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03/11/2023 | FRANCE | N°461297

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 03 novembre 2023, 461297


Vu la procédure suivante :

L'Institut coopératif du vin (ICV) a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision en date du 26 février 2019 par laquelle l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a rejeté sa demande d'aide aux investissements vitivinicoles pour la période 2014-2018. Par un jugement n° 1902071 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20MA04437 du 9 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de l'ICV, an

nulé ce jugement ainsi que la décision de FranceAgriMer du 26 février 2...

Vu la procédure suivante :

L'Institut coopératif du vin (ICV) a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision en date du 26 février 2019 par laquelle l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a rejeté sa demande d'aide aux investissements vitivinicoles pour la période 2014-2018. Par un jugement n° 1902071 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20MA04437 du 9 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de l'ICV, annulé ce jugement ainsi que la décision de FranceAgriMer du 26 février 2019, enjoint à FranceAgriMer de procéder au réexamen de la demande d'aide de l'ICV dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 9 février 2022, le 10 mai 2022 et le 13 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, FranceAgriMer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions d'appel de l'ICV ;

3°) de mettre à la charge de l'ICV une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 ;

- le règlement délégué (UE) 2016/1149 de la Commission du 15 avril 2016 ;

- le règlement d'exécution (UE) 2016/1150 de la Commission du 15 avril 2016 ;

- le décret n° 2013-172 du 25 février 2013 ;

- la décision de la directrice générale de FranceAgriMer n° INTV-GPASV-2017-57 du 27 juillet 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Thomas Pez-Lavergne, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer et à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de l'Institut coopératif du vin ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Institut coopératif du vin (ICV), union de coopératives pour le conseil et l'analyse du vin, créé en 1946, et qui a pour objet, d'une part, l'achat en vue de l'approvisionnement de ses seuls associés coopérateurs, des produits, équipements, instruments et animaux nécessaires à leurs exploitations, d'autre part, la réalisation à leur profit de missions de conseil et d'analyse portant sur la fabrication du vin, de prestations de formation, et le développement de produits nécessaires à la vinification, a formulé, le 8 février 2018, auprès de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) une demande d'aide en vue de la construction d'un nouveau centre œnologique. Cette demande a été rejetée par une décision de FranceAgriMer du 26 février 2019. Par un jugement du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête de l'ICV à l'encontre de cette décision. FranceAgriMer se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 décembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement ainsi que la décision du 26 février 2019 et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande d'aide déposée par l'ICV dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet arrêt.

2. Le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil, a prévu la mise en place de programmes d'aide nationaux pour les exercices financiers 2014-2018. Aux termes de l'article 50 de ce règlement : " 1. Une aide peut être accordée pour des investissements matériels ou immatériels dans les installations de transformation, l'infrastructure de vinification ainsi que les structures et instruments de commercialisation. Ces investissements visent à améliorer les performances globales de l'entreprise et son adaptation aux demandes du marché, ainsi qu'à accroître sa compétitivité, et concernent la production ou la commercialisation des produits de la vigne visée à l'annexe VII, partie II, y compris en vue d'améliorer les économies d'énergie, l'efficacité énergétique globale et les procédés durables. / (...) ". Aux termes du paragraphe 2 de l'article 40 du même règlement : " Les États membres assument la responsabilité des programmes d'aide et veillent à ce qu'ils soient cohérents sur le plan interne et à ce que leur conception et leur mise en œuvre se fassent avec objectivité, en tenant compte de la situation économique des producteurs concernés et de la nécessité d'éviter des différences de traitement injustifiées entre producteurs ". Aux termes de l'article 32 du règlement délégué (UE) 2016/1149 de la Commission, du 15 avril 2016, complétant le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les programmes nationaux de soutien au secteur vitivinicole et modifiant le règlement (CE) n° 555/2008 de la Commission : " Les bénéficiaires de l'aide visée à l'article 50 du règlement (UE) n°1308/2013 sont les entreprises vitivinicoles produisant ou commercialisant les produits visés à l'annexe VII, partie II, dudit règlement, des organisations de producteurs de vin, des associations de deux ou de plusieurs producteurs ou des organisations interprofessionnelles ". Aux termes de l'article 14 du règlement d'exécution (UE) 2016/1150 de la Commission du 15 avril 2016 portant modalités d'application du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les programmes d'aide nationaux dans le secteur vitivinicole : " Aux fins de l'aide visée à l'article 50 du règlement (UE) n°1308/2013, les États membres établissent des règles concernant la procédure de présentation des demandes qui comportent notamment des dispositions concernant : / a) les personnes physiques ou morales qui peuvent présenter des demandes conformément à l'article 32 (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er du décret n° 2013-172 du 25 février 2013 relatif au programme d'aide national au secteur vitivinicole pour les exercices financiers 2014 à 2018 : " Le programme d'aide national au secteur vitivinicole (...) pour les exercices financiers 2014 à 2018 est mis en œuvre par l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer). / A ce titre, sous réserve de l'article 2, le directeur général de l'établissement détermine notamment, après avis du conseil spécialisé intéressé : / 1° Les modalités de demande des aides, les conditions d'éligibilité aux aides, la procédure et les critères de sélection des demandes, le montant des aides attribuables et leurs modalités de paiement ; / (...) ".

