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21/07/2023 | FRANCE | N°460102

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 21 juillet 2023, 460102


Vu la procédure suivante :

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 janvier, 4 avril et 18 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A..... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 5 octobre 2021 par laquelle le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, statuant en formation disciplinaire, lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un an dont six mois avec sursis, assortie de la sanction complémen

taire de déplacement d'office ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la ...

Vu la procédure suivante :

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 janvier, 4 avril et 18 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A..... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 5 octobre 2021 par laquelle le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, statuant en formation disciplinaire, lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un an dont six mois avec sursis, assortie de la sanction complémentaire de déplacement d'office ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision du 15 novembre 2022 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B... ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 3 septembre 2021, le président de la mission d'inspection des juridictions administratives a, en application des dispositions de l'article L. 236-4 du code de justice administrative, saisi le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, statuant en formation disciplinaire, de faits susceptibles de justifier que soit prononcée une sanction disciplinaire à l'encontre de Mme B..., première conseillère à la cour administrative d'appel de Paris. Par une décision du 5 octobre 2021, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel a infligé à Mme B... la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un an dont six mois avec sursis, l'assortissant, à titre de sanction complémentaire, d'un déplacement d'office. Mme B... a formé un pourvoi en cassation tendant à l'annulation de la décision du 5 octobre 2021.

Sur le cadre juridique :

2. De première part, aux termes de l'article L. 231-1 du code de justice administrative : " Les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel exercent leurs fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité et se comportent de façon à prévenir tout doute légitime à cet égard. / Ils s'abstiennent de tout acte ou comportement à caractère public incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions. / Ils ne peuvent se prévaloir, à l'appui d'une activité politique, de leur appartenance à la juridiction administrative ".

3. De deuxième part, en vertu des articles L. 232-2 et L. 236-3 du code de justice administrative, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel exerce le pouvoir disciplinaire à l'égard des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. Aux termes de l'article L. 232-4 du code de justice administrative : " Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel est présidé par le vice-président du Conseil d'Etat et comprend en outre : / 1° Le conseiller d'Etat, président de la mission d'inspection des juridictions administratives ; / 2° Le secrétaire général du Conseil d'Etat ; / 3° Le directeur chargé au ministère de la justice des services judiciaires ; / 4° Un chef de juridiction et un suppléant élus par leurs pairs ; / 5° Cinq représentants des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel à l'exception de ceux détachés dans le corps depuis moins de deux ans, élus au scrutin proportionnel de liste à raison : / a) D'un représentant titulaire et d'un suppléant pour le grade de conseiller ; / b) De deux représentants titulaires et de deux suppléants pour le grade de premier conseiller ; / c) De deux représentants titulaires et de deux suppléants pour le grade de président ; / 6° Trois personnalités choisies pour leurs compétences dans le domaine du droit en dehors des membres du Conseil d'Etat et des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et qui n'exercent pas de mandat parlementaire nommées respectivement par le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat.(... )". Aux termes de l'article

L. 236-4 du code de justice administrative : " Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel est saisi des faits motivant la poursuite disciplinaire par le président de la juridiction à laquelle est affecté le magistrat ou par le président de la mission d'inspection des juridictions administratives. / L'autorité de saisine ne peut assister au délibéré du Conseil supérieur ".

