Vu la procédure suivante :
La société de droit allemand Warburg HIH Invest Real Estate GmbH a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2019, 2020 et 2021 dans les rôles de la commune de Saint-Maximin (Oise), à raison de locaux dont elle est propriétaire dans la zone d'aménagement concerté Les Longères des Haies. Par un jugement nos 2101529, 2201009 du 16 mars 2023, ce tribunal, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à concurrence de dégrèvements intervenus en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 juillet 2023, 17 octobre 2023 et 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Warburg HIH Invest Real Estate GmbH demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société Warburg Hih Invest Real Estate Gmbh ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 mars 2024, présentée par la société Warburg HIH Invest Real Estate GmbH.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Warburg HIH Invest Real Estate GmbH a été assujettie, dans les rôles de la commune de Saint-Maximin (Oise), à des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties à raison d'un magasin de grande surface, loué à une enseigne de bricolage, dont elle est propriétaire dans la zone d'aménagement concerté " Les Longères des Haies ", qui se compose notamment d'une surface de vente close et couverte de près de 9 000 m2, d'une surface de vente extérieure non couverte, dite " cour des matériaux ", de 2 400 m2 et d'une surface de vente extérieure sous auvent de 1 156 m2. L'administration fiscale n'ayant pas fait droit aux réclamations par lesquelles cette société a demandé l'application, pour la détermination de la valeur locative de ces locaux, d'un coefficient de pondération de 0,5 aux surfaces extérieures de vente sous auvent et de 0,2 aux surfaces de vente extérieures non couvertes, ainsi que la réduction par voie de conséquence des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties mises à sa charge au titre des années 2019, 2020 et 2021, cette société a saisi le tribunal administratif d'Amiens de demandes tendant à ce qu'il prononce une telle réduction. Elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 16 mars 2023 de ce tribunal en tant que celui-ci, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à concurrence de dégrèvements intervenus en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " I. - La valeur locative de chaque propriété bâtie ou fraction de propriété bâtie, autres que les locaux mentionnés au I de l'article 1496, que les établissements industriels mentionnés à l'article 1499 et que les locaux dont la valeur locative est déterminée dans les conditions particulières prévues à l'article 1501, est déterminée selon les modalités prévues au II ou III du présent article. / Les propriétés mentionnées au premier alinéa sont classées dans des sous-groupes, définis en fonction de leur nature et de leur destination. A l'intérieur d'un sous-groupe, elles sont classées par catégories, en fonction de leur utilisation, de leurs caractéristiques physiques, de leur situation et de leur consistance. Les sous-groupes et catégories de locaux sont déterminés par décret en Conseil d'Etat. / II. - A. - La valeur locative de chaque propriété bâtie ou fraction de propriété bâtie mentionnée au I est déterminée en fonction de l'état du marché locatif (...). / Elle est obtenue par application d'un tarif par mètre carré déterminé conformément au 2 du B du présent II à la surface pondérée du local définie au C du présent II. / B. - (...) / 2. Les tarifs par mètre carré sont déterminés sur la base des loyers moyens constatés dans chaque secteur d'évaluation par catégorie de propriétés. (...) / C. - La surface pondérée d'un local est obtenue à partir de la superficie de ses différentes parties, réduite, le cas échéant, au moyen de coefficients fixés par décret, pour tenir compte de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques respectives. (...) ". Aux termes de l'article 310 Q de l'annexe II au même code : " Pour l'application du second alinéa du I de l'article 1498 du code général des impôts, les propriétés bâties mentionnées au premier alinéa de ce même I sont classées selon les sous-groupes et catégories suivants : / Sous-groupe I : magasins et lieux de vente : (...) / Catégorie 5 : magasins de très grande surface (surface principale supérieure ou égale à 2 500 m2). (...) ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au même code : " Pour l'application du C du II de l'article 1498 du code général des impôts, la surface pondérée d'un local est la somme, le cas échéant arrondie au mètre carré inférieur, des superficies de ses différentes parties, affectées, le cas échéant, du coefficient mentionné au troisième alinéa. (...) / Lorsque l'une de ces parties a une valeur d'utilisation réduite par rapport à l'affectation principale du local, la superficie de cette partie est réduite par application d'un coefficient fixé à 0,5 lorsque cette partie est couverte et à 0,2 dans le cas contraire ". Il résulte de ces dispositions que, pour le calcul de la valeur locative d'une propriété bâtie relevant de l'article 1498 du code général des impôts, les coefficients de pondération de superficie mentionnés à l'article 324 Z de l'annexe III précité ne sont pas applicables aux surfaces utilisées pour une activité correspondant à l'affectation principale de ce local, appréciée au regard de la catégorie dans laquelle il est classé.
3. Il en résulte qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des faits non entachée de dénaturation, que les parties du local en litige auxquelles la société Warburg HIH Real Estate GmbH demandait l'application des coefficients de pondération mentionnés au troisième alinéa de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts étaient accessibles au public et affectées à la vente, de sorte que leur utilisation correspondait à l'affectation principale de ce local, classé dans la catégorie " magasins de très grande surface " du sous-groupe " magasins et lieux de vente ", le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'elles devaient, pour ce motif, être prise en compte sans pondération, sans qu'ait d'incidence leur caractère clos ou couvert.
4. Par ailleurs, le tribunal s'étant seulement fondé sur le motif précédent pour rejeter la demande de la société Warburg HIH Real Estate GmbH, celle-ci ne saurait utilement soutenir qu'il aurait commis une erreur de droit en se fondant sur la circonstance, au demeurant constante, que la valeur locative des locaux retenue pour établir les impositions en litige avait été déterminée à partir de sa propre déclaration.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Warburg HIH Real Estate GmbH n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société Warburg HIH Real Estate GmbH est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Warburg HIH Real Estate GmbH et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 27 mars 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Philippe Ranquet, Mme Nathalie Escaut, Mme Sylvie Pellissier, conseillers d'Etat et M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 26 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Vincent Mahé
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle