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20/06/2023 | FRANCE | N°467042

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 20 juin 2023, 467042


Vu la procédure suivante :

La société Limat a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015. Par un jugement n° 1900924 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21MA01842 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société Limat contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentair

e et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 août et 30 novembre 2022 et le 3 mai 2...

Vu la procédure suivante :

La société Limat a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015. Par un jugement n° 1900924 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21MA01842 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société Limat contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 août et 30 novembre 2022 et le 3 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Limat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la Société Limat ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Limat a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 2013 à 2015, à la suite de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des trois exercices vérifiés. Par un jugement du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de la société Limat tendant à la décharge de ces impositions. La société Limat se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 juin 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 57 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas de vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un contribuable exerçant une activité industrielle ou commerciale dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 526 000 euros s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou à 460 000 euros s'il s'agit d'autres entreprises ou d'un contribuable se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes est inférieur à 460 000 euros, l'administration répond dans un délai de soixante jours à compter de la réception des observations du contribuable faisant suite à la proposition de rectification mentionnée au premier alinéa de l'article L. 57. Le défaut de notification d'une réponse dans ce délai équivaut à une acceptation des observations du contribuable ". Il résulte de ces dispositions que lorsque le chiffre d'affaires de la société contrôlée excède, au titre de l'un des exercices vérifiés et rectifiés, les seuils fixés pour l'activité qu'elle exerce, le délai dont dispose l'administration fiscale pour répondre aux observations du contribuable, sur quelque exercice qu'elles portent, n'est pas limité à soixante jours.

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Limat a déclaré un chiffre d'affaires s'élevant à 2 290 153 euros au titre de l'année 2013, à 480 725 euros au titre de l'année 2014 et à 2 548 920 euros au titre de l'année 2015. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu'en jugeant que la société ne pouvait bénéficier de la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 57 A du livre des procédures fiscales au motif qu'entre 2013 et 2015, les montants des chiffres d'affaires déclarés par elle avaient, au moins pour l'un d'entre eux, dépassé le seuil de 1 526 000 euros prévu par cet article, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R.*59-1 du même livre : " Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter la demande prévue au premier alinéa de l'article L. 59 ".

5. Lorsque le contribuable demande, au-delà du délai de trente jours prévu à l'article R.*59-1 du livre des procédures fiscales, la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, l'administration fiscale peut refuser de procéder à cette saisine, quand bien même elle aurait dans un premier temps indiqué au contribuable qu'elle donnerait une suite favorable à cette demande.

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, après avoir relevé que la demande de la requérante de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires était tardive, qu'en refusant de saisir cette commission, l'administration ne l'avait privée d'aucune garantie et n'avait pas manqué à son devoir de loyauté quand bien même elle lui avait indiqué dans un premier temps, en réponse à cette demande, que le différend serait transmis à cette instance.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que la société Limat n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Limat est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Limat et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mai 2023 où siégeaient :

M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; Mme Nathalie Escaut, M. Vincent Daumas, M. Nicolas Polge, M. Alexandre Lallet, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et Mme Cécile Nissen, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 20 juin 2023.

Le président :

Signé : M. Christophe Chantepy

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Nissen

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 467042
Date de la décision : 20/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - DÉLAI SPÉCIAL DE 60 JOURS (ART - L - 57 A DU LPF) – CONDITION – CHIFFRE D’AFFAIRES DE LA SOCIÉTÉ CONTRÔLÉE N’EXCÉDANT PAS - AU TITRE DE L’UN DES EXERCICES VÉRIFIÉS ET RECTIFIÉS - LES SEUILS FIXÉS POUR L’ACTIVITÉ QU’ELLE EXERCE [RJ1].

19-01-03-02-025 Il résulte de l’article L. 57 A du livre des procédures fiscales (LPF) que lorsque le chiffre d’affaires de la société contrôlée excède, au titre de l’un des exercices vérifiés et rectifiés, les seuils fixés pour l’activité qu’elle exerce, le délai dont dispose l’administration fiscale pour répondre aux observations du contribuable, sur quelque exercice qu’elles portent, n’est pas limité à soixante jours.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - COMMISSION DÉPARTEMENTALE - DEMANDE TARDIVE DU CONTRIBUABLE – 1) FACULTÉ DE REFUSER DE PROCÉDER À LA SAISINE – 2) ADMINISTRATION AYANT - DANS UN PREMIER TEMPS - INDIQUÉ QU’ELLE Y PROCÉDERAIT – INCIDENCE – ABSENCE [RJ2].

19-01-03-02-03-02 1) Lorsque le contribuable demande, au-delà du délai de trente jours prévu à l’article R. 59-1 du LPF, la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (CDI), l’administration fiscale peut refuser de procéder à cette saisine, 2) quand bien même elle aurait dans un premier temps indiqué au contribuable qu’elle donnerait une suite favorable à cette demande.


Références :

[RJ1]

Rappr., s’agissant de l’appréciation des seuils prévus pour la garantie de limitation de la durée de la vérification à trois mois issue de l’article L. 52 du LPF, CE, 17 février 1971, Sieur D, n° 79529, p. 136....

[RJ2]

Rappr., jugeant que l’administration peut refuser de saisir la CDI lorsque le litige n'entre pas dans sa compétence, quand bien même elle aurait précédemment indiqué que le différend pourrait lui être soumis, CE, 6 décembre 2006, Messali, n° 255492, T. p. 811.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 2023, n° 467042
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Nissen
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467042.20230620
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