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06/02/2024 | FRANCE | N°470828

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 06 février 2024, 470828


Vu la procédure suivante :



Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 janvier, 24 avril et 4 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union Pirate de Rennes 2, l'association Union pour Rennes 2 et MM. A... B..., E... et C... D... demandent au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-1474 du 24 novembre 2022 portant création de l'Université de Rennes et approbation de ses statuts en tant qu'il attribue la dénomination

l'Université de Rennes à l'établissement public expérimental qu'il crée ;



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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 janvier, 24 avril et 4 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union Pirate de Rennes 2, l'association Union pour Rennes 2 et MM. A... B..., E... et C... D... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-1474 du 24 novembre 2022 portant création de l'Université de Rennes et approbation de ses statuts en tant qu'il attribue la dénomination l'Université de Rennes à l'établissement public expérimental qu'il crée ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que le décret attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, en ce qu'il attribue le nom " l'Université de Rennes " à l'établissement qu'il crée, alors que cet établissement ne s'est substitué qu'à la seule université Rennes-I, que le choix d'une telle dénomination ne correspond ni à la réalité historique, ni à la réalité géographique, et qu'il en résulte un risque de confusion réel au détriment de l'université Rennes-II.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2023, l'Université de Rennes conclut au rejet de la requête.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968 ;

- la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 ;

- la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 ;

- l'ordonnance n° 2018-1131 du 12 décembre 2018 ;

- le décret n° 70-1174 du 17 décembre 1970 ;

- le décret du 23 décembre 1970 portant érection d'universités et instituts nationaux polytechniques en établissements publics à caractère scientifique et culturel ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de l'Union Pirate de Rennes 2, de l'association Union pour Rennes 2, de M. A... B..., de M. E... et de M. C... D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que l'Université de Rennes a été fondée en 1896 pour regrouper alors, notamment, une école de médecine, la faculté de droit, la faculté des lettres et la faculté des sciences. Dans le cadre de la réforme opérée par la loi du 12 novembre 1968 d'orientation de l'enseignement supérieur, deux établissements d'enseignement supérieur issus de cette université ont été institués à Rennes et ont reçu, en application respectivement du décret du 17 décembre 1970 portant érection en établissements publics à caractère scientifique et culturel d'universités et centres universitaires et du décret du 23 décembre 1970 portant érection d'universités et instituts nationaux polytechniques en établissements publics à caractère scientifique et culturel, les dénominations d'université Rennes-II et d'université Rennes-I. Le décret du 24 novembre 2022 portant création de l'Université de Rennes et approbation de ses statuts a créé un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel expérimental, dénommé " l'Université de Rennes ", qui s'est substitué, à compter du 1er janvier 2023, à l'université Rennes-I et regroupe en outre, en tant qu'établissements-composantes qui conservent leur personnalité morale, l'Ecole des hautes études en santé publique, l'Ecole nationale supérieure de chimie de Rennes, l'Ecole normale supérieure de Rennes, l'Institut d'études politiques de Rennes et l'Institut national des sciences appliquées de Rennes.

2. L'Union Pirate de Rennes 2, l'association Union pour Rennes 2 et MM. A... B..., E... et C... D... demandent l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret du 24 novembre 2022 en ce qu'il attribue la dénomination l'Université de Rennes à l'établissement public expérimental qu'il crée.

3. Si les requérants contestent la dénomination ainsi donnée au nouvel établissement, en faisant notamment valoir qu'il en résulterait un risque de confusion au détriment de l'université Rennes-II, il ressort des pièces du dossier que l'université Rennes-I et l'université Rennes-II sont spécialisées, depuis leur création, dans des domaines académiques distincts, pour lesquels elles ont acquis chacune une notoriété propre, en particulier dans le droit, la science politique, la philosophie, l'économie-gestion, la santé, les sciences, la technologie et l'ingénierie pour la première, dans les sciences humaines et sociales, les arts, les langues ainsi que les sciences et techniques des activités physiques et sportives pour la seconde, de telle sorte que la dénomination retenue pour le nouvel établissement n'apparaît pas de nature à induire en erreur les étudiants, personnels ou partenaires français et étrangers des universités rennaises. Il ressort en outre des pièces du dossier que le décret attaqué, en créant le nouvel établissement, a procédé à un large regroupement d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche situés à Rennes et que l'université Rennes II a décidé de demeurer en dehors de ce regroupement tout en y étant associée, l'article 14 des statuts du nouvel établissement, approuvés par le décret attaqué, prévoyant une convention d'association entre l'Université de Rennes et l'université Rennes II pour organiser les modalités de concertation et d'articulation entre les deux établissements. Dans ces circonstances, le choix, retenu par le décret attaqué, de la dénomination l'Université de Rennes pour le nouvel établissement public expérimental résultant de ce regroupement d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par l'Université de Rennes et la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, que les conclusions de la requête doivent être rejetées, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'Union Pirate de Rennes 2 et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union Pirate de Rennes 2, première requérante dénommée, au Premier ministre, à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et à l'Université de Rennes.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 470828
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR MANIFESTE - ABSENCE - DÉNOMINATION D’« UNIVERSITÉ DE RENNES » ATTRIBUÉE À L'ÉTABLISSEMENT ISSU DE LA FUSION DE SIX ÉTABLISSEMENTS UNIVERSITAIRES RENNAIS [RJ1].

