Vu la procédure suivante :
La société civile immobilière Le Mas Tissot et M. G... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 16 octobre 2018 par lequel le maire de La Tronche a accordé à M. B... C... et à Mme D... A... un permis de construire une maison d'habitation, ainsi que la décision du 13 février 2019 rejetant leur recours gracieux. Ce permis de construire a été transféré à M. F... H... par un arrêté du 20 mai 2019 du maire de La Tronche.
Par un premier jugement n° 1902558 du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois, en vue de permettre la régularisation des vices entachant le permis de construire, tenant, d'une part, à l'absence de motivation, dans la demande de permis de construire et notamment dans la notice explicative, du choix de prévoir une clôture minérale, en méconnaissance de l'article Up 11 du règlement du plan local d'urbanisme, et, d'autre part, à la méconnaissance, par la solution de gestion de l'excès des eaux pluviales mise en œuvre, des dispositions de l'article Up 4.2 du règlement du plan local d'urbanisme.
Un permis de construire modificatif a été délivré le 1er mars 2022 à M. H... et versé à l'instance, dont les requérants ont également demandé l'annulation pour excès de pouvoir.
Par un second jugement n° 1902558 du 14 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire du 16 octobre 2018, la décision du 13 février 2019, ainsi que le permis modificatif délivré le 1er mars 2022.
Par une ordonnance n° 23LY00123 du 13 février 2023, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 13 janvier 2023 au greffe de cette cour, présenté par M. H....
Par ce pourvoi, par un nouveau mémoire et par un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mai 2023 et 2 février 2024, M. H... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 novembre 2022 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société Le Mas Tissot et de M. E... ;
3°) de mettre à la charge de la société Le Mas Tissot et de M. E... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ariane Piana-Rogez, auditrice,
- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. H... et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société Le Mas Tissot et de M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 16 octobre 2018, le maire de La Tronche a délivré à M. C... et Mme A... un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation individuelle sur une parcelle située chemin de Chantemerle. Par un jugement du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble, saisi par la société Le Mas Tissot et M. E..., voisins du projet attaqué, d'un recours en excès de pouvoir tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que de la décision du 13 février 2019 rejetant leur recours gracieux, a sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement, dans l'attente d'un permis de construire modificatif régularisant notamment le vice tiré de la méconnaissance de l'article Up 4.2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, le défaut de réseau d'eaux pluviales à proximité de la parcelle obligeant le pétitionnaire à gérer l'ensemble des eaux pluviales affectant la parcelle, sans rejet possible dans le ruisseau voisin. Par un arrêté du 1er mars 2022, le maire de La Tronche a délivré à M. H..., auquel le permis initial avait été transféré, un permis de construire modificatif, dont la société Le Mas Tissot et M. E... ont également demandé l'annulation. Par un second jugement du 14 novembre 2022, contre lequel M. H... se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire initial du 16 octobre 2018, la décision du 13 février 2019 ainsi que le permis modificatif du 1er mars 2022 au motif que ce permis modificatif, s'il permettait de respecter les articles 6.4 et 9.4 des règles communes des dispositions générales et l'article 6.4 de la zone UD4 du plan local d'urbanisme intercommunal de Grenoble Alpes Métropole qui s'étaient substitués à l'article Up 4.2 du règlement du plan local d'urbanisme de La Tronche, méconnaissait les dispositions de l'article 3.4.2.1 du chapitre 2 du titre I du plan d'exposition aux risques de La Tronche et de l'article R. 111-2 du code l'urbanisme.
2. Aux termes de l'article 3.4.2.1 du chapitre 2 du titre I du règlement du plan d'exposition aux risques de la commune de La Tronche du 27 janvier 1989 applicable au secteur de Chantemerle inclus dans la zone B4 relative au glissement de terrain, annexé au plan local d'urbanisme intercommunal de Grenoble-Alpes-Métropole : " (...) Les eaux de surface doivent être collectées pour éviter toute infiltration. Un drainage efficace doit être mis en place autour des constructions (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le permis modificatif délivré le 1er mars 2022 en vue de la régularisation des vices identifiés par le jugement du 17 décembre 2021, tenant pour l'un d'entre eux à la méconnaissance de l'article Up 4.2 du plan local d'urbanisme de la commune, a modifié le dispositif de gestion des eaux pluviales du projet afin de respecter les articles 6.4 et 9.4 des règles communes des dispositions générales et l'article 6.4 de la zone UD4 du plan local d'urbanisme intercommunal de Grenoble Alpes Métropole, qui se sont substitués à l'article Up 4.2 du règlement du plan local d'urbanisme de La Tronche, prévoyant au sujet de la " Gestion des eaux pluviales et du ruissellement " que " Les aménagements extérieurs des constructions doivent contribuer à limiter l'imperméabilisation des sols et la réutilisation des eaux pluviales doit être privilégiée dans la conception et la réhabilitation des constructions (...) " et que " Les eaux pluviales doivent être gérées sur le terrain d'assiette du projet par tout dispositif approprié (noues, toitures végétalisées, tranchée infiltrantes, etc.) ". A été ajouté à la cuve de rétention de cinq mètres cubes, déjà prévue par le permis de construire du 16 octobre 2018, une tranchée d'infiltration d'une longueur de 15 mètres, d'une largeur et d'une profondeur de 2 mètres, munie de drains de répartition, en capacité de stocker un volume d'eaux pluviales de 18,3 mètres cubes et d'évacuer le surplus, en cas de pluie dépassant une période de retour trentennal, en surverse vers le ruisseau voisin.
4. Il en ressort également que ce type de dispositif de collecte et de stockage intermédiaire des eaux pluviales avant une infiltration très lente, comparable dans son principe à celui d'une cuve de rétention comme celle qui avait été prévue à l'origine et estimée par l'étude Kaéna à 0,05 litre par seconde, constitue un drainage efficace des eaux pluviales autour des constructions au sens de l'article 3.4.2.1 du chapitre 2 du titre I du règlement du plan d'expositions aux risques, dont les dispositions ne prescrivent pas un dispositif particulier. En jugeant néanmoins qu'un tel dispositif d'infiltration à la parcelle méconnaissait les dispositions de l'article 3.4.2.1 du chapitre 2 du titre I du plan d'exposition aux risques dont les prescriptions visent à éviter tout système d'infiltration concentrée et qu'il présentait un risque pour la sécurité au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le tribunal administratif, qui n'a en outre pas recherché si des prescriptions spéciales prévues par le permis modificatif délivré par le maire de La Tronche n'étaient pas de nature à en assurer la légalité au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, a, comme le soutient le pourvoi, implicitement jugé que seul un dispositif organisé sous forme de cuve de rétention répondrait aux exigences du règlement du plan d'exposition aux risques de La Tronche pour la collecte des eaux pluviales et a, ce faisant, commis une erreur de droit. Par suite, son jugement doit être annulé pour ce motif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Le Mas Tissot et de M. E... une somme de 1 500 euros à verser chacun à M. H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de M. H..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 14 novembre 2022 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Grenoble.
Article 3 : La société Le Mas Tissot et M. E... verseront chacun une somme de 1 500 euros à M. H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société Le Mas Tissot et M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. F... H... et à la société civile immobilière Le Mas Tissot, première dénommée, pour les deux défendeurs.
Copie en sera adressée à la commune de La Tronche.