Vu la procédure suivante :
La société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, de condamner solidairement les sociétés Dubois Jeanneau, aux droits de laquelle vient la société Atic-Architectes, Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, Vinet, Chagnaud Construction, aux droits de laquelle vient la société DG Construction, représentée par Me Senecal ès-qualités de mandataire liquidateur, Kemica, Bouchet TP, Eurovia, Bonnet, représentée par Me Dolley ès-qualités de mandataire liquidateur, Hervé Thermique, Cegelec, Crystal, aux droits de laquelle vient la société Eiffage Energie Thermique Ile-de-France, et Apave, à lui verser la somme de 1 305 621,86 euros au titre des désordres généralisés sur le carrelage des bassins et des plages intérieures et extérieures et des dommages consécutifs dans les sous-sols techniques du complexe aquatique Glisséo situé à Cholet, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du règlement et de leur capitalisation, en deuxième lieu, de condamner solidairement les sociétés Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, Cegelec et Girus à lui verser la somme de 154 052,72 euros au titre du dysfonctionnement de la production d'eau chaude mitigée sanitaire affectant le complexe, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du règlement et de leur capitalisation, en troisième lieu, de condamner solidairement les sociétés Dubois Jeanneau, aux droits de laquelle vient la société Atic-Architectes, Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, Vinet, Chagnaud Construction, aux droits de laquelle vient la société DG Construction représentée par Me Senecal, ès-qualités de mandataire liquidateur, Kemica, Bouchet TP, Eurovia, Bonnet, représentée par Me Dolley ès-qualités de mandataire liquidateur, Hervé Thermique, Cegelec, Crystal, aux droits de laquelle vient la société Eiffage Energie Thermique Ile-de-France, Gauriau et Apave à lui verser la somme de 165 215,08 euros au titre des désordres affectant l'édicule d'un toboggan, le bassin ludique extérieur et le sous-sol technique, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du règlement et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1710941 du 3 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.
Par un arrêt n° 20NT02746 du 3 juin 2022, la cour administrative d'appel de Nantes, sur appel de la SMABTP, après avoir pris acte du désistement de la SMABTP de son action à l'encontre de la société Eurovia, a annulé ce jugement et, statuant par la voie de l'évocation, rejeté la demande et le surplus de la requête d'appel de la SMABTP.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 5 août et le 7 novembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SMABTP demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Denieul, auditeur,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de la société Groupe Vinet, de la société Cegelec, de la société Kemica et de la société Comec, à la SCP le Bret-Desaché, avocat de la société Apave et à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Eiffage Energie Thermie Ile-de-France,
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la communauté d'agglomération du choletais (CAC) a entrepris, en 2004, la construction d'un complexe ludique et sportif sur le territoire de la commune de Cholet. Les travaux ont été réceptionnés le 12 décembre 2007 avec des réserves, qui ont été levées en partie, avec date d'effet au 12 décembre 2007. Postérieurement à la réception des travaux, la CAC a procédé auprès de son assureur à plusieurs déclarations de sinistres relatives à divers désordres affectant le complexe. La SMABTP, se prévalant de sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de la communauté d'agglomération du choletais, a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement les sociétés Octant Architecture, venant aux droits de la société Japac, Dubois Jeanneau, aux droits de laquelle vient la société Atic-Architectes, Groupe Vinet, Gauriau, Cegelec, Bonnet, Apave, Kemica, Eurovia, Crystal, aux droits de laquelle vient la société Eiffage Energie Thermique Ile-de-France, DG Construction, Chagnaud, Hervé Thermique, Bouchet TP et Comec à lui rembourser la somme de 1 622 889,66 euros déjà versée à la communauté d'agglomération du choletais, avec intérêts et capitalisation, ainsi que toute somme qu'elle viendrait à verser à la communauté d'agglomération au titre de déclarations de sinistre en cours d'instruction ou de désordres non garantis et contestés par le maitre d'ouvrage. Par un jugement du 1er juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté l'ensemble de sa demande pour irrecevabilité. Par un arrêt du 3 juin 2022, la cour administrative d'appel de Nantes, sur appel de la SMABTP, après avoir pris acte du désistement de la SMABTP de son action à l'encontre de la société Eurovia, a annulé ce jugement et, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté la demande et le surplus de la requête d'appel de la SMABTP.
2. En rejetant la demande de condamnation solidaire présentée par la SMABTP au motif qu'elle ne la mettait pas à même de distinguer parmi les parties visées celles devant être exclues de la condamnation solidaire recherchée et celles devant supporter la condamnation, alors qu'il lui appartenait de rechercher si, pour chacune des entreprises visées, des désordres de nature à engager sa responsabilité décennale lui étaient imputables, la cour a méconnu son office. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la SMABTP est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
3. Il y a lieu de mettre à la charge des sociétés Octant architecture, Groupe Vinet, Gauriau, Cegelec, Apave, Kemica, Eurovia Atlantique, Eiffage Energie Thermie Ile-de-France, Hervé Thermique, Bouchet TP, Comec, Atic Architectes, de Me Marc Senecal en qualité de liquidateur de la société DG Construction et de Me Dolley en qualité de liquidateur de la société Bonnet le versement conjoint de la somme de 3 000 euros à la SMABTP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la SMABTP, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 3 juin 2022 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : Les sociétés Octant architecture, Groupe Vinet, Gauriau, Cegelec, Apave, Kemica, Eurovia Atlantique, Eiffage Energie Thermie Ile-de-France, Hervé Thermique, Bouchet TP, Comec, Atic Architectes, Me Marc Senecal en qualité de liquidateur de la société Chagnaud DG Construction et Me Dolley en qualité de liquidateur de la société Bonnet verseront conjointement une somme de 3 000 euros à la SMABTP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, à la société Groupe Vinet, à la société Cegelec, à la société Apave, à la société Kemica, à la société Eiffage Energie Thermie Ile-de-France, à la société Comec, à la société Octant architecture, à la société Gauriau, à la société Eurovia Atlantique, à la société Hervé Thermique, à la société Bouchet TP, à la société Atic-Architectes, à Me Marc Senecal en qualité de liquidateur de la société Chagnaud DG Construction et à Me Dolley en qualité de liquidateur de la société Bonnet.