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09/08/2023 | FRANCE | N°455146

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 09 août 2023, 455146


Vu la procédure suivante :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 juillet 2020 par lequel le préfet des Alpes-de-Haute-Provence l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement n° 2002236 du 4 août 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 20MA03344 du 1er juin 2021, le président

assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a r...

Vu la procédure suivante :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 juillet 2020 par lequel le préfet des Alpes-de-Haute-Provence l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement n° 2002236 du 4 août 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 20MA03344 du 1er juin 2021, le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel de M. C... et la tierce opposition formée par l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Les pépinières de la Haute Provence contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 août et 2 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... et l'EARL Les pépinières de la Haute Provence demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-383/13 du 10 septembre 2013, C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. C... et autre ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C..., ressortissant tunisien, a été interpelé le 30 juillet 2020, au sein de l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) " Les Pépinières de la Haute Provence ", dans le cadre d'une mission de lutte contre le travail illégal, en possession d'un faux titre de séjour. Le même jour, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence lui a notifié un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination, en l'assortissant d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement du 4 août 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté. M. C... et l'EARL Les pépinières de la Haute Provence se pourvoient en cassation contre l'ordonnance du 1er juin 2021 par laquelle le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté l'appel et la tierce opposition qu'ils ont, respectivement, formés contre ce jugement.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance du droit à être entendu dans le cadre de la procédure d'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté, et qui est désormais repris à l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire ou pluriannuel et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé (...) ".

3. Ces dispositions, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Elles ne prévoient pas de droit pour un étranger à être entendu dans le cadre de la procédure de prise d'une décision l'obligeant à quitter le territoire français.

4. Ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé, notamment par son arrêt C-383/13 M. A..., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union européenne. Si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu. Ce droit, qui se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts, ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

5. Dans le cadre ainsi posé, et s'agissant plus particulièrement des décisions relatives au séjour des étrangers, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, dans ses arrêts C-166/13 Sophie Mukarubega du 5 novembre 2014 et C-249/13 Khaled Boudjlida du 11 décembre 2014 visés ci-dessus, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.

6. Enfin, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt du 10 septembre 2013 cité au point 4, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

7. En l'espèce, il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée qu'après avoir relevé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que M. C... avait été informé de l'intention du préfet de prendre à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français, le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a estimé qu'il ne ressortait pas non plus de ces pièces que les arguments que M. C... aurait pu avancer, relatifs au métier d'arboriculteur qu'il exerce, aux difficultés de recrutement dans ce secteur et au handicap de sa sœur, auraient pu influer sur le contenu de cette décision. En écartant ainsi ce moyen, après avoir constaté une irrégularité affectant le droit d'être entendu de M. C... et vérifié si cette irrégularité avait effectivement privé l'intéressé de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure aurait pu aboutir à un résultat différent, le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance par le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille de son office :

8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté, désormais repris aux articles L. 612-6 et suivants du même code : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...). / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) La durée de l'interdiction de retour (...) ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

9. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 511-1, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

10. Par suite, en jugeant que les requérants, qui se bornaient à invoquer les difficultés de recrutement dans l'arboriculture et la situation de dépendance de la sœur de M. C..., n'étaient pas fondés à soutenir que la décision portant interdiction de retour était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de ce dernier, le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas entaché son ordonnance d'une erreur de droit sur la portée du contrôle qu'il lui incombait d'exercer.

11. Enfin, contrairement à ce qui est soutenu, le président assesseur de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas fait un usage abusif des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative en rejetant la requête qui lui était soumise par ordonnance.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et autre ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. C... et autre est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... C..., à l'EARL Les pépinières de la Haute Provence et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré à l'issue de la séance du 5 juillet 2023 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 9 août 2023.

Le président :

Signé : M. Christophe Chantepy

Le rapporteur :

Signé : M. Cédric Fraisseix

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 455146
Date de la décision : 09/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - APPLICATION DU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANÇAIS - PRISE EN COMPTE DES ARRÊTS DE LA COUR DE JUSTICE - INTERPRÉTATION DU DROIT DE L’UNION - DIRECTIVE 2008/115/CE (« DIRECTIVE RETOUR ») – MÉCONNAISSANCE DU DROIT DES RESSORTISSANTS D'ÉTATS TIERS FAISANT L'OBJET D'UNE MESURE D'ÉLOIGNEMENT D'ÊTRE ENTENDUS [RJ1] – CONSÉQUENCE – 1) ILLÉGALITÉ SYSTÉMATIQUE DE LA DÉCISION PRISE – ABSENCE – 2) CRITÈRE – INFLUENCE SUR LE SENS DE LA DÉCISION.

15-03-03-01 1) Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. G., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l’exercice des droits de la défense lors d’une procédure administrative concernant un ressortissant d’un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d’être entendu n’est pas de nature à entacher systématiquement d’illégalité la décision prise. ...2) Il revient à l’intéressé d’établir devant le juge chargé d’apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu’il n’a pas pu présenter à l’administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d’une telle demande de vérifier, lorsqu’il estime être en présence d’une irrégularité affectant le droit d’être entendu, si, eu égard à l’ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l’invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - MÉCONNAISSANCE DU DROIT DES RESSORTISSANTS D'ÉTATS TIERS FAISANT L'OBJET D'UNE MESURE D'ÉLOIGNEMENT D'ÊTRE ENTENDUS [RJ1] – CONSÉQUENCE – 1) ILLÉGALITÉ SYSTÉMATIQUE DE LA DÉCISION PRISE – ABSENCE – 2) CRITÈRE – INFLUENCE SUR LE SENS DE LA DÉCISION.