4. De troisième part, aux termes de l'article L. 236-5 du code de justice administrative : " La procédure devant le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel est contradictoire. / Le magistrat est informé par le président du Conseil supérieur, dès la saisine de cette instance, qu'il a droit à la communication intégrale de son dossier et des pièces de l'enquête préliminaire, s'il y a été procédé, et qu'il peut se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. / Le président de la mission d'inspection des juridictions administratives est chargé de rapporter l'affaire devant le Conseil supérieur, sauf s'il est l'auteur de la saisine. Dans ce dernier cas, le président du Conseil supérieur désigne un rapporteur parmi les autres membres du Conseil. / Le rapporteur procède, s'il y a lieu, à une enquête, et accomplit tous actes d'investigation utiles. Il peut en tant que de besoin faire appel à l'assistance du secrétariat général des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. Au cours de l'enquête, il entend l'intéressé et, s'il y a lieu, le plaignant et les témoins. Il ne prend pas part au vote intervenant sur le rapport qu'il présente devant le Conseil supérieur ". Aux termes de l'article R. 236-2 du code de justice administrative : " Lorsque le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel examine l'affaire au fond, son président informe les membres du conseil des conditions dans lesquelles le magistrat poursuivi a été mis en mesure d'exercer son droit à communication intégrale du dossier individuel et des documents annexes. / Le rapporteur présente son rapport devant le Conseil supérieur. / Le Conseil supérieur entend séparément chaque témoin cité. / A la demande d'un membre du Conseil supérieur, ou du magistrat poursuivi, le président peut décider de procéder à une confrontation des témoins, ou à une nouvelle audition d'un témoin déjà entendu. / Le magistrat poursuivi peut, à tout moment de la procédure, demander au président du Conseil supérieur l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Il doit être invité à présenter d'ultimes observations avant que le Conseil supérieur ne commence à délibérer hors la présence du magistrat poursuivi ". Aux termes de l'article R. 236-3 du code de justice administrative : " Lorsque le Conseil supérieur a constaté l'existence d'une faute disciplinaire dans les conditions prévues à l'article L. 236-6, son président met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées au cours du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions par ordre décroissant de sévérité jusqu'à ce que l'une d'entre elles recueille la majorité des membres présents. A défaut, aucune sanction n'est prononcée ". Enfin, selon le dernier alinéa de l'article L. 236-6 du même code, la décision du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel statuant en matière disciplinaire " ne peut faire l'objet que d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat ".

5. De quatrième part, aux termes de l'article L. 236-1 du code de justice administrative : " Les sanctions disciplinaires applicables aux magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont réparties en quatre groupes. / 1° Premier groupe : / a) L'avertissement ; / b) Le blâme ; / 2° Deuxième groupe : / a) La radiation du tableau d'avancement ou de la liste d'aptitude ; / b) L'abaissement d'échelon ; / c) Le retrait de certaines fonctions ; / d) L'exclusion temporaire des fonctions dans la limite de six mois ; / e) Le déplacement d'office ; / 3° Troisième groupe / a) La rétrogradation ; / b) L'exclusion temporaire des fonctions pour une durée de plus de six mois à deux ans ; / 4° Quatrième groupe : / a) La mise à la retraite d'office ; / b) La révocation. / Parmi les sanctions du premier groupe, seul le blâme est inscrit au dossier du magistrat. Il est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. / Le déplacement d'office et la radiation du tableau d'avancement peuvent également être prononcés à titre de sanction complémentaire d'une des sanctions des deuxième et troisième groupes. / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. Celui-ci ne peut avoir pour effet, dans le cas de l'exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, de ramener la durée de cette exclusion à moins de un mois. L'intervention d'une sanction disciplinaire du deuxième ou troisième groupe pendant une période de cinq ans après le prononcé de l'exclusion temporaire entraîne la révocation du sursis. En revanche, si aucune sanction disciplinaire, autre que l'avertissement ou le blâme, n'a été prononcée durant cette même période à l'encontre de l'intéressé, ce dernier est dispensé définitivement de l'accomplissement de la partie de la sanction pour laquelle il a bénéficié du sursis ".

Sur la régularité de la procédure suivie devant le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel :

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, statuant en matière disciplinaire, que, par un courriel du 20 juillet 2021, le président de la cour administrative d'appel de Paris a porté à la connaissance du président de la mission d'inspection des juridictions administratives des faits imputés à Mme B... sur lesquels il s'était entretenu avec elle, Mme B... n'en contestant pas la matérialité. Le président de la mission d'inspection des juridictions administratives, après avoir entendu Mme B... le 3 septembre 2021, a, le même jour, adressé au vice-président du Conseil d'Etat un rapport écrit saisissant le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel en application des dispositions de l'article

L. 236-4 du code de justice administrative cité au point 3. Le 3 septembre 2021, le vice-président du Conseil d'Etat informait Mme B... de son droit à communication intégrale de son dossier et des pièces afférentes à la procédure disciplinaire et la convoquait à une audience du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Mme B... a reçu communication le 16 septembre 2021 du rapport établi par le président de la mission d'inspection des juridictions administratives, ce rapport mentionnant qu'elle avait reconnu les faits reprochés lorsqu'elle avait été entendue par le président de la cour administrative d'appel de Paris. Mme B... a ensuite consulté son dossier administratif le 30 septembre 2021.

