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12/03/2024 | FRANCE | N°488754

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 12 mars 2024, 488754


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision référencée " 48 SI " du 25 juillet 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et lui a enjoint de restituer ce titre.



Par une ordonnance n° 2303253 du 20 septembre 2023, le

juge des référés a fait droit à sa demande.



Par un pourvoi, enregis...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision référencée " 48 SI " du 25 juillet 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et lui a enjoint de restituer ce titre.

Par une ordonnance n° 2303253 du 20 septembre 2023, le juge des référés a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 6 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M. A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A..., titulaire depuis le 23 novembre 2022 d'un permis de conduire probatoire affecté de six points, a commis le 3 décembre 2022 l'infraction de conduite sous l'emprise de stupéfiants. M. A... a accepté une mesure de composition pénale, validée par une ordonnance du 3 février 2023 du tribunal judiciaire de Nîmes, comportant la remise de son permis de conduire au greffe du tribunal pour une durée de six mois et l'accomplissement d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière. Par une décision référencée " 48 SI " du 25 juillet 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a informé M. A... du retrait de six points de son permis de conduire, de la perte de validité de ce permis pour solde de points nul et lui a enjoint de restituer ce titre. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande l'annulation de l'ordonnance du 20 septembre 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu, sur la demande de M. A..., l'exécution de la décision du 25 juillet 2023.

3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

4. En particulier, lorsqu'est demandée la suspension d'une décision référencée " 48 SI " du ministre de l'intérieur prononçant l'invalidité d'un permis de conduire et une injonction de restitution de ce permis à l'intéressé, la condition d'urgence, qui doit s'apprécier objectivement et globalement, tient compte, d'une part, de l'atteinte grave et immédiate portée notamment à l'exercice de la profession du conducteur et, d'autre part, de la gravité et du caractère répété des infractions au code de la route commises par l'intéressé sur une brève période, ainsi que des exigences de protection et de sécurité routière.

5. Pour regarder la condition d'urgence comme remplie, le juge des référés a retenu qu'il ressortait des pièces du dossier, d'une part, que M. A... suivait depuis le 11 septembre 2023 une formation de conducteur routier de marchandises et que son contrat d'apprentissage devait débuter le 23 septembre 2023, d'autre part, que l'intéressé avait effectué, en exécution de la composition pénale, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. En se prononçant par ces motifs, sans tenir compte de l'argumentation circonstanciée par laquelle le ministre de l'intérieur faisait valoir les exigences de la protection et de la sécurité routière, il a insuffisamment motivé son ordonnance et commis une erreur de droit. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.

6. Il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

7. Pour demander la suspension de la décision de suspension qu'il conteste, M. A... soutient que le procès-verbal de la composition pénale mentionnée au point 2 ne mentionne pas que l'exécution de cette composition entraînera un retrait de six points sur son permis de conduire et qu'il n'a pas reçu l'information préalable prévue par les dispositions des article L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route. Ces moyens ne sont pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision du 25 juillet 2023. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, la demande de suspension présentée par M. A... ne peut qu'être rejetée.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. A... soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 20 septembre 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 15 février 2024 où siégeaient : Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 12 mars 2024.

La présidente :

Signé : Mme Fabienne Lambolez

La rapporteure :

Signé : Mme Sylvie Pellissier

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 488754
Date de la décision : 12/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 mar. 2024, n° 488754
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sylvie Pellissier
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:488754.20240312
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