01-05-04-02 Dénomination « université de Rennes » attribuée à un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel expérimental, qui s’est substitué à l’université Rennes-I et regroupe en outre, en tant qu’établissements-composantes qui conservent leur personnalité morale, cinq autres établissements universitaires....Requérants contestant la dénomination ainsi donnée au nouvel établissement, en faisant notamment valoir qu’il en résulterait un risque de confusion au détriment de l’université Rennes-II....L’université Rennes-I et l’université Rennes-II sont spécialisées, depuis leur création, dans des domaines académiques distincts, pour lesquels elles ont acquis chacune une notoriété propre, en particulier dans le droit, la science politique, la philosophie, l’économie-gestion, la santé, les sciences, la technologie et l’ingénierie pour la première, dans les sciences humaines et sociales, les arts, les langues ainsi que les sciences et techniques des activités physiques et sportives pour la seconde, de telle sorte que la dénomination retenue pour le nouvel établissement n’apparaît pas de nature à induire en erreur les étudiants, personnels ou partenaires français et étrangers des universités rennaises. ...En outre, le nouvel établissement est issu d’un large regroupement d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche situés à Rennes. L’université Rennes-II a décidé de demeurer en dehors de ce regroupement tout en y étant associée, l’article 14 des statuts du nouvel établissement, approuvés par le décret attaqué, prévoyant une convention d’association entre l’Université de Rennes et l’université Rennes-II pour organiser les modalités de concertation et d’articulation entre les deux établissements. ...Dans ces circonstances, absence d’erreur manifeste d’appréciation.

ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET GRANDES ÉCOLES - UNIVERSITÉS - CRÉATION ET SUPPRESSION DES UNIVERSITÉS - DÉNOMINATION D’« UNIVERSITÉ DE RENNES » ATTRIBUÉE À L'ÉTABLISSEMENT ISSU DE LA FUSION DE SIX ÉTABLISSEMENTS UNIVERSITAIRES RENNAIS – ERREUR MANIFESTE D’APPRÉCIATION – ABSENCE [RJ1].

30-02-05-01-02 Dénomination « université de Rennes » attribuée à un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel expérimental, qui s’est substitué à l’université Rennes-I et regroupe en outre, en tant qu’établissements-composantes qui conservent leur personnalité morale, cinq autres établissements universitaires....Requérants contestant la dénomination ainsi donnée au nouvel établissement, en faisant notamment valoir qu’il en résulterait un risque de confusion au détriment de l’université Rennes-II....L’université Rennes-I et l’université Rennes-II sont spécialisées, depuis leur création, dans des domaines académiques distincts, pour lesquels elles ont acquis chacune une notoriété propre, en particulier dans le droit, la science politique, la philosophie, l’économie-gestion, la santé, les sciences, la technologie et l’ingénierie pour la première, dans les sciences humaines et sociales, les arts, les langues ainsi que les sciences et techniques des activités physiques et sportives pour la seconde, de telle sorte que la dénomination retenue pour le nouvel établissement n’apparaît pas de nature à induire en erreur les étudiants, personnels ou partenaires français et étrangers des universités rennaises. ...En outre, le nouvel établissement est issu d’un large regroupement d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche situés à Rennes. L’université Rennes-II a décidé de demeurer en dehors de ce regroupement tout en y étant associée, l’article 14 des statuts du nouvel établissement, approuvés par le décret attaqué, prévoyant une convention d’association entre l’Université de Rennes et l’université Rennes-II pour organiser les modalités de concertation et d’articulation entre les deux établissements. ...Dans ces circonstances, absence d’erreur manifeste d’appréciation.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 fév. 2024, n° 470828
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Fradel
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:470828.20240206
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