7. Mme B... fait valoir qu'elle n'a pas eu accès à l'ensemble des pièces de son dossier individuel et des pièces de l'enquête préliminaire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 236-5 du code de justice administrative cité au point 4. Il résulte des pièces de la procédure suivie devant la juridiction disciplinaire que Mme B..., ainsi qu'il a été dit au point 6, a pu consulter son dossier administratif et a été destinataire du rapport du président de la mission d'inspection des juridictions administratives ayant saisi cette juridiction. En revanche, elle n'a pas été mise en mesure de prendre connaissance du courriel, en date du

20 juillet 2021, par lequel le président de la cour administrative d'appel de Paris a informé le président de la mission d'inspection des faits litigieux et des échanges qu'il avait eus à leur propos avec l'intéressée. Toutefois, la circonstance que B... n'ait pas eu accès à ce courriel, qui est antérieur à l'engagement des poursuites disciplinaires et dont la teneur, relative aux faits litigieux, que Mme B... n'a jamais contesté avoir commis, est retracée dans le rapport du président de la mission d'inspection qui lui a été communiqué, n'est pas de nature, en l'espèce, à affecter la procédure d'irrégularité. Par ailleurs, aucune enquête préliminaire n'ayant, en l'espèce, été conduite par le rapporteur en application des dispositions de l'article L. 236-5 du code de justice administrative, Mme B... ne peut utilement se plaindre de ne pas avoir eu accès aux pièces afférentes à une telle enquête. Il en résulte que le moyen tiré de ce que

Mme B... n'a pas été mise en mesure d'exercer son droit à communication intégrale de son dossier et des documents annexes tel que prévu à l'article L. 236-5 du code de justice administrative doit être écarté.

8. En deuxième lieu, il résulte des dispositions citées au point 4 que le rapporteur devant le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, statuant en formation disciplinaire, qui est un membre de la juridiction disciplinaire, en l'occurrence, soit le président de la mission d'inspection des juridictions administratives, soit, lorsque ce dernier est l'auteur de la saisine, un autre membre de la formation de jugement, est chargé de rapporter l'affaire devant le Conseil supérieur, le cas échéant, après enquête et audition de l'intéressé et, s'il y a lieu, des plaignants et témoins. Lors de l'audience, il présente oralement son rapport devant le Conseil supérieur, lequel n'en dispose pas préalablement, pas davantage que le magistrat poursuivi, ce dernier ayant la parole en dernier. Enfin, le rapporteur n'assiste pas au délibéré de la juridiction disciplinaire.

9. Si Mme B... soutient qu'elle aurait dû avoir préalablement à l'audience communication du rapport du rapporteur, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que le rapporteur n'est jamais l'auteur des poursuites disciplinaires, que son rapport n'est remis ni aux parties ni à la juridiction et est seulement présenté oralement à l'audience, que le magistrat administratif poursuivi peut, à tout moment de la procédure, demander au président du Conseil supérieur l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales et est en outre invité à présenter d'ultimes observations avant que le Conseil supérieur ne commence à délibérer, enfin, que le rapporteur n'assiste pas au délibéré. Eu égard à l'ensemble de ces garanties, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la procédure suivie par le Conseil supérieur, statuant sur les poursuites disciplinaires engagées à son encontre, est entachée d'irrégularité au motif qu'elle n'a pas eu, en l'espèce, communication du rapport du rapporteur qui préconisait qu'une sanction disciplinaire du troisième groupe d'exclusion temporaire de fonctions pendant un an assortie d'un sursis à déterminer et une sanction complémentaire de déplacement d'office lui soient infligées.

