Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du centre d'action sociale de la Ville de Paris (CASVP) du 29 août 2019 prononçant sa radiation des cadres pour abandon de poste et qu'il lui soit enjoint de le réintégrer, d'autre part, d'annuler le titre de recettes d'un montant de 1 422,76 euros émis à son encontre le 25 mai 2019 par le CASVP et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme correspondante, enfin, d'annuler la décision du 19 mai 2020 par laquelle le CASVP a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé, ainsi que des congés maladie pris en conséquence depuis le 25 avril 2016. Par un jugement n°s 1923290/2-1, 2005037/2-1, 2010517/2-1 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 mai 2020 par laquelle le CASVP a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'état de santé de M. A..., ainsi que des congés maladie pris en conséquence depuis le 25 avril 2016, lui a enjoint de soumettre à la commission départementale de réforme la demande de reconnaissance d'imputabilité au service présentée par M. A... et a rejeté le surplus de ses demandes.
Par un arrêt n° 21PA02809 du 23 mars 2022, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de M. A..., annulé les articles 1er et 3 de ce jugement, annulé la décision du centre d'action sociale de la Ville de Paris du 29 août 2019 prononçant la radiation des cadres pour abandon de poste de M. A..., lui a enjoint de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification de son arrêt, à la réintégration de M. A... sur le poste qu'il occupait préalablement à sa radiation des cadres et a rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du titre de recettes émis.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 mai et 23 août 2022 et le 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le centre d'action sociale de la Ville de Paris demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er à 3 et 5 et 6 de cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Paul Levasseur, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat du centre d'action sociale de la Ville de Paris et à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. B... A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., agent social de 2e classe au centre d'action sociale de la Ville de Paris (CASVP), a été placé en congé maladie le 25 avril 2016, puis en disponibilité d'office pour raisons de santé à partir du 25 avril 2017. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 24 mai 2019, le CASVP l'a mis en demeure de reprendre ses fonctions à la suite de l'avis médical du 3 mai 2019 du médecin statutaire du centre qui estimait qu'il était " apte à la fonction publique ". M. A... a de nouveau été mis en demeure de reprendre son poste sous 48 heures sous peine de faire l'objet d'une mesure de radiation des cadres par courrier du 23 août 2019 dont il a accusé réception le 24 août 2019. M. A... n'ayant pas déféré à cette demande, il a été radié des cadres pour abandon de poste par un arrêté de la directrice adjointe du CASVP en date du 29 août 2019. Par un jugement du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 23 novembre 2017 plaçant M. A... en disponibilité d'office pour raisons de santé. Par un arrêté du 28 juin 2021, le CASVP a de nouveau placé M. A... en position de disponibilité d'office, à titre rétroactif, pour la période du 25 avril 2017 au 25 juin 2019. Puis, par une décision du 19 mai 2020, le CASVP a rejeté la demande de M. A... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son état de santé et des congés maladie pris depuis le 25 avril 2016. Enfin, le CASVP a émis, le 20 février 2020, un titre de recettes pour le recouvrement du traitement perçu par M. A... au titre du mois de janvier 2020. Par trois requêtes distinctes, M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 29 août 2019 prononçant sa radiation des cadres pour abandon de poste et d'enjoindre au CASVP de le réintégrer, d'autre part, d'annuler le titre de recettes du 27 février 2020 et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme réclamée, enfin, d'annuler la décision du 19 mai 2020. Par un jugement du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 mai 2020 par laquelle le CASVP a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'état de santé de M. A..., ainsi que des congés maladie pris en conséquence depuis le 25 avril 2016, enjoint au CASVP de soumettre à la commission départementale de réforme la demande de reconnaissance d'imputabilité au service présentée par M. A... et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Par un arrêt du 23 mars 2022, la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé les articles 1er et 3 du jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Paris, d'autre part, annulé la décision du CASVP du 29 août 2019 prononçant la radiation des cadres pour abandon de poste de M. A..., enfin, enjoint au CASVP de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification de son arrêt, à la réintégration de M. A... sur le poste qu'il occupait avant d'être radié des cadres. Le CASVP se pourvoit en cassation contre cet arrêt.
2. Aux termes de l'article 3 du décret du 30 juin 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa rédaction alors applicable : " Dans chaque département, un comité médical est constitué auprès du préfet. (...) ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " Le comité médical est chargé de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les questions médicales soulevées par l'admission des candidats aux emplois publics, l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue de ces congés, lorsqu'il y a contestation. / Il est consulté obligatoirement pour : (...) e) L'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après congé de maladie ou disponibilité d'office (...) ".
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. Le CASVP, qui ne conteste pas en cassation qu'il résultait des avis médicaux figurant au dossier des juges du fond que la question d'un aménagement du poste de travail de M. A... se posait au moment de sa réintégration après disponibilité d'office, soutient toutefois que le défaut de consultation du comité médical sur cet aménagement devait être regardé, dès lors qu'il était établi devant le juge qu'un tel aménagement n'était pas nécessaire, comme sans incidence sur la régularité de la procédure de réintégration de l'intéressé. Toutefois, l'obligation de consultation du comité médical pour l'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après disponibilité d'office, telle que prévue par les dispositions du e) de l'article 4 du décret du 30 juin 1987, citées au point 2, destinée à assurer que l'autorité territoriale prenne une décision de façon éclairée, est une garantie pour l'agent concerné, dont le respect s'impose indépendamment de l'appréciation ultérieurement portée sur la teneur ou la nécessité de l'aménagement demandé. Il s'ensuit qu'en jugeant, par un arrêt suffisamment motivé et qui n'est pas entaché de dénaturation des pièces du dossier, qu'en l'absence de consultation du comité médical, M. A... avait été effectivement privé de cette garantie et que, par suite, la décision prononçant sa radiation des cadres avait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.
5. Compte-tenu du motif d'annulation retenu par la cour, tiré de l'irrégularité de la procédure suivie pour prononcer la radiation des cadres de M. A..., c'est sans erreur de droit qu'elle a enjoint au CASVP de procéder à sa réintégration dans un délai d'un mois à compter de la notification de son arrêt.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CASVP une somme de 3 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de M. A... qui n'est pas, dans la présente instance, la patrie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du centre d'action sociale de la Ville de Paris est rejeté.
Article 2 : Le centre d'action sociale de la Ville de Paris versera la somme de 3 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au centre d'action sociale de la Ville de Paris et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat et M. Paul Levasseur, auditeur-rapporteur.
Rendu le 29 mars 2024.
Le président :
Signé : M. Stéphane Verclytte
Le rapporteur :
Signé : M. Paul Levasseur
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova