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14/02/2024 | FRANCE | N°488354

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 14 février 2024, 488354


Vu les procédures suivantes :



Par une ordonnance n° 2202365 du 29 juillet 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, a enjoint aux sociétés X'TU Architecture, Peutz et Associés, Casson Mann Limited, L'Autobus Imperial, Sodifra Agencement, 8'18'', Edéis, L'Atelier d'Agencement, Ateliers Saint-André, Miner, Mecascenic, Multispe, Plafondecor et Videlio-Iec de justifier de la souscription d'une assurance de responsabilité décennale obligatoire dans un d

lai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Par u...

Vu les procédures suivantes :

Par une ordonnance n° 2202365 du 29 juillet 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, a enjoint aux sociétés X'TU Architecture, Peutz et Associés, Casson Mann Limited, L'Autobus Imperial, Sodifra Agencement, 8'18'', Edéis, L'Atelier d'Agencement, Ateliers Saint-André, Miner, Mecascenic, Multispe, Plafondecor et Videlio-Iec de justifier de la souscription d'une assurance de responsabilité décennale obligatoire dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Par une décision n° 466691 du 11 janvier 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, d'une part, annulé cette ordonnance en tant qu'elle concernait la société Casson Mann, et d'autre part, rejeté les conclusions de la demande présentée par la commune de Bordeaux devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux dirigées contre cette société.

La commune de Bordeaux a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux de procéder à la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par l'ordonnance n° 2202365 du 29 juillet 2022 à l'encontre des sociétés X'TU et Peutz et Associés. Par une ordonnance n° 2303196 du 31 août 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, en premier lieu, a décidé qu'il n'y avait pas lieu, en l'état, de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de la société X'TU, en second lieu, a condamné la société Peutz et Associés à verser à la commune de Bordeaux la somme de 40 200 euros, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par l'ordonnance du 29 juillet 2022, pour la période du 5 octobre 2022 au 30 juin 2023.

1° Sous le numéro 488354, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 septembre, 3 et 24 octobre 2023 et 19 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Peutz et Associés demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2303196 du 31 août 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la commune de Bordeaux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le numéro 488498, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 septembre et 9 octobre 2023 et le 2 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Bordeaux demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2303196 du 31 août 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la société Peutz et Associés et de la société X'TU la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 ;

- la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Peutz Et Associes, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Bordeaux et à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société X'TU ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par une ordonnance du 29 juillet 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a enjoint aux sociétés X'TU, Peutz et Associés, Casson Mann, L'Autobus Imperial, Sodifra Agencement, 8'18'', Edéis, L'Atelier d'Agencement, Ateliers Saint-André, Miner, Mecascenic, Multispe, Plafondecor et Videlio Iec de justifier de la souscription d'une assurance de responsabilité décennale obligatoire, dans un délai de deux mois à compter de la notification de cette ordonnance, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Par une décision du 11 janvier 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cette ordonnance en tant qu'elle concernait la société Casson Mann et rejeté la demande de la commune de Bordeaux en tant qu'elle était dirigée contre cette société. Cette ordonnance étant devenue définitive à l'égard des sociétés X'TU et Peutz et Associés, la commune de Bordeaux a demandé la liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de ces sociétés. Par une ordonnance du 31 août 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, procédé à la liquidation de l'astreinte à hauteur de 40 200 euros à l'encontre de la société Peutz et Associés et, d'autre part, rejeté la demande de liquidation de l'astreinte prononcée contre la société X'TU. La société Peutz et Associés et la commune de Bordeaux se pourvoient en cassation contre cette ordonnance, la première en tant qu'elle a procédé à la liquidation de l'astreinte à son encontre, la seconde en tant qu'elle a rejeté, d'une part, sa demande de liquidation de l'astreinte prononcée contre la société X'TU et, d'autre part, le surplus de sa demande de liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de la société Peutz et Associés.

2. Les pourvois de la société Peutz et Associés et de la commune de Bordeaux sont dirigés contre la même ordonnance. Il y a lieu de les joindre pour qu'ils fassent l'objet d'une même décision.

Sur le pourvoi de la société Peutz et Associés :

3. Aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ". La liquidation de l'astreinte à laquelle procède le juge des référés se rattache à la même instance contentieuse que celle qui a été ouverte par la demande d'astreinte, dont elle est le prolongement procédural. Le juge des référés, saisi en application de l'article L. 521-3 du code de justice administrative pour prendre en cas d'urgence toute mesure utile, peut se prononcer sans tenir d'audience publique. S'il décide de tenir une telle audience, il lui appartient, compte tenu des caractéristiques de cette procédure, d'en aviser les parties par tous moyens utiles, dans le respect du caractère contradictoire de la procédure, sans avoir à observer les règles fixées par l'article R. 711-2 du code de justice administrative.

4. La société Peutz et Associés soutient qu'elle n'a pas été convoquée à l'audience publique du 6 juillet 2023 organisée par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux pour liquider les astreintes assortissant l'injonction prononcées par l'ordonnance du 29 juillet 2022 à l'encontre des sociétés Peutz et associés et X'TU. Si l'ordonnance attaquée mentionne que " les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ", il ne ressort d'aucune des pièces de la procédure conduite devant le juge des référés que la société Peutz et associés aurait été convoquée à l'audience, à la différence des autres parties, la seule communication qui lui a été faite, au demeurant postérieure à l'audience, étant celle d'une copie de l'ordonnance du 29 juillet 2022. Dans ces conditions, la société Peutz et Associés est fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée a été rendue, en ce qui la concerne, au terme d'une procédure irrégulière.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que la société Peutz et Associés est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle la concerne.

Sur le pourvoi de la commune de Bordeaux :

En ce qui concerne la société Peutz et Associés :

6. La présente décision prononçant l'annulation de l'ordonnance du 31 août 2023 en tant qu'elle concerne la société Peutz et Associés, les conclusions du pourvoi de la commune de Bordeaux sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

En ce qui concerne la société X'TU :

7. En premier lieu, le juge de l'exécution saisi aux fins de liquidation d'une astreinte précédemment prononcée peut la modérer ou la supprimer, même en cas d'inexécution constatée, compte tenu notamment des diligences accomplies en vue de procéder à l'exécution de la chose jugée. Par suite, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en refusant de liquider l'astreinte à l'encontre de la société X'TU, alors même qu'il avait constaté que cette société n'avait pas exécuté l'ordonnance du 29 juillet 2022 et n'a, en tout état de cause, pas méconnu les dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, qui n'étaient pas applicables au litige.

8. En second lieu, il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que le juge des référés a rejeté la demande de liquidation d'astreinte concernant la société X'TU au motif que cette société avait produit deux attestations de responsabilité décennale obligatoire comportant les justifications exigées par le code des assurances, rappelées par l'ordonnance du 29 juillet 2022, à l'exception de la mention du montant final du coût de la construction. En jugeant que compte tenu des démarches accomplies par cette société, il n'y avait pas lieu, en l'état, de procéder à la liquidation provisoire de l'astreinte en ce qui la concerne, le juge des référés a suffisamment motivé son ordonnance et s'est livré à une appréciation souveraine des faits, exempte de dénaturation.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Bordeaux n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque en tant qu'elle concerne la société X'TU.

Sur les frais du litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société X'TU et de la société Peutz et Associés qui ne sont pas parties perdantes. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bordeaux la somme de 3 000 euros à verser, d'une part, à la société Peutz et Associés, et, d'autre part, à la société X'TU.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 31 août 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux est annulée en tant qu'elle concerne la société Peutz et Associés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux.

Article 3 : La commune de Bordeaux versera la somme de 3 000 euros, d'une part, à la société X'TU et, d'autre part, à la société Peutz et Associés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de la commune de Bordeaux en tant qu'il concerne la société Peutz et Associés. Le surplus des conclusions du pourvoi de la commune de Bordeaux est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Peutz et Associes, à la commune de Bordeaux et à la société X'TU.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 488354
Date de la décision : 14/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 fév. 2024, n° 488354
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Adam
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:488354.20240214
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