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05/02/2024 | FRANCE | N°471879

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 05 février 2024, 471879


Vu la procédure suivante :



Par une décision du 13 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission partielle des conclusions du pourvoi de M. C... B... A... et Mme D... B... A... dirigées contre l'arrêt n° 20MA04710 du 6 janvier 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il statue sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

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Vu les autres pièces du dossier ;



Vu :

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Vu la procédure suivante :

Par une décision du 13 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission partielle des conclusions du pourvoi de M. C... B... A... et Mme D... B... A... dirigées contre l'arrêt n° 20MA04710 du 6 janvier 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il statue sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M. et Mme B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'entreprise individuelle de maçonnerie exploitée par M. B... A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2012 à 2014, à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié, le 11 décembre 2015, pour l'exercice clos de 2012, et le 30 novembre 2016, pour les exercices clos en 2013 et 2014, des propositions de rectification portant sur les bénéfices industriels et commerciaux tirés, au titre de ces exercices, de cette activité. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus en résultant au titre de l'année 2012 ont fait l'objet d'une proposition de rectification adressée à M. et Mme B... A... le 11 décembre 2015. Ces derniers ont fait, par ailleurs, l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2013 et 2014 à l'issue duquel, après notification d'une proposition de rectification du 12 décembre 2016, ils ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2014, assorties de pénalités. M. et Mme B... A... se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 6 janvier 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'ils avaient formé contre le jugement du 3 novembre 2020 du tribunal administratif de Bastia rejetant leur demande tendant à la décharge des impositions auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes. Par une décision du 13 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi dirigé contre cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur les impositions supplémentaires et pénalités établies au titre de l'année 2012.

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration, pour les revenus imposables selon un régime réel dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux et des bénéfices agricoles ainsi que pour les revenus imposables à l'impôt sur les sociétés des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, et des sociétés à responsabilité limitée, des exploitations agricoles à responsabilité limitée et des sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont l'associé unique est une personne physique, s'exerce jusqu'à la fin de la deuxième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable est adhérent d'un centre de gestion agréé ou d'une association agréée, pour les périodes au titre desquelles le service des impôts des entreprises a reçu une copie du compte rendu de mission prévu aux articles 1649 quater E et 1649 quater H du code général des impôts. Cette réduction de délai ne s'applique pas aux contribuables pour lesquels des pénalités autres que les intérêts de retard auront été appliquées sur les périodes d'imposition non prescrites visées au présent alinéa ". Il résulte de ces dispositions que, sous réserve du respect des autres conditions qu'elles posent, le contribuable adhérent d'un centre de gestion agréé ou d'une association agréée bénéficie du délai de reprise abrégé pour l'imposition des revenus entrant dans leur champ dont il dispose au titre d'une année d'imposition déterminée, sauf si, avant l'expiration du délai de reprise de droit commun afférent à cette année, ce contribuable se voit appliquer des pénalités, autres que des intérêts de retard, au titre d'une année d'imposition non prescrite compte tenu de ce délai abrégé. L'application de telles pénalités postérieurement à l'expiration du délai de reprise de droit commun applicable à l'année d'imposition concernée ne saurait avoir pour effet de rendre ce même délai rétrospectivement applicable à l'imposition des revenus en cause.

3. Pour juger que les bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2012 pouvaient faire l'objet d'une proposition de rectification en 2015 en application du délai de reprise de droit commun, la cour administrative d'appel de Marseille s'est fondée sur ce que des pénalités autres que des intérêts de retard avaient, par une proposition de rectification du 12 décembre 2016, été appliquées au titre de l'année 2014, pour laquelle le délai spécial de reprise n'était expiré ni à cette date, ni à celle de la notification à M. B... A... de la proposition de rectification relative aux bénéfices de son entreprise individuelle pour l'exercice clos en 2012 et a jugé dépourvue d'incidence la circonstance que ces pénalités avaient été appliquées postérieurement à l'expiration, le 31 décembre 2015, du délai de reprise de droit commun des impositions relatives l'année 2012. En statuant de la sorte, alors qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, l'application des pénalités postérieurement à l'expiration du délai de droit commun de reprise des impositions de l'années 2012 ne pouvait avoir pour effet de rendre ce délai rétrospectivement applicable à l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux en litige, la cour a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. et Mme B... A... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent en tant qu'il a statué sur leurs conclusions relatives aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus mises à leur charge au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Il résulte de l'instruction que, d'une part, M. B... A... remplissait au titre de l'année 2012 la condition d'adhésion à un organisme de gestion agréé prévue par le deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales et celle tenant à la réception par l'administration du compte rendu de mission mentionné par les mêmes dispositions, et que, d'autre part, à l'expiration du délai de reprise de droit commun afférent à cette année d'imposition, le 31 décembre 2015, aucune pénalité n'avait été prononcée au titre d'années non prescrites en application du délai spécial de reprise. M. B... A... est ainsi fondé à soutenir que le droit de reprise de l'administration afférent à l'imposition de ses bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2012 était atteint par la prescription à la date à laquelle lui a été notifié la proposition de rectification relative à ces bénéfices. Par suite, M. et Mme B... A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme B... A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 6 janvier 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille et le jugement du 3 novembre 2020 du tribunal administratif de Bastia sont annulés en tant qu'ils se prononcent sur les impositions supplémentaires établies au titre de l'année 2012, ainsi que sur les pénalités correspondantes.

Article 2 : M. et Mme B... A... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, ainsi que des pénalités correspondantes, mises à leur charge au titre de l'année 2012.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B... A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... B... A... et Mme D... B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 12 janvier 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Philippe Ranquet, Mme Nathalie Escaut, conseillers d'Etat, M. François-René Burnod, maître des requêtes et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 5 février 2024.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

La rapporteure :

Signé : Mme Ophélie Champeaux

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 471879
Date de la décision : 05/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - GÉNÉRALITÉS. - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT. - PRESCRIPTION. - DÉLAI SPÉCIAL DE REPRISE DE DEUX ANS APPLICABLE AUX ADHÉRENTS D’UN CENTRE DE GESTION OU D’UNE ASSOCIATION AGRÉÉ (2E AL. DE L'ART. L. 169 DU LPF) – CONDITION TENANT À L’ABSENCE D’APPLICATION DE SANCTIONS FISCALES SUR LES PÉRIODES D’IMPOSITION NON PRESCRITES – PORTÉE.

19-01-03-04 Il résulte du deuxième alinéa de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales (LPF) dans sa rédaction issue de l’article 129 de la loi de finances pour 2009 que, sous réserve du respect des autres conditions qu’il pose, le contribuable adhérent d’un centre de gestion agréé ou d’une association agréée bénéficie du délai de reprise abrégé pour l’imposition des revenus entrant dans leur champ dont il dispose au titre d’une année d’imposition déterminée, sauf si, avant l’expiration du délai de reprise de droit commun afférent à cette année, ce contribuable se voit appliquer des pénalités, autres que des intérêts de retard, au titre d’une année d’imposition non prescrite compte tenu de ce délai abrégé. L’application de telles pénalités postérieurement à l’expiration du délai de reprise de droit commun applicable à l’année d’imposition concernée ne saurait avoir pour effet de rendre ce même délai rétrospectivement applicable à l’imposition des revenus en cause.


Publications
Proposition de citation : CE, 05 fév. 2024, n° 471879
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:471879.20240205
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