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30/06/2023 | FRANCE | N°466289

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 30 juin 2023, 466289


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Ceetrus France a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge du supplément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auquel elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 ainsi que la restitution des sommes versées à ce titre, assortie du paiement d'intérêts moratoires. Par un jugement n° 1912244 du 3 décembre 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21PA00547 du 1er juin 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel

formé par la société Ceetrus France contre ce jugement.

Par un pourvoi sommair...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Ceetrus France a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge du supplément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auquel elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 ainsi que la restitution des sommes versées à ce titre, assortie du paiement d'intérêts moratoires. Par un jugement n° 1912244 du 3 décembre 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21PA00547 du 1er juin 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Ceetrus France contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 2 novembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Ceetrus France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Ceetrus France ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, la société Ceetrus France a été assujettie, au titre de son activité de location et de sous-location d'immeubles nus, à des suppléments de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des années 2014 et 2015 pour un montant total de 2 635 529 euros. Par un jugement du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. La société Ceetrus France se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er juin 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes du I de l'article 1447 du code général des impôts : " I. - La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales ou par les sociétés non dotées de la personnalité morale qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. / Pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises, les activités de location ou de sous-location d'immeubles, autres que les activités de location ou sous-location d'immeubles nus à usage d'habitation, sont réputées exercées à titre professionnel ; (...) ". Aux termes de l'article 1586 ter du même code : " I. - Les personnes physiques ou morales (...) qui exercent une activité dans les conditions fixées aux articles 1447 et 1447 bis et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 euros sont soumises à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (...) ". Aux termes du II de l'article 1586 sexies du même code : " Par exception au I, les produits et les charges mentionnés au même I et se rapportant à une activité de location ou de sous-location d'immeubles nus réputée exercée à titre professionnel au sens de l'article 1447 ne sont pris en compte, pour le calcul de la valeur ajoutée, qu'à raison de 10 % de leur montant en 2010, 20 % en 2011, 30 % en 2012, 40 % en 2013, 50 % en 2014, 60 % en 2015, 70 % en 2016, 80 % en 2017 et 90 % en 2018 ". Les dispositions du II de l'article 1586 sexies du code général des impôts ont pour objet de prévoir une soumission progressive à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour les produits et les charges se rapportant à une activité de location ou de sous-location d'immeubles nus exercée par les loueurs, autres que les activités de location ou sous-location d'immeubles nus à usage d'habitation, lorsqu'une telle activité de location ou de sous-location n'entre pas déjà dans le champ de cet impôt sur le seul fondement du premier alinéa du I de l'article 1447 du même code.

3. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

4. Le paragraphe n° 410 des commentaires administratifs publiés sous la référence BOI-CVAE-BASE-20 le 12 septembre 2012 commente les dispositions précitées du II de l'article 1586 sexies du code général des impôts en énonçant que : " Les produits et les charges se rapportant à une activité de location ou de sous-location d'immeubles nus exercée par les loueurs, qu'ils soient à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés " ne sont pris en compte, pour le calcul de la valeur ajoutée, qu'à hauteur des taux mentionnés au point 2. Ces énonciations visent la situation de tous les contribuables exerçant une activité de location ou de sous-location d'immeubles nus, sans comporter de précision tenant à la restriction, également rappelée au point 2, du champ d'application des dispositions législatives commentées aux seules activités de location ou de sous-location qui n'entrent pas dans le champ de l'impôt sur le seul fondement du premier alinéa du I de l'article 1447 du code général des impôts. Si le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient en outre que ces énonciations devraient être lues en combinaison avec celles publiées sous la référence BOI-IF-CFE-10-20-30, ces dernières ne mentionnent, en tout état de cause, pas davantage la restriction rappelée au point 2.

5. Par suite, en se fondant, pour juger que la société requérante ne pouvait se prévaloir de ces commentaires sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A des procédures fiscales, sur ce que ceux-ci ne comportaient aucune interprétation de la loi fiscale qui diffèrerait de celle rappelée au point 2, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit.

6. Il en résulte, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, que la société Ceetrus France est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Ceetrus France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 1er juin 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la société Ceetrus France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Ceetrus France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 1er juin 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 30 juin 2023.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Marc Vié

La secrétaire :

Signé : Mme Michelle Bailleul


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 466289
Date de la décision : 30/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2023, n° 466289
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:466289.20230630
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