15-05-002 1) Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. G., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l’exercice des droits de la défense lors d’une procédure administrative concernant un ressortissant d’un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d’être entendu n’est pas de nature à entacher systématiquement d’illégalité la décision prise. ...2) Il revient à l’intéressé d’établir devant le juge chargé d’apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu’il n’a pas pu présenter à l’administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d’une telle demande de vérifier, lorsqu’il estime être en présence d’une irrégularité affectant le droit d’être entendu, si, eu égard à l’ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l’invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - MÉCONNAISSANCE DU DROIT DES RESSORTISSANTS D'ÉTATS TIERS FAISANT L'OBJET D'UNE MESURE D'ÉLOIGNEMENT D'ÊTRE ENTENDUS [RJ1] – CONSÉQUENCE – 1) ILLÉGALITÉ SYSTÉMATIQUE DE LA DÉCISION PRISE – ABSENCE – 2) CRITÈRE – INFLUENCE SUR LE SENS DE LA DÉCISION.

15-05-045-03 1) Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. G., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l’exercice des droits de la défense lors d’une procédure administrative concernant un ressortissant d’un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d’être entendu n’est pas de nature à entacher systématiquement d’illégalité la décision prise. ...2) Il revient à l’intéressé d’établir devant le juge chargé d’apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu’il n’a pas pu présenter à l’administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d’une telle demande de vérifier, lorsqu’il estime être en présence d’une irrégularité affectant le droit d’être entendu, si, eu égard à l’ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l’invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

ÉTRANGERS - OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS (OQTF) ET RECONDUITE À LA FRONTIÈRE - OQTF ASSORTIE D'UNE INTERDICTION DE RETOUR – APPRÉCIATION DES CONSÉQUENCES DE LA MESURE SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE L’ÉTRANGER – INVOCATION DE CIRCONSTANCES ÉTRANGÈRES AUX QUATRE CRITÈRES POSÉS PAR LA LOI – CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR – CONTRÔLE RESTREINT [RJ2].

335-03 Lorsqu’il est saisi d’un moyen le conduisant à apprécier les conséquences d’une mesure d’interdiction de retour sur la situation personnelle de l’étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par le III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), désormais repris aux articles L. 612-6 et suivants du même code, il incombe seulement au juge de l’excès de pouvoir de s’assurer que l’autorité compétente n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.

ÉTRANGERS - OBLIGATION DE QUITTER LE TERRITOIRE FRANÇAIS (OQTF) ET RECONDUITE À LA FRONTIÈRE - LÉGALITÉ EXTERNE - PROCÉDURE - DIRECTIVE 2008/115/CE (« DIRECTIVE RETOUR ») – MÉCONNAISSANCE DU DROIT DES RESSORTISSANTS D'ÉTATS TIERS FAISANT L'OBJET D'UNE MESURE D'ÉLOIGNEMENT D'ÊTRE ENTENDUS [RJ1] – CONSÉQUENCE – 1) ILLÉGALITÉ SYSTÉMATIQUE DE LA DÉCISION PRISE – ABSENCE – 2) CRITÈRE – INFLUENCE SUR LE SENS DE LA DÉCISION.

335-03-01-01 1) Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. G., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l’exercice des droits de la défense lors d’une procédure administrative concernant un ressortissant d’un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d’être entendu n’est pas de nature à entacher systématiquement d’illégalité la décision prise. ...2) Il revient à l’intéressé d’établir devant le juge chargé d’apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu’il n’a pas pu présenter à l’administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d’une telle demande de vérifier, lorsqu’il estime être en présence d’une irrégularité affectant le droit d’être entendu, si, eu égard à l’ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l’invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE RESTREINT - CONSÉQUENCES D'UNE INTERDICTION DE RETOUR SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE L’ÉTRANGER À LA LUMIÈRE DE CIRCONSTANCES ÉTRANGÈRES AUX QUATRE CRITÈRES POSÉS PAR LA LOI [RJ2].

54-07-02-04 Lorsqu’il est saisi d’un moyen le conduisant à apprécier les conséquences d’une mesure d’interdiction de retour sur la situation personnelle de l’étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par le III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), désormais repris aux articles L. 612-6 et suivants du même code, il incombe seulement au juge de l’excès de pouvoir de s’assurer que l’autorité compétente n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.


Références :

[RJ1]

Rappr, dans le cas d'une OQTF prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, CE, 4 juin 2014, M. Halifa, n° 370515, p. 152 ;

dans le cas d’un refus de séjour accompagné d’une OQTF et suivi d’un placement en rétention, CE, 5 juin 2015, Ministre de l’intérieur c/ M. Ouda, n° 375423, T. pp. 578-581-708 ;

dans le cas du rejet d’une demande de réexamen d’une demande d’asile, CE, 9 novembre 2015, M. Arslanaliyev, n° 381171, T. pp. 559-575-578-579-581-829....

[RJ2]

Rappr., en matière de refus de régularisation d’un étranger, CE, Section, 4 février 2015, Ministre de l’intérieur c/ M. Cortes Ortiz, n°s 383267 383268, p. 17 ;

en matière de reconduite à la frontière, CE, 29 décembre 2000, Sacko, n° 210895, T. pp. 998-1041-1044 ;

CE, 17 octobre 2003, Préfet de Vaucluse c/ M. Kmet, n° 247865, T. p. 812. Comp., dans le cas où sont invoquées des circonstances résultant de l’un des quatre critères posés par la loi, CE, 12 mars 2012, M. Harounur, n° 354165, p. 83.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 aoû. 2023, n° 455146
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cédric Fraisseix
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP PIWNICA et MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:455146.20230809
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