10. En troisième lieu, il résulte des dispositions citées aux points 3 et 4 que le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ne peut être saisi des faits motivant des poursuites disciplinaires que par le président de la juridiction à laquelle est affecté le magistrat ou par le président de la mission d'inspection des juridictions administratives. Le président de la mission d'inspection de la juridiction administrative est chargé de rapporter l'affaire devant le Conseil supérieur, sauf s'il est l'auteur de la saisine. Dans ce dernier cas, le président du Conseil supérieur désigne un rapporteur parmi les autres membres du Conseil. Ni le rapporteur, ni l'autorité de saisine, n'assistent, après l'audience, au délibéré des juges au cours duquel ceux-ci élaborent collégialement le projet de décision, laquelle est prise à l'issue d'un vote. Aucune de ces règles, pas plus que la composition du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel statuant en matière disciplinaire, fixée aux dispositions de l'article L. 232-4 du code de justice administrative cité au point 3, ne sont de nature à caractériser un manque d'impartialité de la formation du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel qui a prononcé la décision attaquée. Le fait que le rapporteur ait été, en l'espèce, le secrétaire général du Conseil d'Etat et qu'il ait demandé que soit prononcée à l'encontre de Mme B... une sanction disciplinaire du troisième groupe assortie d'une sanction complémentaire de déplacement d'office n'entache pas davantage, eu égard à ce qui a été dit au point 8, la procédure de méconnaissance du principe d'impartialité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été rendue en méconnaissance des stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

Sur la sanction infligée par la décision attaquée :

11. En premier lieu, la décision attaquée ne faisant pas état du fait que

Mme B... se serait vu infliger la sanction du blâme lors de précédentes poursuites disciplinaires, le blâme étant effacé automatiquement du dossier du magistrat sanctionné par application des dispositions de l'article L. 236-1 du code de justice administrative cité au point 5, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel en ce qu'il ferait état de l'existence d'une sanction effacée manque en fait.

12. En second lieu, si le choix de la sanction relève de l'appréciation des juges du fond au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction retenue n'est pas hors de proportion avec la faute commise et qu'elle a pu dès lors être légalement prise.

13. Il résulte des énonciations de la décision attaquée que Mme B... a subtilisé, puis détourné pour son usage personnel, la carte d'accès aux restaurants administratifs de la Ville de Paris appartenant à un élève-avocat, en stage à la cour administrative d'appel de Paris, utilisant cette carte à plusieurs reprises afin de bénéficier d'un tarif plus avantageux que celui auquel elle avait droit et qu'afin de récupérer la somme qu'elle avait créditée sur cette carte lorsque son utilisation a été bloquée par les services de la Ville de Paris à la fin de la période de stage de son titulaire, elle a créé une adresse de messagerie électronique au nom de ce stagiaire, en utilisant frauduleusement l'identité de ce dernier. Après avoir jugé que ces faits traduisaient un manquement aux obligations de probité, d'intégrité et de dignité qui s'attachent à l'exercice des fonctions de magistrat administratif et étaient de nature à jeter un discrédit sur celles-ci, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel statuant en formation disciplinaire a prononcé à l'encontre de Mme B..., qui avait déjà antérieurement fait l'objet de poursuites disciplinaires, la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un an, dont six mois avec sursis compte tenu de difficultés d'ordre personnel dont elle faisait état, ladite sanction étant en outre assortie de la sanction complémentaire du déplacement d'office. Eu égard à l'exigence d'exemplarité et d'irréprochabilité qui échet aux magistrats administratifs, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, qui n'a pas dénaturé les pièces du dossier, n'a pas prononcé une sanction hors de proportion avec les fautes commises.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée, laquelle est suffisamment motivée.

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme B... à l'encontre de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A..... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée et à la Première ministre, au secrétaire général du Conseil d'Etat et à la présidente de la mission d'inspection des juridictions administratives


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 460102
Date de la décision : 21/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 jui. 2023, n° 460102
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Brouard-Gallet
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:460102.20230721
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