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18/01/2024 | FRANCE | N°488133

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 18 janvier 2024, 488133


Vu la procédure suivante :



La société Pylos Emerainville a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 28 août 2018 par laquelle la commune d'Emerainville (Seine-et-Marne) a refusé de procéder au retrait du talus érigé sur la parcelle dont elle est propriétaire, située 44, boulevard de Beaubourg à Emerainville et de condamner la commune d'Emerainville à lui verser la somme de 4 824 423,78 euros en réparation des préjudices qu'elle estime subir du fait de l'implantation illégale de ce talus sur cette parcelle. Par un jugement

nos 1809115, 2005356 du 23 septembre 2021, le tribunal administratif de Mel...

Vu la procédure suivante :

La société Pylos Emerainville a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 28 août 2018 par laquelle la commune d'Emerainville (Seine-et-Marne) a refusé de procéder au retrait du talus érigé sur la parcelle dont elle est propriétaire, située 44, boulevard de Beaubourg à Emerainville et de condamner la commune d'Emerainville à lui verser la somme de 4 824 423,78 euros en réparation des préjudices qu'elle estime subir du fait de l'implantation illégale de ce talus sur cette parcelle. Par un jugement nos 1809115, 2005356 du 23 septembre 2021, le tribunal administratif de Melun a, d'une part, condamné la commune à verser à la société la somme de 36 568,18 euros et lui a enjoint de procéder au retrait complet du talus litigieux dans un délai de dix mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, d'autre part, condamné la société, une fois que la commune aura réalisé ces travaux, à lui verser une somme correspondant à 20 % de leur montant.

Par un arrêt nos 21PA05987, 21PA05990 du 21 juin 2023, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de la commune d'Emerainville et sur appel incident de la société Pylos Emerainville, en premier lieu, dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la commune à fin de sursis à exécution de ce jugement, en second lieu, d'une part, porté à 91 857,784 euros la somme que la commune a été condamnée à verser à la société et enjoint à la commune de procéder au retrait de l'ensemble de la hauteur du talus excédant la hauteur naturelle du sol situé sur la parcelle appartenant à la société, dans un délai de six mois et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, d'autre part, condamné la société, une fois que la commune aura réalisé ces travaux, à lui verser une somme correspondant au coût d'évacuation de 3 300 m3 de terres, enfin, rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 21 août et 2 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Emerainville demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Par une requête, enregistrée le 8 septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Emerainville demande au Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 821-5 du code de justice administrative, le sursis à exécution de cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Jau, auditeur,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de la commune d'Emerainville et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Pylos Emerainville ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 821-5 du code de justice administrative : " La formation de jugement peut, à la demande de l'auteur du pourvoi, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond ".

2. D'une part, l'arrêt attaqué a pour effet d'enjoindre à la commune d'Emerainville de procéder au retrait de l'ensemble de la hauteur du talus présent sur la parcelle de la société Pylos Emerainville excédant la hauteur naturelle du sol, dans un délai de six mois et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Il ressort des pièces du dossier que le coût total d'évacuation du talus litigieux tel qu'ordonné par cet arrêt peut être évalué à environ 3,5 millions d'euros. Dès lors, l'exécution de l'arrêt attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour la commune d'Emerainville compte tenu des incidences financières de cette opération au regard du budget de la commune.

3. D'autre part, en l'état de l'instruction, paraissent sérieux et, en l'espèce, de nature à justifier, outre l'annulation de l'arrêt attaqué, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond, notamment, les moyens tirés de ce que la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en jugeant que la société Pylos Emerainville pouvait engager la responsabilité sans faute de la commune et de ce que la cour a commis une erreur de droit et une erreur de qualification juridique en jugeant qu'aucun motif d'intérêt général ne justifiait l'abstention de la commune d'Emerainville de procéder au retrait du talus litigieux.

4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner le sursis à exécution de l'arrêt du 21 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Paris.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Pylos Emerainville présentées au titre de cet article.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le pourvoi de la commune d'Emerainville, il sera sursis à l'exécution de l'arrêt du 21 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Paris.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Pylos Emerainville au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Emerainville et à la société Pylos Emerainville.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 décembre 2023 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat et M. Nicolas Jau, auditeur-rapporteur.

Rendu le 18 janvier 2024.

Le président :

Signé : M. Stéphane Verclytte

Le rapporteur :

Signé : M. Nicolas Jau

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 488133
Date de la décision : 18/01/2024
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 18 jan. 2024, n° 488133
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Jau
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:488133.20240118
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