4. Aux termes de l'article 2.1.1 de la décision de la directrice générale de FranceAgriMer n° INTV-GPASV-2017-57 du 27 juillet 2017, prise pour l'application de l'article 1er du décret du 25 février 2013 : " Les demandeurs éligibles sont (...) les entreprises vitivinicoles quelle que soit leur forme juridique (individuelle ou sociétaire) produisant ou commercialisant les produits [de la vigne,] visés à l'annexe VII, partie 2 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Conseil (cf. annexe 8), les organisations de producteurs de vin, les associations de producteurs ou organisations interprofessionnelles réalisant une opération de production, de transformation, de conditionnement ou de commercialisation des produits, dans le secteur des vins (...) ". Aux termes de l'article 2.1.2 de la même décision : " Les sociétés prestataires de service, exerçant une activité de production, de transformation, de conditionnement ou de stockage dans le secteur des vins peuvent bénéficier de l'aide du FEAGA [Fonds européen agricole de garantie], si elles sont détenues majoritairement par des personnes physiques ou morales exerçant en propre parallèlement aux activités de prestations de service et avant le dépôt de la demande d'aide, des activités de production, de transformation, de conditionnement ou de stockage dans le secteur des vins dont les produits sont énumérés à l'annexe VII, partie 2 du règlement (UE) n°1308/2013 du Conseil ".

5. La cour administrative d'appel de Marseille a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que l'ICV fournit à ses seuls associés coopérateurs des conseils à la vinification, des analyses œnologiques et des services propres à favoriser la mise en œuvre de tous procédés utiles à la bonne conservation et à la commercialisation de vins et autres produits vinicoles répondant aux marchés. En en déduisant, dès lors que ces opérations conduisent l'ICV, au-delà de la simple fourniture de conseils généraux ou d'analyses, à exercer en lieu et place de ses adhérents une partie des opérations participant de la production du vin, qu'elles induisent, par leur nature, son intervention directe dans la fabrication du vin et que l'ICV devait être regardé comme exerçant, au moins en partie, une activité de production dans le secteur des vins au sens et pour l'application de l'article 2.1.2 de la décision de la directrice générale n° INTV-GPASV-2017-57 du 27 juillet 2017, la cour n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique.

6. Il résulte de ce qui précède que FranceAgriMer n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'ICV, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de FranceAgriMer une somme de 3 000 euros à verser à l'ICV.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de FranceAgriMer est rejeté.

Article 2 : FranceAgriMer versera à l'Institut coopératif du vin la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) et à l'Institut coopératif du vin.

Délibéré à l'issue de la séance du 18 octobre 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, président de chambre ; M. Christian Fournier, M. Hervé Cassagnabère, M. Jonathan Bosredon, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 3 novembre 2023.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Géraud Sajust de Bergues

La secrétaire :

Signé : Mme Elsa Sarrazin


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 461297
Date de la décision : 03/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 nov. 2023, n° 461297
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Géraud Sajust de Bergues
Rapporteur public ?: M. Thomas Pez-Lavergne
Avocat(s) : SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:461297.20231103
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