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10/11/2023 | FRANCE | N°467357

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 10 novembre 2023, 467357


Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Promobilia a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 9 août 2019 par lequel le maire de Perpignan a délivré à M. A... B... un permis de construire valant permis de démolir pour la construction d'un bâtiment de trois logements et la démolition d'une habitation existante et, d'autre part, la décision du 22 novembre 2019 par laquelle le maire de Perpignan a rejeté son recours gracieux. Par un jugement n° 2000535 du 16 mars 2021, le tribunal administra

tif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 21TL01857 d...

Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Promobilia a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 9 août 2019 par lequel le maire de Perpignan a délivré à M. A... B... un permis de construire valant permis de démolir pour la construction d'un bâtiment de trois logements et la démolition d'une habitation existante et, d'autre part, la décision du 22 novembre 2019 par laquelle le maire de Perpignan a rejeté son recours gracieux. Par un jugement n° 2000535 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 21TL01857 du 6 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a annulé le jugement puis, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté la demande présentée par la société Promobilia devant le tribunal administratif de Montpellier.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 8 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Promobilia demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Perpignan et de M. B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Redondo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de la société Promobilia, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la commune de Perpignan et à Me Balat, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 août 2019, le maire de Perpignan a délivré à M. B... un permis de construire valant permis de démolir pour la construction d'un bâtiment de trois logements et la démolition d'une construction d'habitation existante. Par un jugement du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la société Promobilia tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ainsi que de la décision du 22 novembre 2019 rejetant son recours gracieux. La société Promobilia se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 juillet 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Toulouse a, statuant par la voie de l'évocation, rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 451-2 du code de l'urbanisme, le dossier joint à la demande de permis de démolir comprend : " a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Un plan de masse des constructions à démolir ou, s'il y a lieu, à conserver ; / c) Un document photographique faisant apparaître le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée et leur insertion dans les lieux environnants ".

3. La circonstance que le dossier de demande d'autorisation d'urbanisme ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. En jugeant, pour écarter le moyen tiré de ce que le dossier de demande de permis de démolir ne comportait pas le plan de masse de la construction à démolir, que ce document ne constituait pas un des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, la cour, qui n'a en outre pas examiné si cette omission entachant le dossier avait été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable, a commis une erreur de droit.

5. En second lieu, l'article UB1 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Perpignan relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques prévoit que : " Les constructions doivent être implantées : / à l'alignement des voies publiques ou privées et de toutes autres emprises publiques. Toutefois lorsque la construction nouvelle s'insère entre deux constructions existantes qui sont en retrait, celle-ci peut s'aligner sur tout ou partie sur une des constructions existantes (...). Dans tous les cas l'implantation de toute construction sur les voies publiques ou privées doit respecter la règle de retrait par rapport à la hauteur relative L) ou = 2/3H. (...) ". Le cahier des définitions annexé à ce règlement précise, d'une part, que la hauteur absolue, notée " H " dans le règlement, " est mesurée à partir du niveau de la voie de desserte ou de la bordure de trottoir si elle existe, sinon à partir du terrain naturel, jusqu'au sommet de la construction ", d'autre part, que la hauteur de front de rue, notée " h " dans le règlement, correspond à la " hauteur des façades située en front de rue, appliquée dans une bande de trois mètres de l'alignement ou du retrait qui s'y substitue " et qu'elle est " mesurée à partir du niveau de la voie de desserte ou de la bordure de trottoir, sinon à partir du terrain naturel, jusqu'à l'égout du toit ", ensuite, que la hauteur relative " résulte de l'application des prospects " et, enfin, que le prospect est défini par l'expression du rapport entre la distance comptée horizontalement de tout point de la construction projetée au point le plus proche de la limite parcellaire ou, de l'alignement opposé de la voie ou emprise publique pour le calcul de la hauteur relative.

6. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de Perpignan que toute construction sur les voies publiques ou privées, en zone UB 1, doit respecter un retrait par rapport à l'alignement opposé de la voie ou emprise publique, que le règlement qualifie de " hauteur relative ", qui doit être supérieur ou égal aux 2/3 de la hauteur absolue de la construction, notée " H " dans le règlement, laquelle est mesurée à partir du niveau de la voie de desserte ou de la bordure de trottoir si elle existe, sinon à partir du terrain naturel, jusqu'au sommet de la construction.

7. Pour écarter le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux méconnaissait l'article UB1 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Perpignan, la cour administrative d'appel de Toulouse a jugé que le retrait de 5,90 mètres prévu par le projet, correspondant aux 2/3 de la hauteur de 8,85 mètres, qu'elle a qualifiée de " hauteur relative " alors qu'il s'agissait de la " hauteur en front de rue ", était suffisant. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en assimilant ainsi la hauteur de front de rue, notée " h " dans le règlement et mesurée jusqu'à l'égout du toit, et la hauteur absolue, notée " H " dans le règlement, elle a commis une erreur de droit.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Promobilia est fondée à demander pour ces motifs l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Perpignan et de M. B... le versement à la société Promobilia d'une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la société Promobilia, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 6 juillet 2022 de la cour administrative d'appel de Toulouse est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Toulouse.

Article 3 : La commune de Perpignan et M. B... verseront chacun une somme de 1 500 euros à la société Promobilia au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de M. B... et de la commune de Perpignan présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Promobilia, à M. A... B... et à la commune de Perpignan.

Délibéré à l'issue de la séance du 12 octobre 2023 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et Mme Anne Redondo, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 10 novembre 2023.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure :

Signé : Mme Anne Redondo

Le secrétaire :

Signé : M. Mickaël Lemasson


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 467357
Date de la décision : 10/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 nov. 2023, n° 467357
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Redondo
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD, LOISEAU, MASSIGNON ; SCP BAUER-VIOLAS - FESCHOTTE-DESBOIS - SEBAGH ; BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467357.20231110
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