223-6 du code de la santé publique (CSP), d’un nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d’un laboratoire égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ne s’applique qu’au regard de ceux de ces sites dans lesquels sont réalisés des examens de biologie médicale, à l’exclusion des sites dans lesquels s’exerce exclusivement une activité d’examens d’anatomie et de cytologie pathologiques.

SANTÉ PUBLIQUE - DIVERS ÉTABLISSEMENTS À CARACTÈRE SANITAIRE - LABORATOIRES D'ANALYSES DE BIOLOGIE MÉDICALE - 1) DÉSIGNATION D’UN MÉDECIN SPÉCIALISTE QUALIFIÉ EN ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES COMME CORESPONSABLE D’UN LABORATOIRE – LÉGALITÉ – EXISTENCE – 2) OBLIGATION DE COMPORTER AU MOINS AUTANT DE BIOLOGISTES MÉDICAUX EN EXERCICE QUE DE SITES – SITE – NOTION – EXCLUSION – SITES DANS LESQUELS S’EXERCE EXCLUSIVEMENT UNE ACTIVITÉ D’EXAMENS D’ANATOMIE ET DE CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES.

61-08-01 1) Un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques peut être désigné comme coresponsable d’un laboratoire de biologie médicale privé, alors même qu’il ne peut en être le représentant légal, qualité qu’une telle désignation ne lui confère pas....2) L’exigence, posée par l’article L. 6223-6 du code de la santé publique (CSP), d’un nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d’un laboratoire égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ne s’applique qu’au regard de ceux de ces sites dans lesquels sont réalisés des examens de biologie médicale, à l’exclusion des sites dans lesquels s’exerce exclusivement une activité d’examens d’anatomie et de cytologie pathologiques.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 mai. 2024, n° 474127
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Redondo
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474127.20240524
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