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08/04/2024 | FRANCE | N°471738

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 08 avril 2024, 471738


Vu la procédure suivante :



L'association One Voice a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet des Alpes-de-Haute-Provence du 19 décembre 2022 autorisant la réalisation, jusqu'au 16 décembre 2027, de tirs de défense simple en vue de la protection des troupeaux du Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC) de la Borie contre la prédation du loup, sur le territoire de la commune de C

hâteauneuf-Val-Saint-Donat (Alpes-de-Haute-Provence). Par une ordonnance ...

Vu la procédure suivante :

L'association One Voice a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet des Alpes-de-Haute-Provence du 19 décembre 2022 autorisant la réalisation, jusqu'au 16 décembre 2027, de tirs de défense simple en vue de la protection des troupeaux du Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC) de la Borie contre la prédation du loup, sur le territoire de la commune de Châteauneuf-Val-Saint-Donat (Alpes-de-Haute-Provence). Par une ordonnance n° 2300598 du 13 février 2023, le juge des référés de ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 février et 15 mars 2023 et 18 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association One Voice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté interministériel du 23 octobre 2020 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (canis lupus) ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de l'association One Voice ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Marseille que le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a, par un arrêté du 19 décembre 2022, autorisé la réalisation, jusqu'au 16 décembre 2027, de tirs de défense simple en vue de la protection des troupeaux du Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC) de la Borie contre la prédation du loup (canis lupus) sur le territoire de la commune de Châteauneuf-Val-Saint-Donat. L'association One Voice se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 13 février 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté.

2. L'arrêté du 23 octobre 2020 pris par le ministre de la transition écologique et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, relatif aux conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction d'espèces animales protégées peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (canis lupus), précise les modalités selon lesquelles de telles dérogations peuvent être accordées en vue de la protection des troupeaux domestiques aux fins de prévenir et limiter les dommages occasionnés par les attaques des loups. Son article 14 prévoit que " Les tirs de défense simple peuvent intervenir dès lors que des mesures de protection sont mises en œuvre ou que le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé au sens du III de l'article 6 ". Le III de l'article 6 énonce que : " III. - On entend par " mise en œuvre " des mesures de protection, l'installation effective et proportionnée de moyens de prévention de la prédation par le loup dans le cadre de l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux portant sur la protection des troupeaux contre la prédation, en application de l'arrêté du 28 novembre 2019 susvisé, ou de mesures jugées équivalentes par les directions départementales des territoires (DDT) et des territoires et de la mer (DDTM). Sur la base d'une analyse technico-économique réalisée au cas par cas et soumise pour avis au préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup, un ou plusieurs troupeaux ou une partie d'un troupeau peuvent être reconnus comme ne pouvant être protégés par le préfet de département. (...) ". En vertu de ces dernières dispositions, un ou plusieurs troupeaux ou une partie d'un troupeau peuvent être reconnus comme ne pouvant être protégés, par le préfet de département, sur la base d'une analyse technico-économique réalisée au cas par cas et soumise pour avis au préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup. Cette analyse a notamment pour objet de déterminer si des mesures de protection sont susceptibles de constituer une alternative satisfaisante aux mesures de dérogation prévues par l'arrêté.

3. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

4. Pour rejeter la demande de suspension qui lui était soumise, le juge des référés du tribunal administratif a relevé qu'aucun moyen n'était, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.

5. En ne retenant pas comme créant un doute sérieux les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux quant à la condition tenant à l'absence d'autre solution satisfaisante, du défaut de saisine pour avis du préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup, de l'absence de risque avéré de dommages importants pour les bovins et d'exposition du troupeau de la Borie au risque de prédation du loup jusqu'au 16 décembre 2027, le juge des référés n'a entaché l'appréciation portée sur le caractère sérieux des moyens ni de dénaturation ni d'erreur de droit.

6. Il résulte de ce qui précède que l'association One Voice n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'association One Voice est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association One Voice, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au GAEC de la Borie.

Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 8 avril 2024.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

La rapporteure :

Signé : Mme Nathalie Destais

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 471738
Date de la décision : 08/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 avr. 2024, n° 471738
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nathalie Destais
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:471738.20240408
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